Elles étaient quelques centaines à descendre dans les rues de Manchester, pancartes en main. “La seule injection que je veux dans mon corps, c’est du Pzifer”, affiche une manifestante. Le maire du Grand Manchester, Andy Burnham, a même pris la parole face à la foule, affichant son soutien. Le mouvement “Girls Night In” a appelé les femmes à boycotter les bars et boîtes de nuit les 27 et 28 octobre, à la suite de plusieurs affaires où certaines ont été droguées à leur insu.
À voir aussi sur Konbini
Chargement du twitt...
Lancé dans une cinquantaine de villes britanniques, dont Londres, Edimbourg, Liverpool, Bristol ou encore Manchester, le mouvement “Girls Night In” vise à alerter les pouvoirs publics et les forces de l’ordre sur les risques encourus par les femmes dans les lieux de fête. Un mouvement qui a fait du bruit sur les réseaux sociaux, et notamment sur Instagram, relayé par les associations étudiantes de plusieurs villes.
Un phénomène qui explose outre-Manche
Mercredi, la police britannique a rapporté 198 signalements entre début septembre et fin octobre au Royaume-Uni de “drink spiking”, une pratique qui consiste à droguer une personne à son insu, notamment avec de l’alcool ou des psychotropes comme le GHB. De plus, ont été rapportés 24 cas par injections de drogues à l’aide de seringues fines, dites aiguilles hypodermiques. Selon les militantes engagées dans la dénonciation de ces abus, les chiffres affichés seraient bien en deçà de la réalité, beaucoup de victimes ne porteraient pas plainte.
De nombreuses victimes ont témoigné dans des médias britanniques, affichant leurs marques d’aiguilles, leurs ecchymoses ou leurs souvenirs troublés par les effets de la drogue. Emma MacDonald, étudiante à Glasgow, a ainsi raconté son histoire.
Chargement du twitt...
Zara Owen, 19 ans, étudiante à l’Université de Nottingham, explique avoir eu un “black-out” de sa soirée, et ne pas avoir senti si une aiguille l’a piquée.
Chargement du twitt...
Des témoignages que la police prend au sérieux : la police de Nottingham a reçu 15 signalements depuis début septembre sur des cas de drogue impliquant des piqûres, dont une écrasante majorité de victimes sont des femmes.
Obliger le gouvernement à s’emparer du sujet
Le chef adjoint de la police du Lincolnshire, Jason Harwin, a déclaré les rapports “très préoccupants” et a assuré que la police travaillait à “comprendre l’ampleur de cette délinquance”. Si les affaires de drogues dans les verres dans les lieux de fête sont assez connues, l’injection de drogues par seringues sur des victimes divise de nombreux médecins. Ainsi, Adam Winstock, psychiatre et spécialiste des addictions, explique chez Vice qu’“il existe très peu de drogues facilement accessibles qui pourraient être administrées par voie intramusculaire dans un volume suffisamment petit pour que les gens ne le remarquent pas et dont les effets mettraient un certain temps à se manifester. Ce que vous voyez dans les films n’est pas la réalité”.
Si les opinions sont partagées à ce sujet, le Dr Veena Babu, médecin généraliste basée à Londres, estime que “s’il y a des femmes qui signalent que cela s’est produit, ou qu’elles ont eu des vertiges et qu’elles se sont effondrées et ont remarqué des ecchymoses, nous devons respecter ce qu’elles disent”. “Si quelqu’un a accès à des aiguilles et des seringues et peut entrer dans un club, je ne vois pas pourquoi il ne pourrait pas toucher ou blesser quelqu’un de cette manière”, a-t-elle ajouté, remarquant que des injections réalisées dans la cuisse ou le haut du bras peuvent être plus difficiles à ressentir, et dont les effets peuvent prendre plus de temps à se manifester.
Désormais, les militantes du mouvement “Girls Night In” espèrent un geste des autorités et du gouvernement britannique : elles demandent notamment davantage de contrôles et de fouilles à l’entrée des lieux de fêtes, ainsi que des systèmes pour protéger les verres.
Chargement du twitt...
Pour certaines militantes, ce n’est pas suffisant : en boycottant les lieux de fêtes, les femmes laissent la place aux hommes dans l’espace public. Ce serait toujours aux victimes de ces agressions de se protéger et de s’adapter, et non aux agresseurs.
De nombreuses pétitions ont vu le jour en ligne, dont celle de Victoria Parrott, qui dépasse les 13 000 signatures. Au Royaume-Uni, en adressant une pétition au Parlement, si elle dépasse les 10 000 signatures, le gouvernement doit y répondre sous 9 jours. Si elle dépasse les 100 000 signatures, la pétition se verra être débattue au Parlement.