NextGen, c’est le format audio 100 % rap français et découverte de Konbini : on invite un DJ, producteur ou beatmaker pour qu’il nous présente sa vision de la nouvelle génération du rap francophone à travers un mix d’une heure.
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Dans ce onzième épisode, en collab avec le collectif 69 Degrés, c’est Darlean de Daradio qui nous partage sa vision du game.
Konbini | Salut, Darlean, pourrais-tu te présenter pour nos lecteurs ?
Darlean | Salut ! Alors moi, c’est Darlean, je suis autrice, interprète et DJ originaire de Toulouse résidant actuellement à Paris. Créatrice et curatrice de Daradio, mon souhait était de mettre en avant les DJ, de les crédibiliser, de les booker, puis, à l’avenir, de mettre en avant la scène émergente en général. J’ai travaillé pendant plus de deux ans hebdomadairement pour des radios française et anglaise (HHLS Radio et Plus 1 Radio), en tant que résidente et curatrice pour des shows qui, justement, visaient à représenter l’émergence dans le rap. Mes DJ shows varient entre trap, drill, jersey, dru & bass, R’n’B, afrobeat, amapiano, baile funk, et house.
J’ai notamment produit deux EP, intitulés DAR et 2023, sortis en 2020 et 2021, qui contiennent des sonorités trap, néo-R’n’B et pop expérimentale, disponibles sur toutes les plateformes de streaming. Je suis en préparation de mon prochain projet qui alliera trap, R’n’B, jersey et baile funk.
C’est quoi, pour toi, la définition de la nouvelle génération rap français ?
La next gen, pour moi, c’est la puissance musicale d’aujourd’hui. Ce sont les artistes qui ont la rage d’ouvrir les esprits, de casser les codes. Ils renient les cases, les diktats que l’on a pu avoir par le passé. C’est leur moment pour faire de grandes choses, et il faut foncer droit devant sans regarder en arrière, car ils sont déjà en train de prendre une place énorme sur la scène hip-hop française, mais pas que.
Je trouve que le rap de la nouvelle génération s’étend vers de nouveaux horizons qui sont vraiment significatifs : la drill, la plug, la jersey, la drum & bass, la jungle, la pop, l’hyperpop, l’hypertrap, le shatta, le bouyon, la pop-rock, le rock, la house, l’afro, l’amapiano, l’électro ou même encore la techno, avec des flows toujours plus chantés, autotunés, presque électroniques, sans négliger les voix rappées telles qu’on les connaît. Ce mouvement vient de nulle part et partout à la fois, que ce soit en termes d’inspirations ou géographiquement. Il puise dans tout ce qu’il trouve, tout ce qu’il aime, sans se poser de questions.
On note une alliance entre les rappeurs et le monde de la nuit, surtout sur Paris. La nouvelle génération a faim. Elle veut faire connaître son univers, faire danser, ramener une énergie nouvelle, faire d’un concert une soirée club… et il est important de s’en rendre compte maintenant, avant que ce système soit le seul qui existe car c’est vers ça que l’on se dirige !
Quand on me parle de nouvelle génération qui brise les codes, je pense instinctivement au son “Offline!” de 1863, Snorunt et Dj33needler.
Quels sont, pour toi, les trois rappeurs ambassadeurs de la nouvelle génération que tu as mis dans ton mix et pourquoi ?
Pour moi, le premier artiste ambassadeur de la nouvelle génération, c’est Wit. C’est un rappeur et producteur originaire de Montpellier, qui travaille beaucoup avec Laylow et TBMA. Wit est sur nos ondes depuis 2017 et n’a cessé de me surprendre avec des lyrics hyper-deep, des flows innovants, des productions aussi bien traps qu’électroniques, des visuels de TBMA hyper-travaillés en termes d’effets spéciaux futuristes. Il démocratise de nouvelles textures sonores au point d’inspirer des jeunes beatmakers tels que Daigo, Zoran, et la GVO (anciennement Digitalwav). Il t’emmène dans son univers qui est toujours relatif à un mood différent et excelle un peu plus au fur et à mesure des projets.
Wit est pour moi un ambassadeur de la next gen depuis plus de cinq ans, et on espère une ascension fulgurante ces prochaines années. Mon son préféré de Wit est “Sèche tes larmes” qui est autoproduit. Vous pourrez aussi trouver “Dahlia” dans mon mix, qui est pour moi le son qui l’a fait connaître par un public plus large.
Le deuxième artiste que j’ai choisi pour représenter ce mouvement est MadeInParis. MadeInParis est un rappeur, chanteur, compositeur, réalisateur et ingénieur du son originaire de Saint-Martin. Il a notamment été l’ingé son d’Aya Nakamura (c’est même lui qui a enregistré “Djadja”), d’Oboy ou encore de Lestin avec qui il fera des feats par la suite. J’aime beaucoup ce que fait MadeInParis car je trouve que c’est assez innovant en termes de lyrics pour un rappeur français, il ose dire les choses vraies et crues, tandis que beaucoup d’autres artistes vont passer par des métaphores plus mignonnes pour parler des mêmes sujets. C’est ce qui a marqué son public parisien qui est très fidèle.
En termes d’univers, je trouve qu’il est aussi très varié, en partant d’une trap, pour aller vers de l’afro, du shatta, en passant par de l’amapiano ou même du R’n’B. De mon point de vue, c’est un artiste très complet dont vous n’allez pas arrêter d’entendre parler ces prochaines années. Dans mon mix vous pourrez trouver les sons “Nous”, “Préliminaires” et “Secret”.
