Il y a comme un sentiment d’incandescence, de désir, de passion, à la simple vue des œuvres de Clément Louis. Des tourbillons couleur pourpre, profonds, qui offrent à voir des imbroglios d’épidermes, des enlacements pulpeux, des distorsions de chairs : le corps, le corps, le corps. C’est une obsession chez ce jeune peintre parisien, obsession qui se voit projetée avec poésie sur des toiles peintes à l’huile et aujourd’hui exposées pour la première fois à Marseille, à la Double V Gallery, en équipe avec le curateur David Pons.
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Du nom de “Acts of Love”, ce premier solo show se compose majoritairement de portraits de personnes queers, ceux des proches de l’artiste, ou de personnalités fortes et militantes, actives sur les réseaux sociaux. À propos de ses muses, l’artiste nous confie : “Souvent elles s’imposent à moi à travers mes rencontres. Pour moi, ce sont des personnes inspirantes par leurs combats”.
“Je n’envisage pas de créer sans être dans l’action et de parler du présent”
En grossissant certains traits ou en tirant sur les ombres, Clément Louis traduit le corps à la fois en poésie et en drame. Une façon de faire refléter le jeu politique qui s’opère derrière chaque existence queer, dont la sienne : “Cette posture engagée reste ma définition actuelle de l’art et je n’envisage pas de créer sans être dans l’action et de parler du présent. Tout naturellement, il y a un côté politique qui s’impose dans le fait d’assumer et de revendiquer la célébration des corps queers. Ériger en icônes des drag-queens, des personnes trans ou des travailleur·se·s du sexe qui dérangent le débat public, cela pointe du doigt une partie cachée de notre société qui peine à avancer sur ces sujets”.
Dans son travail du nu et de la sensualité de la chair, Clément Louis a à cœur de permettre à ses modèles d’imposer leur récit, de crier : “Je suis là, regardez-moi, écoutez-moi.” