Croix gammée sur sa mézouzah, tag “sale juive morte” écrit dans l’ascenseur de l’immeuble avec indication de l’étage et de la porte où elle vit avec ses deux enfants… Sur sa page Facebook, Nancy S. documentait depuis des semaines l’horreur à laquelle elle disait être confrontée.
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Suite à ses nombreuses plaintes pour “des tags antisémites dans les parties communes du bâtiment à 10 reprises entre le 19 septembre et le 24 octobre 2024”, le parquet de Paris avait ouvert une enquête pour dégradations en raison de la religion.
Dans un contexte de recrudescence des actes antisémites en France, nous étions allé·e·s à sa rencontre le 23 octobre dernier où elle nous a présenté des procès-verbaux, des comptes-rendus et ses différents dépôts de plaintes. Dans l’une d’elles, elle expliquait “vivre à l’adresse où avait été tuée Mireille Knoll le 23 mars 2018”, une octogénaire qui avait échappé à la rafle du Vel d’Hiv et qui avait été poignardée en mars 2018 par un voisin, parce que Juive.
Les investigations “et notamment l’exploitation de toutes les caméras avoisinantes n’[ont] pas permis d’identifier d’intrus susceptible d’être entré commettre ces dégradations”, expliquait le ministère public. Une caméra installée le 2 décembre dans le hall d’immeuble n’avait pas permis non plus de trouver le coupable.
Les tags et les menaces persistent, alors elle décide de faire un dossier de changement de logement auprès de Paris Habitat et est reçue par le maire du XIe arrondissement de Paris, qui s’était dit “prêt à accélérer le plus possible la procédure de relogement”. Enfin, elle décide de mettre une caméra à son judas. Il n’y a plus d’inscriptions sur la porte mais les tags continuent dans l’ascenseur et sur la boîte aux lettres.
Le 20 décembre, Nancy S. dépose de nouveau plainte, rapportant avoir reçu un courrier antisémite à son adresse. Ce sera cette lettre, ou plutôt le timbre sur l’enveloppe qui résoudra l’affaire : c’est elle.
Jugement le 31 mars pour dégradations racistes et dénonciations mensongères
Les investigations de la police permettront de l’identifier “elle-même comme ayant acquis le timbre apposé sur ce courrier” , a indiqué ce lundi le parquet, confirmant une information du Parisien. Aussi, une caméra installée dans l’ascenseur de l’immeuble a filmé Nancy S. et sa fille en train de “commettre elles-mêmes les dégradations” le 18 janvier dernier
Contactée par Konbini news, Nancy S. réfute cette version. Selon elle, elle n’a pas tenu le feutre ou fait de tags ce jour-là et remet la faute sur sa fille de 16 ans : “elle est venue me voir en larmes et m’a avoué que c’était elle depuis le début qui faisait des tags”. Une version que la jeune fille aurait confirmée à la police avant de se rétracter et d’accuser sa mère “d’avoir tout orchestré depuis le début”, selon les dires de Nancy S.
Les deux femmes ont été placées en garde à vue le 22 janvier. À l’issue de cette garde à vue, Nancy S. devait être jugée en comparution immédiate par le tribunal correctionnel de Paris pour dégradations racistes et dénonciations mensongères, mais l’audience a été renvoyée au 31 mars.
Jusqu’au procès, Nancy (et son fils de 12 ans) vit chez son frère tandis que l’adolescente a été placée provisoirement.
Cette affaire n’atténue en rien les faits d’antisémitisme en France dont 1 570 actes ont été recensés en 2024, selon des chiffres récemment annoncés par le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif).