Zoë Kravitz est la nouvelle Catwoman de Gotham City et elle aimante les spectateurs de The Batman, en salles actuellement. Rien de très surprenant pour cette descendante d’une grande lignée de super-héros : Aquaman est son beau-père, May Parker, alias tante May, est sa marraine et elle a fréquenté Flash et Magneto. Elle a déjà prêté ses traits à Angel Salvadore dans X-Men : Le Commencement, et sa voix à Mary Jane dans Spider-Man: Into the Spider-Verse ainsi qu’à Catwoman – déjà – dans The Lego Batman Movie. Du sang de super-héroïne coule donc dans les veines de Zoë Kravitz.
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La reconnaissance par les séries
Ce pedigree n’a pas suffi à faire des miracles et, depuis quinze ans, l’actrice peine à exister sur le devant de la scène hollywoodienne, bien que son nom soit régulièrement apposé à de grosses franchises. Dans la machine cinématographique, elle a souvent été limitée à des rôles pauvrement écrits, en side kick dans la franchise Divergente ou en personnage secondaire dans la saga Les Animaux fantastiques. Elle avait également déjà tenté sa chance à Gotham, mais s’était vu refuser un rôle dans The Dark Knight Rises de Christopher Nolan, jugée trop “urbaine”.
En 2015, elle parviendra à marquer les esprits en interprète de Toast, l’une des cinq épouses d’Immortan Joe, vengeresse en fuite dans le désert du quatrième opus des aventures de Mad Max, Fury Road. La même année, elle sera également Nakia, le love interest du héros dans le coolissime Dope, aux côtés de seconds rôles presque aussi stylés qu’elle (coucou A$AP Rocky).
(© Sony Pictures Releasing GmbH)
Si, longtemps, le cinéma n’a pas su lui offrir des rôles à la hauteur de son charisme, le monde des séries a su capitaliser avant tout le monde sur Zoë Kravitz, dès 2011, en lui faisant incarner Pearl dans la saison 4 de Californication. En 2017, surtout, elle décroche le rôle de Bonnie dans la série événement du regretté Jean-Marc Vallée, Big Little Lies, où elle retrouvera sa partenaire de Divergente Shailene Woodley.
Face à quatre géantes d’Hollywood – Reese Witherspoon, Laura Dern, Nicole Kidman et Meryl Streep –, son personnage sera d’abord en retrait, plus sombre et énigmatique, mais elle sera aussi plus douce et mélancolique que ses voisines de Monterey. Pourtant, dès la fin de la saison 1, elle commettra le geste qui fera d’elle la véritable héroïne de la série.
(© HBO)
Ce n’est qu’en 2020 que Zoë Kravitz décrochera son véritable premier rôle principal, taillé sur-mesure pour elle, dans le reboot sériel de High Fidelity, tiré du long-métrage éponyme de Stephen Frears, lui-même inspiré du roman de Nick Hornby. Dans ce remake moderne au féminin, l’actrice reprenait le rôle culte de John Cusack et enfilait les vêtements grunge de Rob, la propriétaire désabusée d’un magasin de vinyles de Brooklyn qui tente de se remettre de sa dernière rupture en entamant un voyage introspectif dans son passé amoureux.
Dans la droite lignée de dramédies comme Insecure ou Master of None, Zoë Kravitz y trouvait enfin un rôle à sa mesure, en anti-héroïne dépressive ambiance Fleabag. Malheureusement, Hulu annulera High Fidelity dès la première saison, laissant un goût amer à son interprète principale.
Dans la cour des grands
Mais l’actrice retombera rapidement sur ses pattes, et mieux encore, en décrochant le rôle hautement courtisé de Catwoman dans le très attendu The Batman de Matt Reeves. L’alchimie avec Robert Pattinson est au rendez-vous et son interprétation de Selina Kyle est à la hauteur des lourdes attentes qui pesaient sur les épaules de toute l’équipe du film. Désormais, Kravitz joue dans la cour des grands et elle a donc décidé que c’était le moment pour elle de tenter sa chance de l’autre côté de la caméra.
Pour ce coup d’essai intitulé Pussy Island, aux contours encore assez mystérieux, l’aspirante réalisatrice a fait appel à Channing Tatum et Naomi Ackie et a imaginé une histoire empreinte de féminisme, celle d’une jeune serveuse qui courtise un richissime philanthrope magnat de la technologie. Elle réussira à s’introduire dans son monde faussement idyllique, entre soirées sur une île privée et litres de champagne, mais ne tardera pas à découvrir la face obscure de celui sur lequel elle a jeté son dévolu.
Si tous les regards sont, à juste titre, rivés sur sa mue en Catwoman très convaincante, Zoë Kravitz tient en ce moment même le haut de l’affiche d’un autre projet plus discret, pourtant réalisé par le grand et prolifique Steven Soderbergh, célèbre réalisateur des Ocean’s, Contagion ou encore Sexe, mensonges et vidéos, qui signe son troisième film en quinze mois, disponible aux États-Unis.
Dans une proposition aux antipodes de la Selina féline et badass, elle est ici Angela Davis, une employée de la tech traumatisée par la pandémie de Covid-19 et une agression dont on ignore tout. Chargée d’analyser les tickets d’erreur d’un assistant vocal prénommé KIMI, une version plus aboutie de Siri, pour en fluidifier les rapports avec ses utilisateurs, elle va être le témoin auditif d’un violent homicide. Pour rapporter ce crime, elle va être obligée de sortir de chez elle.
Dans KIMI, Zoë Kravitz est presque seule-en-scène et tient de bout en bout cet excellent thriller efficace, en phase avec l’époque. D’abord recluse dans son spacieux loft de Seattle, agoraphobique et toquée, elle se soumet à une hygiène de vie stricte tout en avalant des boîtes d’anxiolytiques. Elle parle à sa mère sur FaceTime, à sa psy sur Skype et fait du chantage à son dentiste pour qu’il lui prescrive des antibiotiques à distance. Sauvage et agressive, elle ne tolère aucun échange avec le monde extérieur s’il ne se passe pas par écran interposé.
Dans une seconde partie, le film se déploie comme un véritable thriller technologique lorsque Angela doit affronter la ville pour remettre en main propre les fichiers audio compromettants. Soudainement vulnérable, elle prend des allures de petit Sim à perruque bleue déambulant à toute vitesse dans les rues de Seattle, comme un point sur le plan d’un téléphone traqué. C’est avec ce personnage inquiétant, dissimulé sous une couche de vêtements colorés, que Zoë Kravitz ajoute de nouvelles teintes à sa palette d’actrice désormais estimée à sa juste valeur.