Vendée Globe : Davies et Attanasio, ensemble à terre, face à face sur la mer

Vendée Globe : Davies et Attanasio, ensemble à terre, face à face sur la mer

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Photos YVAN ZEDDA / DR /

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Par Lucie Bacon

Publié le

Pour la première fois, le couple de navigateurs participera en même temps au légendaire tour du monde en solitaire.

Chacun leur tour, ils ont déjà fait le tour du monde en solitaire. À chaque fois, l’autre restait à terre pour s’occuper de leur fils, Ruben. Pour la première cette année, le couple Samantha Davies-Romain Attanasio prendra le départ du Vendée Globe, chacun sur un monocoque Imoca. Entretien à quelques semaines du départ des Sables d’Olonnes.
Konbini Sports | Jusque-là, lorsque vous disputiez un Vendée Globe, l’un de vous restait à terre, notamment pour s’occuper de votre petit garçon. Pourquoi, cette fois, le faire ensemble ?
Samantha Davies | C’est notre rêve de faire le Vendée Globe, et jusque-là, seulement l’un de nous deux avait à chaque fois la possibilité de se lancer dans l’aventure. Cette fois, on a la chance de pouvoir partir tous les deux.
Comment s’est déroulée votre préparation ? L’avez-vous faite ensemble ou séparément ?
Romain Attanasio | Nous sommes ensemble au centre d’entraînement de Port-la-Forêt, nous faisons partie du même pôle. Nous faisons donc ensemble les formations météo, les roadbooks. En revanche, nous avons chacun des équipes techniques différentes. C’est vrai qu’on partage plus nos expériences tous les deux qu’avec nos autres concurrents.
Samantha Davies | On a déjà vécu trois Vendée Globe ensemble [deux pour elle, un pour lui, ndlr], du coup on a déjà partagé ensemble forcément beaucoup d’expérience.
Vous êtes donc assez transparents l’un envers l’autre, ou vous gardez quelques secrets pour la course ?
Romain Attanasio | Oui, je pense qu’on est transparents, enfin je crois…
Samantha Davies | On n’est pas des concurrents directs, nos bateaux ne sont pas de la même génération, donc c’est sympa de partager ce que l’on fait. En revanche, pendant la course, on n’a pas le droit à l’assistance extérieure donc on ne pourra pas parler de certaines choses, il y a des sujets qu’on ne peut pas aborder en course.
Romain Attanasio | Oui, la météo ou les stratégies, c’est interdit d’en parler. La course par équipe est interdite, il y a des règles strictes.
Comment allez-vous communiquer l’un avec l’autre pendant la course ?
Romain Attanasio | Par mail et téléphone, presque comme à terre. Ce sont les parents de Sam qui gardent Ruben, elle sera en contact avec eux, et ensuite elle m’enverra des messages pour me tenir informé de ce qui se passe à terre.
Samantha Davies | WhatsApp, ça marche pas mal. Le prix des communications a beaucoup baissé, donc on utilise WhatsApp plus souvent.
Romain Attanasio | Quand on répond à nos amis sur WhatsApp, ils nous demandent si on n’est pas en mer, et on répond “si, si”, ça les fait halluciner. Maintenant, en mer, on peut presque communiquer comme à terre.
Romain, quels sont les points forts de Samantha selon vous ?
Romain Attanasio | Elle est très forte, elle navigue très bien, elle a un bateau et une équipe performants. Elle est capable de faire un gros résultat, mais ne lui dites pas, ça va lui mettre la pression…
Samantha Davies | [Elle rit.] J’entends, hein !
Samantha, quels sont les points forts de Romain ?
Samantha Davies | Il a ce qu’on appelle un sens marin, il a un feeling sur le bateau, ça m’étonne toujours. Romain, il a cette faculté, en montant sur le bateau, de le sentir, même la nuit, très vite il arrive à le maîtriser. J’ai beaucoup apprécié ça à chaque fois que j’ai navigué avec lui.
En 2016 [quand il a participé pour la première fois au Vendée Globe, ndlr], il avait cassé ses deux safrans, mais il n’a pas baissé les bras, il a voulu finir la course sachant qu’il allait perdre de la distance sur les autres. Beaucoup auraient abandonné, et lui n’a rien lâché, il a fini le Vendée Globe, c’est très inspirant.
Romain Attanasio | Je voulais tellement le finir que ça aurait été plus dur pour moi d’abandonner.
Est-ce qu’on a peur à l’idée de savoir que sa moitié est seule sur la mer en même temps que soi ?
Romain Attanasio | Je connais son niveau technique, ça ne me fait pas peur. Si je pensais que c’était une truffe et qu’elle se mettait en danger, là ça me ferait peur.
Samantha Davies | Oui, c’est pareil, en 2016, j’ai vu comment il avait géré. C’est un super bon marin, il a fait énormément ses preuves, on a déjà fait des Transats ensemble donc je l’ai vu naviguer. Je pense aussi que le fait d’être sur l’eau en même temps, c’est mieux, il n’y a pas le décalage qu’on a quand l’un des deux reste à terre. C’est presque rassurant d’être sur place, on n’est pas avec l’autre, mais on vit la même chose. C’est moins impressionnant que d’être à terre au chaud dans son lit. Honnêtement, on verra aussi comment on va le vivre et gérer nos émotions, cela va aussi faire partie de notre aventure.
Samantha, pouvez-vous nous parler d’Initiatives-Cœur, projet pour lequel vous prenez la mer ?
Samantha Davies | Je suis super fière de ce projet, j’ai de la chance car il a du sens. Parfois, le sport de haut niveau, c’est égoïste. On n’est pas médecin, enseignant ou infirmière, on se demande ce que l’on peut faire pour changer la vie des gens.


Ce projet est génial car il mêle sport et aventure. C’est un système de levée de fonds pour une association, et on amène le public avec nous sur l’aventure que l’on partage, avec un euro donné pour chaque clic du public sur Instagram ou Facebook. Grâce à cela, on va pouvoir sauver des enfants qui n’ont pas eu la chance de naître dans un pays où ils peuvent être soignés. C’est juste incroyable, mon objectif c’est de lever un max d’argent avec le public pour sauver des vies.
Si l’un de vous gagne ce Vendée Globe, comment va réagir l’autre ? Vous n’allez pas vous détester ?
Romain Attanasio | Au contraire, si elle gagne, ça sera parfait !
Samantha Davies | La victoire, c’est déjà de finir ce tour de monde !

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