Pour finir, le troisième artiste que j’ai choisi est Realo. Realo est un rappeur, producteur, ingénieur du son et réalisateur. Originaire du Sud-Ouest et ayant vécu à Toulouse, il m’était impossible de ne pas le mentionner. Il a commencé à mettre un pied dans la musique en mixant les sons de ses proches tels que Bitsu autour de 2017, pour ensuite sortir des projets à partir de 2021, et marquer un tournant sonore dans le rap. Il a clairement contribué à l’importation de l’hyperpop en France.
C’est en 2022 qu’il va connaître une ascension fulgurante en collaborant avec le duo de beatmakers Koboi, aussi avec des visuels hyper-singuliers et irréels, comme le clip de “C ma shit pt. 2” qui a tourné dans la France entière, au point de remplir la Cigale il y a quelques mois. Le son que j’ai choisi dans mon mix pour le représenter est “Replay”, en feat avec Zoomy, produit par Abel31.
Quels sont pour toi les trois producteurs ambassadeurs de la nouvelle génération que tu as mis dans ton mix et pourquoi ?
En ce qui concerne les producteurs, la première personne à laquelle je pense, c’est Draco dans ta Face. Draco aka Draco dans ta Face est un producteur (multiplatinum producer même !), ingénieur du son, violoniste, et DJ originaire de Paris. C’est à la base un producteur de trap influencé par le drip et la trap américaine de manière générale. Il a beaucoup collaboré avec Le Juiice, MadeInParis et Kerchak, mais aussi avec beaucoup d’autres comme Dinos, Lacrim, Kalash Criminel, Kaza, Enfantdepauvres, Caballero et Jeanjass…
Il a récemment connu un gros succès avec ses prods jersey drill, et ses edits incroyables. Il travaille très souvent avec son binôme et associé en production (avec qui il partage son studio): Finvy, compositeur multiplatine aussi, avec lequel il partage la plupart de ses crédits. J’aime beaucoup la manière qu’il a de vouloir expérimenter tout style de musique avec n’importe quel artiste. Il ne se pose aucune limite : à l’image de la next gen, il ne va pas se gêner pour faire faire du bouyon à Kerchak ou du shatta à MadeInParis et les sons sont toujours incroyables à la fin. Vous pourrez, dans mon mix, trouver Draco sur les morceaux “Secret” et “Préliminaires” de MadeInParis (en collaboration avec Finvy).
Le deuxième compositeur que j’ai choisi est Izen. Izen aka Izenberg est un producteur, ingénieur du son, DJ, DA, monteur vidéo et photographe originaire de Lyon.
Il est apparu sur nos plateformes à partir de 2016/17 sur pas mal de projets tels que celui de Rive Magenta, Francis Trash, 6ix, ou même encore Mazoo. Les années d’après, il enchaîne les DJ sets et les placements, puis crée son label indépendant, La Blue Room. Ceci lui permettra de sortir la mixtape Cloud 16 sur laquelle figurent des artistes émergents de Lyon comme Sali, Jäde, ou Marty de Lutece, pour ensuite sortir le projet Aggressive Distortion en 2020, puis un EP en commun avec Exoslayer que j’ai adoré.
À partir de 2021, Izen va se focus à 100 % dans le développement de la carrière de Lazuli, une étoile montante, un vent de fraîcheur dont on avait besoin en France. Il sera chargé de la direction artistique, signera la majorité des productions de ses projets et la suivra lors de sa tournée francophone en tant que DJ.
Personnellement, j’ai découvert Izen autour de 2021, il excelle dans énormément de styles de musiques différents, mais ses prods baile funk restent mes préférées.
Vous pourrez trouver Izen dans mon mix sur le sons “Vision nocturne” en collaboration avec Exoslayer.
Le dernier beatmaker que j’aimerais présenter est Jeez Suave. Jeez est un producteur et manager originaire d’une petite ville à côté de Rennes.
En 2016, lorsqu’il apprend à faire des prods, sa musique est essentiellement trap, inspirée des artistes de la East Coast tels que Metro Boomin, Young Thug, Future… Puis, avec le temps, il s’est rendu compte qu’il voulait que sa musique ait un rôle : transmettre une émotion, un mood, un moment de vie.
Il est très curieux musicalement et s’inspire de son environnement, il peut très bien partir sur du Shatta, du Bouyon, de l’Amapiano, de l’Hyper trap, Hyper pop.. Mais ce que j’ai préféré personnellement chez Jeez, c’est son côté Drum&Bass.
En effet, la Drum&Bass et la Jersey sont très à la mode en ce moment, et sa facilité à en faire pour des artistes comme Théodora, ou encore Baeredith va le faire connaître d’un plus large public, notamment avec le son de Théodora, sa sœur, “Le Paradis se trouve dans le 93”, qui a convaincu la scène parisienne, et même française. Aujourd’hui, à 23 ans, il est disque de platine en Italie, manager de plusieurs artistes dont sa sœur et continue de nous surprendre.
Vous pourrez trouver Jeez dans “La Paradis se trouve dans le 93” de Théodora.
Le mix NextGen de Darlean s’écoute juste ci-dessous, mais également sur Apple Podcasts ou Deezer. Abonnez-vous pour ne rater aucun épisode !