Le jeu vidéo est un medium dont la popularité n’est plus à prouver. Battant régulièrement tous les autres secteurs culturels réunis en termes de chiffre d’affaires, il est devenu un loisir ultra-populaire – et rentable. Cependant, le réduire à un simple support ludique ne rendrait pas hommage à toutes les découvertes et les innovations que ce secteur inspire. Le gaming évolue souvent, et vite.
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Des premières vibrations des manettes à la détection de mouvements de la Wii Remote ou du Kinect en passant par la réalité virtuelle qui émerge depuis quelques années, l’industrie vidéoludique a su donner l’exemple. Elle a tout du moins été la première à trouver de réelles applications à ces technologies, commercialisables de surcroît.
Aujourd’hui, comme tout medium, le jeu vidéo s’interroge sur son avenir et ses futures formes de consommation. Si la réalité virtuelle peine encore à décoller, d’autres dynamiques sont déjà dans les habitudes des gamers. Le phénomène de “dématérialisation” des jeux, c’est-à-dire l’achat en ligne, le téléchargement et le jeu sans aucun support physique, a fini par être une véritable habitude ces dix dernières années.
Au grand dam des nostalgiques collectionneurs de cartouches, boîtiers et steelbooks, la dématérialisation du gaming n’est pas près de reculer. Les premiers convertis furent d’ailleurs les joueurs PC avec le précurseur Steam, plateforme dédiée à “la lutte contre le CD”. Mais les jeux sur consoles généreraient plus de revenus via leurs versions dématérialisées, d’après les derniers chiffres en France.
Les éditeurs et les studios ont bien compris ces changements de consommation et se sont évidemment adaptés. Beaucoup ont lancé leurs “launcher” spécifiques, des mini-plateformes (PC) à télécharger préalablement, utile pour lutter contre le piratage et pour garder les joueurs dans le giron de la marque et de leurs jeux édités : Origin pour EA, Battle.net pour Blizzard ou encore Uplay pour Ubisoft.
Certains sont allés encore plus loin. C’est le cas d’Epic Games qui, après l’énorme succès de Fortnite (jeu exclusivement dématérialisé au passage), a transformé son launcher en store, cassant les marges habituelles pour proposer une plateforme de jeux dématérialisés ultra-compétitive (pour les développeurs) face au monopole de Steam.
Comparaison des marges sur les ventes proposées aux studios/développeurs. (© Epic Games)
L’étape d’après : se passer des machines ?
La dématérialisation des jeux semble être la consommation vidéoludique du futur. La prochaine version de la Xbox One S, qui devrait sortir en mai, ne comportera d’ailleurs même plus de lecteur CD et fera la part belle au Game Pass de Microsoft. Et il semblerait que l’avenir du gaming comportera encore moins de supports physiques qu’on ne le pense, car les consoles et/ou les PC pourraient aussi être dématérialisés.
Cette récente technologie a pris plusieurs noms ces derniers mois : cloud computing, ordinateur dématérialisé ou encore “streaming de jeux vidéo”. De notre côté, on retiendra la petite comparaison très en vogue : le “Netflix du jeu vidéo”, analogie plutôt maline puisque, à l’instar de la célèbre plateforme de VOD, le cloud computing ne nécessite (quasiment) plus qu’un écran comme support physique.
L’idée est somme toute assez simple : au lieu d’avoir à se trimballer un ordinateur de compétition, une lourde Xbox One ou une large PS4, les composants qui permettent de faire fonctionner votre jeu (ou autre) sont rassemblés dans des machines installées dans des bâtiments lointains. Ainsi cela fonctionne comme un serveur et vos seuls besoins de matériel “physique” se résument à un écran, une connexion Internet et une légère interface pour afficher ce que les machines dématérialisées vous permettent de faire à distance.
L’idée a fait son chemin chez les GAFAM (Google, Apple, Amazon, Facebook, Microsoft) particulièrement. Ils semblent quasiment tous intéressés d’utiliser leurs gargantuesques ressources technologiques dans une formule “à distance”, ce qui leur permettrait de rentrer dans le secteur très lucratif du gaming, et ce sans subir les coûts élevés qu’implique la production de consoles.
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Pour le moment, le plus avancé sur la question reste le monstre Google. La firme compte dévoiler une console entièrement dédiée au streaming à la Game Developers Conference du 19 mars. En attendant, la multinationale a commencé à donner quelques preuves de l’efficacité de sa technologie en proposant de jouer à Assassin’s Creed Oydssey en ouvrant seulement un onglet de Google Chrome grâce à Google’s Project Stream, disponible en bêta-test pour le public américain.
Test : que vaut la Shadow Ghost et le PC gaming réduit à un si petit objet ?
Rassurez-vous, il n’y a pas que les GAFAM yankees qui s’intéressent à ces technologies, nous avons aussi notre petite fierté nationale : Shadow. Cette marque a été créée par l’entreprise Blade, sous la direction d’Emmanuel Freund, un entrepreneur français bien décidé à faire du cloud computing une constante dans les années à venir. C’est bien dans l’Hexagone que le futur du gaming pourrait trouver sa naissance.
