Après un premier rendez-vous manqué, le grand jour : Charles III entame mercredi une visite d’État de trois jours en France, empreinte de solennité et de faste, pour célébrer la relance de l’amitié franco-britannique après les turbulences du Brexit.
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En mars, tout avait dû être annulé à la dernière minute sur fond de violentes manifestations en France contre la réforme des retraites. Charles, qui devait signer à Paris sa première visite officielle à l’étranger en tant que roi, s’était finalement d’abord rendu à Berlin.
Six mois plus tard, le calme est revenu dans les rues de la capitale française et l’heure est de nouveau à “l’Entente cordiale”, ou concorde franco-britannique, dont les 120 ans seront célébrés en avril prochain. “La visite intervient dans un contexte de resserrement des liens entre le Royaume-Uni et la France” après une première phase de “reconnexion”, se félicite l’Élysée.
Lors d’un sommet en mars, Emmanuel Macron et le Premier ministre Rishi Sunak ont tourné la page de plusieurs années de brouilles bilatérales sur le Brexit, la pêche et les migrants. Pour les grandes retrouvailles, la République a sorti le grand jeu, des Champs-Élysées à la galerie des Glaces du château de Versailles.
Dans les pas d’Elizabeth II
Peu avant 15 heures, Charles III et Camilla seront accueillis en grande pompe par Emmanuel et Brigitte Macron à l’Arc de Triomphe pour une cérémonie de ravivage de la flamme sur la tombe du Soldat inconnu suivie d’une descente des Champs-Élysées. Le roi et le président emprunteront l’avenue la “plus célèbre du monde” à bord d’une Citroën DS 7 décapotable escortée par 136 chevaux de la Garde républicaine pour rejoindre le palais de l’Élysée où ils auront un entretien en tête-à-tête.
Autre temps fort de la visite, un dîner d’État sera offert dans la soirée dans la prestigieuse galerie des Glaces. Un clin d’œil à la mère du roi, Elizabeth II, qui fut invitée à déjeuner dans le même décor somptueux en 1957 et revint à Versailles en 1972. Le roi était sensible à l’idée de “marcher dans les pas de sa mère”, souligne l’Élysée. Il se rendra aussi jeudi au Marché aux fleurs, que sa mère affectionnait et qui avait été rebaptisé du nom de la reine en 2014, au cœur de Paris. À Versailles, la République va mettre les petits plats dans les grands : homard bleu, volaille de Bresse et macaron à la rose, préparés par trois chefs, seront servis à la table du roi, dans une porcelaine de Sèvres.
Dans les personnalités du monde de la culture, on attend notamment à ce dîner le chanteur des Rolling Stones Mick Jagger, les acteurs Hugh Grant, Charlotte Gainsbourg et Emma Mackey, les écrivains Ken Follett, Kate Elliott et Christopher Hampton, les photographes Bettina Rheims et Yann Arthus-Bertrand…
Parmi les représentants du monde sportif figurent l’ancien manager d’Arsenal Arsène Wenger, les ex-footballeurs Didier Drogba et Patrick Viera qui ont beaucoup joué en Angleterre, l’ancienne joueuse de tennis Amélie Mauresmo (gagnante de Wimbledon en 2008) ou encore le président du comité d’organisation de Paris 2024 Tony Estanguet.
Les grandes entreprises françaises seront fortement représentées avec Bernard Arnault (LVMH), Xavier Niel (Illiad), Leena Nair (Chanel), Catherine Macgregor (Engie), Jean-Dominique Sénard (Renault)…
“Excellence française”
En conviant Charles III à Versailles, Emmanuel Macron s’inscrit aussi dans les pas du général de Gaulle, qui avait fait du château une véritable carte de visite diplomatique, et envoie un signal fort au Royaume-Uni. “Le château de Versailles représente la France, l’excellence française à l’étranger. Il s’agit d’honorer son hôte et d’une certaine manière de l’impressionner”, rappelle l’historien Fabien Oppermann, auteur de Le Versailles des présidents.
Que ce soit en 1957, un an après la crise du canal de Suez, en 1972 lors de l’entrée du Royaume-Uni dans la Communauté économique européenne (CEE), ou en 2023, “à chaque fois qu’on a voulu marquer une relation privilégiée avec l’Angleterre, il y a eu une réception à Versailles”, dit-il.
Le roi, qui entend asseoir son image à l’international un an après son accession au trône, entamera jeudi la partie la plus politique de sa visite avec un discours à la tribune du Sénat, une première pour un souverain britannique. Il mettra aussi en avant un sujet qui lui tient à cœur, l’environnement, lors d’une table ronde sur le réchauffement climatique qu’il clôturera avec le président Macron au Muséum national d’histoire naturelle, puis vendredi à Bordeaux, dans une région durement frappée par les incendies en 2022 et qui compte de nombreux Britanniques.
“Le roi Charles qui n’était encore que le prince Charles il y a un an est en train de se positionner sur la scène internationale comme une figure dirigeante”, relève l’historien britannique Ed Owen. Pour la circonstance, 8 000 policiers et gendarmes seront mobilisés mercredi et jusqu’à 12 000 vendredi, où la visite du roi coïncidera aussi avec celle du pape François à Marseille.