Le journaliste citoyen et militant des droits de l’homme chinois Huang Qi, âgé de 56 ans, a été condamné lundi 29 juillet à une peine de douze ans de prison ferme par la Cour populaire intermédiaire de Mianyang, dans la région du Sichuan, pour “divulgation de secrets d’État” et “divulgation de secrets d’État à une puissance étrangère”. La sentence, la seconde plus lourde jamais prononcée contre un activiste par l’administration de Xi Jinping (en poste depuis 2012), s’accompagne d’une privation des droits civiques de quatre ans, détaille The Guardian.
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Pionnier de la “cyberdissidence” chinoise, Huang Qi n’en est pas à son premier procès. En l’an 2000, il devenait ainsi le premier opposant chinois à purger une peine de prison ferme pour avoir utilisé Internet à des fins politiques. Depuis, plusieurs condamnations ont suivi, notamment en 2009 et 2016. Son plus grand crime, aux yeux des autorités : enquêter sur la corruption des administrations locales de son pays et sur leurs violations supposées des droits de l’homme, notamment des destructions illégales d’habitats et des stratégies de répression des défenseurs des droits. Il avait également dénoncé, en 2009, l’état des constructions après le tremblement de terre du Sichuan, qui avait fait 87 000 morts et disparus dans le pays.
Le blog qu’il a créé et longtemps dirigé, 64 Tianweng, est censuré par le Grand Firewall de Chine et hébergé sur un serveur étranger. Son nom est une référence directe au massacre de la place Tiananmen, le 4 juin 1989, évoqué familièrement “6-4” par la population. En 2016, Huang Qi a obtenu le prix Reporters sans Frontières-TV5 Monde de la liberté de la presse pour son travail journalistique, douze ans après avoir déjà reçu le prix du cyberdissident RSF. Avant son emprisonnement en 2017, il était l’un des activistes les plus éminents et les mieux informés du pays.
Avec cette condamnation exemplaire à l’encontre d’un vétéran de la contestation en ligne, le pouvoir de Xi Jinping fait passer un message d’inflexibilité. Détenu depuis deux ans, Huang Qi souffre d’une maladie des reins, et plusieurs associations internationales de défense des droits humains réclamaient jusqu’alors sa libération, par peur que sa santé ne se détériore encore dans l’univers carcéral.
Dans un communiqué publié lundi, le secrétaire-général de RSF Christophe Deloire a appelé le président Jinping à “faire preuve d’humanité en exerçant son droit de grâce, afin que le journaliste soit libéré avant qu’il ne soit trop tard“. Selon l’association, “cette sentence équivaut à une condamnation à mort compte tenu de l’état de santé catastrophique de Huang Qi, qui a déjà passé plus de dix années de sa vie en détention.” Le 20 décembre 2018, quatre experts des droits humains mandatés par l’ONU appelaient déjà à la libération du dissident, craignant que son état de santé se détériore “jusqu’à un point fatal” en raison des mauvais traitements.