Le concept de Shadow est assez simple : vous ouvrez l’application sur votre PC, sur votre Mac ou même sur votre smartphone et cette dernière se charge de vous connecter à un ordinateur surpuissant dédié, qui sommeille tranquillement dans un bâtiment aux côtés de ses congénères.
Ainsi, moyennant un abonnement mensuel, vous obtenez votre compte Shadow ainsi qu’un véritable PC (sous Windows) auquel vous pourrez accéder tant que vous avez une connexion Internet. Vos données sont bien évidemment privées et seul vous pouvez y accéder. Les mesures de sécurité prises par Blade sont par ailleurs plutôt rassurantes à ce sujet.
On ne parle ici pas d’un PC lambda. S’il est bien évidemment possible de se contenter d’ouvrir Netflix ou même Photoshop, ce serait clairement sous-estimer la technologie Shadow. Ses configurations sont d’une gamme très élevée : une carte graphique GTX 1080, un processeur Intel Xeon 6 threads, 12 Go de RAM, etc. On parle ici de l’équivalent d’un PC fixe à minimum 1 500 euros l’unité centrale.
La Shadow Ghost de face. (© Blade)
Cependant, la grande nouveauté de ces dernières semaines tient dans la paume (ou presque, mais perso j’ai de grandes mains) : la Shadow Ghost, nouveau boîtier sorti par Blade qui nous a été proposé au test. Le concept est exactement celui de Shadow, mais au lieu d’ouvrir l’application, vous utilisez désormais cette petite boîte.
Nous avons testé pendant plusieurs semaines la Shadow Ghost, particulièrement via l’angle du gaming, étant donné que ce genre de configuration s’adresse pour le moment à public plutôt initié. Les résultats sont très impressionnants lorsqu’il s’agit de performance, sur des jeux très récents (et gourmands) tels qu’Anthem, Battlefield V ou encore Resident Evil 2 (remake).
Le rendu est tout simplement impeccable, s’affichant en “Ultra” quel que soit le jeu sans qu’il n’y ait le moindre ralentissement technique. En mettant correctement à jour les pilotes Nvidia de la carte graphique, il est même possible de profiter des technologies avancées tels que le ray-tracing, un rendu ultraréaliste des effets de lumières.
Nous ne sommes pas très étonnés de ce côté-là : avec une telle configuration, aucun problème pour faire tourner ces jeux et les sessions de gaming furent du plus grand luxe. Du côté de la Ghost en particulier, il s’agit d’un objet extrêmement simple mais complet en tout point. Déjà parce qu’elle ne fait aucun bruit, son refroidissement est passif, mais aussi parce qu’elle dispose de toutes les entrées et sorties dont vous avez besoin : wi-fi, ethernet, Bluetooth, HDMI, jack 3.5, USB 3.0, etc.
Tout est là pour faire de cette petite boîte une interface complète, comme n’importe quel ordinateur fixe. Le petit bonus pour les gamers est celui de profiter d’une connexion de téléchargement absolument optimale (puisque cette dernière se fait cette fois au serveur directement), ce qui m’a permis d’avoir Anthem en ne patientant pas plus de 5 minutes.
La Shadow Ghost, de dos. (© Blade)
La Ghost fonctionne comme on l’attend. Malgré un bug un peu étrange une fois, elle n’a pas démérité une seule seconde. Si, techniquement, elle est au point, c’est peut-être le concept qui peut laisser dubitatif. En effet, des mots du patron de Shadow, l’objectif de cette technologie est de nous débarrasser des ordinateurs. Pourtant, il faut prévoir un écran, une souris et un clavier minimum, plus une sortie pour le son.
Autre problème : reste celui de la connexion nécessaire. Si Shadow indique que sa technologie est accessible à partir d’un débit (réel) de 15mb/s, en réalité, même à 20 mb/s, le lag se ressent dans la souris, et tout jeu devient impossible. Se débarrasser des ordinateurs demande toute de même une connexion par câble ethernet, le wi-fi étant quasiment insuffisant à chaque fois et la 4G(+) très peu stable.
En conclusion, la technologie fonctionne mais, pour le moment, les infrastructures de réseau ne sont pas suffisantes et il reste encore un problème de sédentarité pour la Ghost. Ce n’est bien sûr pas aujourd’hui que nous jetterons nos ordinateurs, mais il est vrai que les gamers peuvent être intéressés par de telles configurations, qui sont en plus renouvelées sans cesse avec les dernières sorties.
Il faudra voir si le prix ne sera pas rédhibitoire aussi. Si 119,95 euros est un montant très correct pour la Shadow Ghost, l’abonnement reste à 39,95 euros/mois ou 29,95 euros/mois avec un engagement d’un an. Ainsi, la question de payer 360 euros par an ou d’investir une fois un bon millier d’euros en mettant à jour à sa guise son unité centrale de gaming se pose. Ce sera aux gamers de décider.
La Shadow Gost. (© Blade)