L’Espagne, l’Irlande et la Norvège ont annoncé mercredi leur décision de reconnaître conjointement un État palestinien dans l’espoir d’entraîner d’autres pays à faire de même, alors que la solution à deux États est, selon Madrid, “en danger”. “C’est le moment de passer des paroles aux actes, de dire à des millions de Palestiniens innocents qui souffrent que nous sommes avec eux et qu’il y a de l’espoir”, a déclaré le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez depuis la tribune de la Chambre des députés. Le leader socialiste, qui a annoncé dès l’automne son intention de reconnaître un État palestinien, était à la manœuvre depuis des mois pour rallier d’autres capitales européennes.
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Mercredi, c’est le Premier ministre norvégien Jonas Gahr Støre qui a été le premier à annoncer cette reconnaissance à la date du 28 mai. “Nous devons faire vivre la seule alternative offrant une solution politique à la fois aux Israéliens et aux Palestiniens : deux États, vivant côte à côte, dans la paix et la sécurité”, a-t-il déclaré, en lançant un “appel fort” à d’autres pays pour qu’ils rejoignent cette initiative.
“Seul chemin crédible”
La solution à deux États est “le seul chemin crédible vers la paix et la sécurité pour Israël et pour la Palestine”, a abondé quelques minutes plus tard à Dublin le Premier ministre irlandais Simon Harris.
Devenu l’une des voix les plus critiques au sein de l’UE contre l’opération militaire israélienne lancée à Gaza en représailles à l’attaque du Hamas le 7 octobre dans le sud d’Israël, M. Sánchez a accusé le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, de mettre “en danger” cette solution en provoquant “douleur, destruction et rancœur”. La reconnaissance d’un État palestinien par Madrid se fera sur la base d’une résolution adoptée en 2014 par l’ensemble des formations politiques représentées au Parlement espagnol, mais qui n’avait pas été suivie d’effet.
D’après le décompte de l’Autorité palestinienne, 142 pays des 193 États membres de l’ONU ont jusqu’à présent annoncé qu’ils reconnaissaient un État palestinien. Cette annonce coordonnée d’Oslo, Dublin et Madrid a été saluée comme “une étape importante” par le Hamas et comme un moment “historique” par l’Organisation de libération de la Palestine (OLP).
Israël, qui considère que cette décision ne fera “que nourrir l’extrémisme et l’instabilité”, a, de son côté, annoncé sans tarder le rappel “pour consultations” de ses ambassadeurs en Irlande et en Norvège.
“Pion dans les mains de l’Iran”
Dans un message vidéo à l’adresse de Dublin publié mardi sur le réseau social X/Twitter, la diplomatie israélienne avait affirmé que “reconnaître un État palestinien (risquait) de […] transformer” les pays prenant une telle décision “en pion dans les mains de l’Iran” et du Hamas. L’initiative conjointe de Madrid, Dublin et Oslo pourrait être rejointe par d’autres pays européens.
En mars à Bruxelles, les dirigeants slovène et maltais avaient signé un communiqué commun avec Madrid et Dublin dans lequel les quatre pays faisaient part de leur volonté de reconnaître un tel État. Le gouvernement slovène a adopté le 9 mai un décret pour la reconnaissance d’un État palestinien, comptant l’envoyer au parlement pour approbation d’ici au 13 juin.
La Norvège a joué un rôle clé dans le processus de paix au Proche-Orient dans les années 1990, en accueillant secrètement les premiers pourparlers ayant débouché sur les accords d’Oslo et sur la poignée de main historique en 1993 à la Maison-Blanche entre l’Israélien Yitzhak Rabin et le Palestinien Yasser Arafat. Ce processus avait été lancé à Madrid par une Conférence de paix israélo-arabe fin octobre 1991.
La guerre dans la bande de Gaza a été déclenchée par l’attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre qui a entraîné la mort de plus de 1 170 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l’AFP réalisé à partir de chiffres officiels israéliens. Sur les 252 personnes alors emmenées comme otages le 7 octobre, 124 sont toujours retenues à Gaza, dont 37 mortes, selon l’armée.
L’opération militaire lancée en représailles par Israël dans la bande de Gaza a entraîné la mort d’au moins 35 647 personnes, en grande majorité des civils, selon des données du ministère de la Santé du Hamas, qui ne fait pas la distinction entre civils et combattants.