Dans WARM UP, on réalise un focus sur un artiste dont vous allez (sûrement) entendre parler dans les mois à venir. Aujourd’hui, place aux Français du groupe .dxf, dont le premier single vient tout juste d’être dévoilé.
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Né à l’été 2016 de l’union entre les producteurs My Friend Is et Keight, .dxf façonne une musique poétique et vaporeuse, que le groupe qualifie lui-même de “negative folk”. Après une première collaboration sur le titre “Tumbling Waters”, sorti à l’automne dernier sur l’EP Contagious de Keight, les comparses ont choisi de s’unir pour dévoiler leur tout premier single : “Efira”. L’occasion d’en savoir plus sur ce groupe mystérieux, qui promet de créer la “mélancolie de 2050”.
Pourquoi ce nom, “.dxf ” ?
Keight | En informatique, l’extension .dxf signifie “Drawing eXchange Format” ; c’est un type de fichier créé par AutoDesk qui a pour caractéristique d’être lisible par tous les software de DAO (Dessin Assisté par Ordinateur). On a trouvé que l’essence même de cette extension représentait bien notre processus de création, à tous les niveaux. La majorité de nos morceaux sont faits indépendamment les uns des autres ; c’est un échange constant. On se voit IRL, mais nos créations se font via Internet, chacun dans sa chambre, se balançant respectivement la balle jusqu’à avoir un produit qu’on considère achevé.
Qu’est-ce que vous écoutiez quand vous étiez plus jeunes ?
My Friend Is | Notre background est assez éclectique. Jazz, folk, punk, blues, metal… tout y est passé. Ce sont des influences qu’on a digérées au fur et à mesure des années et qu’on essaie de distiller dans le son .dxf.
Keight | De mon côté, je n‘écoutais pas trop de musique, et quand je le faisais, j’écoutais ce que mon frère écoutait. Il dansait beaucoup à l’époque, du coup j’écoutais beaucoup de beatmaking et de morceaux créés pour le lock, le pop, le break… Arrivé au lycée, je me suis pris la vague Ed Banger de pleine face, avec Justice notamment. À partir de là, j’ai commencé à digger et à chercher ce que j’aimais vraiment.
Comment décririez-vous votre musique ?
My Friend Is | On fait de la “negative folk” : une réinterprétation de ce qu’est ou sera fondamentalement la musique folk d’aujourd’hui et de demain. Nos thématiques sont folk. On retrouve la nostalgie, la mélancolie… C’est une lecture poétique et inspirante des maux de la life, en gros. […]
On expose cette folk à une lecture négative en se branchant avec des producteurs urbains comme Keight, dans le sens où on implante des musiques mélodiques et organiques dont les thématiques tournent autour de la mélancolie, dans un écosystème sonore urbain, froid et bétonné. On utilise cette métaphore photographique pour dire qu’on ne fait pas de la folk dans la forêt en fait.
Qui sont les artistes qui vous inspirent le plus en ce moment ?
Keight | En ce moment, je suis à fond sur un gars qui s’appelle MTS (Mitus), qui a notamment produit “FML” sur The Life of Pablo. Il a sorti deux morceaux récemment qui tuent, dont “Gods of the City”. À part ça, je puise surtout l’inspiration dans mon entourage, avec des gens comme EDWOO, Shkyd, jäde, mes potos de la Red Bull Music Academy…
My Friend Is | Il y a Shkyd évidemment, et le reste des artistes qui essaient de faire bouger les choses ou de mettre les gens en PLS : Death Grips, Bones et TeamSesh, BadBadNotGood, Lil Peep, Drip-133… La folk reste évidemment très présente dans nos inspirations, via des gens comme Bon Iver, Grizzly Bear ou Sufjan Stevens. Mais on challenge toujours ces inspirations avec des références plus urbaines et dans l’air du temps, comme Migos ou Post Malone.
Vous expliquez que votre musique donne un aperçu de ce à quoi pourrait ressembler “la mélancolie de 2050″… Êtes-vous vous-mêmes mélancoliques ?
Keight | Beaucoup trop. Ça fait un an et demi environ que j’ai arrêté mes études et que je passe la majorité de ma vie en studio, ce qui peut être très aliénant parfois.
My Friend Is | C’est doux la mélancolie. Mais pas parce qu’on est des sad boys boring. Simplement parce que la création musicale est cathartique, et permet de créer une lecture plus poétique du monde qui nous entoure. On peut être très actif et ouvert, tout en étant mélancolique. Tout changement est source de mélancolie.
Que raconte “Efira”, votre premier single?
My Friend Is | Efira (ou “Ephyra”) est l’ancien nom donné à la ville de Corinthe en Grèce, ville antique dont Sisyphe était le roi. Ce son parle donc de Sisyphe et de ce qu’il représente : le soleil qui s’élève chaque jour pour plonger à nouveau le soir sous l’horizon. En gros, c’est un regard sur la vie elle-même, et l’histoire d’un homme condamné à s’abrutir en roulant un gros caillou éternellement.
Pour illustrer ce titre, vous avez créé un clip grâce à un tout nouveau logiciel de graphisme 3D développé par Google, Tilt Brush. Qu’est-ce qui vous plaît dans cette image très geek, très DIY ?
Keight | Avant d’être un clip, avant même qu’on se l’approprie, ça a été un jeu pour nous. Dans le clip, il n’y a que deux ou trois shots qu’on a gardés, mais on a un dossier rempli de créations résultant de trois nuits passées dans un casque VR HTC Vive, ensemble, dans notre zone. L’aspect ludique et amusant de l’expérience me plaît davantage que l’image qui en ressort. Quand je regarde le clip, ça me rappelle nos sessions de création et c’est cool.
My Friend Is | Le Tilt Brush s’est intégré dans notre pensée créative comme l’autotune sur les voix ou les 808 sur des guitares. On est tous des créateurs visuels à notre échelle, et on voulait voir comment nos sensibilités allaient s’imprimer sur ce medium du turfu.
Du coup, c’est quoi vos futurs projets ?
Keight | Aujourd’hui notre premier single sort, demain on fait la première partie de D.R.A.M au Badaboum à Paris, on travaille aussi sur un premier EP… Le projet, ce serait d’exprimer et de produire le plus de choses possibles avec .dxf. À côté de ça, on a nos aspirations et projets personnels, et pour ma part ce serait de revenir dans le rap en tant que producteur (et pourquoi pas passer derrière le micro sur quelques morceaux).
My Friend Is | On veut continuer de pousser ce concept .dxf encore plus loin, et continuer à définir notre vision sonore et visuelle. On continue de bosser en tant que My Friend Is sur différents projets. D’ici fin avril, on sera sur le premier album de notre frère Chef Scout, et on continue l’expérimentation sonore vers l’acid house en collaborant avec le soldat DJ Nasamann. Plein d’autres surprises sont dans les tuyaux.
En attendant, retrouvez .dxf sur la scène du Badaboum le vendredi 24 février, en première partie du rappeur D.R.A.M. Le single “Efira” est à écouter et à télécharger juste ici.