Le gouvernement allemand s’apprête à lancer une application mobile, inspirée de Singapour, pour faciliter le suivi individuel des cas et l’identification des chaînes de contamination au coronavirus, dans le cadre de la stratégie de sortie progressive du confinement.
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Comme partout en Europe, où ce sujet de l’exploitation des données issues des smartphones est à l’étude, il suscite un vif débat autour de la protection des données privées. Le projet vise à informer, sur la base du volontariat, chaque individu s’il a été en contact avec une personne contaminée.
Membre d’un conseil numérique du gouvernement allemand, le chercheur et entrepreneur allemand Chris Boos est au cœur des projets actuellement développés.
AFP | Quand va sortir en Allemagne la première application de traçage du coronavirus ?
Chris Boos | Fin avril, cela me semble réaliste. Tout le monde la veut dès que possible. Mais il faut qu’elle soit d’abord testée et certifiée en matière de sécurité.
Votre travail avec 130 chercheurs européens est de livrer des solutions techniques sur une plateforme mise à disposition de développeurs. Quelles sont ces solutions ?
D’abord, le système doit reposer sur une mesure appropriée (des contacts entre détenteurs de téléphones portables) pour éviter de comparer des choux et des carottes. Ensuite, la vie privée doit être protégée. Aucune donnée de localisation n’est utilisée ni aucune donnée d’identification du téléphone, comme le numéro de carte SIM. Enfin, le système doit être interopérable à l’international, afin que je puisse voyager librement dans des pays qui utilisent la même plateforme.
Cette mesure reposant sur la technologie Bluetooth, pouvez-vous garantir sa fiabilité ?
La technologie Bluetooth peut mesurer précisément la distance d’un téléphone à un autre par un système d’écoute. On peut ensuite déterminer si cette mesure est pertinente sur le plan épidémiologique. Dans le cas le plus simple, si les deux téléphones étaient distants de moins de 2 mètres et pendant plus de 15 minutes.
Comment éviter que quelqu’un ne se déclare malade sur l’application alors qu’il ne l’est pas en réalité ?
Avant que le processus ne commence, il faut toujours une confirmation d’un cas de maladie côté utilisateur, sur une base volontaire, et côté médecin traitant ou autre service de santé.
Pourquoi l’Allemagne, la France et d’autres pays travaillent-ils chacun sur une ou plusieurs applications et pas sur un projet commun ?
Ce qui importe est que ces diverses applications puissent fonctionner ensemble par la suite. Car si ce n’est pas le cas, les frontières continueront de rester fermées.
Combien de gens devront utiliser l’application pour qu’elle produise les effets attendus ?
Une étude de l’université d’Oxford indique que 60 % de la population devrait utiliser cette application s’il n’y a pas d’autre mesure pour lutter contre la propagation du coronavirus. Moins il y a de personnes qui utiliseront l’application, plus il y aura besoin de mesures strictes.
Pensez-vous que les personnes ne seront pas réticentes à télécharger l’application sur leur portable en craignant des effets sur leur vie privée ?
Nous avons voulu dès le départ éviter de reproduire la situation dans certains pays asiatiques où les gens sont rendus complètement transparents. Je ne vois pas de problème dès lors que nous proposons une alternative sécurisée et respectant la loi sur la protection des données.
Qui va selon vous proposer cette application au public en Allemagne ?
L’Institut allemand d’épidémiologie et de veille sanitaire Robert-Koch (RKI) me semble bien placé et ce n’est pas un secret qu’il travaille sur le projet. D’autres acteurs dans la sphère des start-up sont aussi mobilisés. Voyons à la fin qui apportera la meilleure solution […] et le gouvernement formulera une recommandation.