Début février, je vous racontais comment je m’étais décidée à courir le semi-marathon de Paris alors que je ne cours pas. Cela va faire un petit mois que j’ai pris mon dossard, il reste moins de deux semaines avant la date fatidique du 6 mars et ma motivation et ma confiance en moi font les montagnes russes.
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L’euphorie des débuts
Depuis début février, je rythme mes semaines selon les entraînements. J’ai enfin acheté des baskets à ma taille (c’est-à-dire quasiment deux pointures au-dessus de ma “pointure de ville”, mes orteils m’en remercient), des chaussettes épaisses, des hauts à manches longues et une petite veste adaptée. Les pulls ont même des trous pour les pouces. La preuve que je ne blague pas.
Au moins deux fois par semaine, je rentre chez moi vers 22 heures et, dans la rue, mon esprit quitte mon corps et me juge. Je suis devenue cette personne équipée pour le footing qui court le soir, cette personne que je regardais avant en me demandant : “Quels choix de vie a-t-elle faits pour être en train de courir un mardi d’hiver à 21 heures 30 ?”
Je me demande également qui je suis devenue quand, certains soirs, je me retrouve entourée d’une centaine d’autres coureuses et coureurs réunis grâce aux réseaux et prêts à partir trottiner en petits groupes. Un soir, un homme clairement drogué et aviné faisait face à cette masse de sportifs enthousiastes, leur hurlant des obscénités. La scène était absurde mais j’avoue m’être demandée, l’espace d’un instant, de quel côté se trouvaient les vrais fous.
Ceci dit, je ne regrette rien. Je me sens remplie d’énergie du matin au soir. Et souvent impatiente d’aller à ma prochaine séance de sport, fût-elle en lien direct avec la course ou pas. Un matin, mon amie Donnia me regarde, désemparée : “Je ne me suis jamais sentie aussi molle face à une personne, t’as beaucoup trop d’énergie. En tout cas, s’il te plaît, n’arrête pas tout d’un coup après le semi, tu risques de faire une dépression si toutes ces endorphines disparaissent soudainement.”
Le temps des interrogations…
Honnêtement, je n’ai pas envie de me débarrasser de ces fameuses endorphines. J’ai rarement la flemme et, quand elle s’empare de moi, elle se fait oublier une fois que je suis en mouvement. Je me sens trop fière de faire du fractionné avec des inconnu·e·s autour d’un stade – parce que je pensais que ça ne m’arriverait jamais – et je suis trop contente de retrouver ma “copine du mercredi soir” quand je cours avec ces fameux groupes trouvés sur les réseaux.
J’en profite pour poser des questions à toutes celles et ceux avec qui je cours : “C’est normal d’avoir aussi faim tout le temps ?” ; “Tu as marché pendant ton semi toi ?” ; ou encore, ma plus grande interrogation de toutes : “Les bananes distribuées au ravito [comprendre, points de ravitaillement situés le long des courses, ndlr] sont-elles déjà pelées ou allons-nous vivre une sorte de Mario Kart géant ?”
Moi dans mon imagination, interloquée, face aux potentielles peaux de banane qui joncheront le bitume parisien le 6 mars prochain. (© Nintendo)
Le problème de poser autant de questions, c’est qu’on me donne beaucoup de réponses. Notamment celles me conseillant d’effectuer des “sorties longues”, ces footings d’une quinzaine de kilomètres que je n’ai pas encore eu le temps de faire – ce qui m’arrange bien.
… et du retour de bâton
Un samedi matin, ma cousine m’enjoint de sortir courir quinze kilomètres “juste pour [me] rassurer et [me] prouver que [je] peux le faire”. Je réponds “Oui, oui, bonne idée” en songeant que personne ne se prépare à un accouchement en extrayant un ballon de rugby de son utérus et que ce sera bien plus marrant de découvrir le jour du semi si je suis capable de courir autant de kilomètres (oui, je sais faire preuve de beaucoup de mauvaise foi).
Une heure après l’avoir quittée, le soleil me convainc de sortir courir quand même. C’est la première fois que je cours seule depuis que je me suis décidée à faire cette course et, mon Dieu, d’une part, je m’ennuie, mais, surtout, je n’avance rien. Pendant six kilomètres, j’insulte les autres (dans ma tête) et je m’insulte moi-même (à voix haute).
Je me dis que je n’y arriverais jamais, que je me suis emballée bien trop vite et qu’il faudrait que je trouve un mensonge à raconter à tout le monde. Du genre qu’en vrai, je fume un paquet de Gauloises par jour en cachette depuis mes 12 ans et que c’est pour ça que je galère autant. Finalement, le temps passe et je finis par boucler seize kilomètres sans trop m’en rendre compte.
Le lundi, j’arrive tout sourire devant mon collègue Abdallah : c’est bon, la sortie longue, c’est fait. L’euphorie de la course m’aidera pour les cinq derniers et je vais faire semblant de ne pas me préoccuper de mon temps. J’ai à peine terminé ma phrase qu’il me coupe : “Justement, je pensais à toi, j’ai vu hier un ami qui court beaucoup. Il m’a dit qu’il fallait terminer plusieurs sorties longues avant la course. Une, ça ne suffit pas.” Comment ça “plusieurs”, on ne peut pas dire que c’est bon, que je suis prête là ?
On rigole, on rigole, mais le vrai problème c’est qu’à vouloir m’y mettre si vite, j’ai couru un peu trop et un peu n’importe comment. Mon genou gauche me rappelle que j’ai un quart de siècle de vie sur Terre et qu’apparemment, c’est beaucoup. Julien, coureur de plusieurs semis et d’un marathon, me donne sa règle d’or ultime : “Tu ne forces pas, si tu as mal, tu ne t’entraînes pas, même pas cinq kilomètres.”
Je ne l’ai pas écouté tout de suite et, maintenant, j’ai mal. Pourtant il va bien falloir que je retourne courir. Le 6 mars devrait s’avérer plein de surprises.
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