Ce témoignage a été écrit dans le cadre d’ateliers menés par les journalistes de la ZEP (la Zone d’Expression Prioritaire), un média qui accompagne des jeunes à l’écriture pour qu’ils et elles racontent leurs réalités quotidiennes.
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Par fascination pour l’érotisme, le risque et l’inconnu, par goût d’appartenir aux minorités polémiques, par appréciation de l’arôme qu’a l’argent facile, j’ai choisi Lucius comme blaze d’escort boy. J’ai fait ça pendant trois ans. À cette époque, je le voyais aussi comme un rite de passage à l’âge adulte, tout en brisant un tabou et un interdit, en devenant un adulte exceptionnel en quelque sorte. J’avais la liberté de pouvoir me réinventer, notamment en me créant un personnage.
C’était le côté rock’n’roll qui me plaisait beaucoup dans ce milieu et avoir de la thune de manière aussi simple ne me laissait évidemment pas de marbre. En plus de l’argent échangé contre mes services et ma présence, certains clients me proposaient des repas à l’hôtel, des bouteilles de vin et de champagne, de la coke… La plupart du temps, les gens que je rencontrais étaient plutôt aisés sur le plan social et économique. Je voyais cela à la voiture qu’ils avaient, à leur niveau de langage, à leur train de vie.
Au début, je demandais 150 euros de l’heure. Puis, à peu près un mois après avoir commencé, j’ai demandé 200 euros. Cela signifiait passer une heure pour avoir des relations sexuelles de plusieurs types, sachant que ma clientèle savait ce que j’acceptais ou pas. C’était écrit sur mon profil. Selon les personnes, je pouvais être payé entre 1 000 et 1 500 euros pour tout un week-end. Une fois, un client m’a donné 2 100 euros pour un vendredi soir et la journée de samedi. Cela a été la fois où on m’a payé le plus.
TDS, travailleur dans le social
Généralement, sur une heure, il y avait 15 minutes de présentation et de discussion, souvent autour d’un verre. Puis 5 à 10 minutes à la fin. La relation sexuelle, elle, durait entre 30 et 45 minutes. La majeure partie des demandes pour me rencontrer étaient faites par des hommes hétéro de plus de 40 ans, mariés, divorcés ou célibataires. J’ai surtout pu remarquer à quel point la plupart de ces hommes se sentaient bridés dans leur goût des autres hommes, au sein de cette société hétéropatriarcale.
J’ai aussi eu des femmes entre 40 et 50 ans. Je n’ai jamais su si une de ces femmes commettait “l’adultère” avec moi, contrairement aux hommes, pour qui j’étais au courant. Ils se confiaient plus à moi que les femmes.
Lors des discussions que j’avais avec eux, ils me confiaient souvent à quel point ils ne trouvaient personne pour parler de leurs désirs, comment ils faisaient semblant auprès des autres. Beaucoup d’hommes préféraient apparaître dans une relation hétéro pour ne pas nuire à leur réputation, surtout à cause du regard de leur famille.
Je voyais que je rendais service à la société. J’empêchais des frustrations de s’exacerber. Le côté psychologique et social me plaisait beaucoup. Je me sentais d’une véritable utilité pour certaines personnes en manque de reconnaissance pour leurs désirs. Je suis assez fier d’avoir rendu service à des personnes qui ne pouvaient pas pleinement vivre leur sexualité.
Maximilien, 24 ans, Brest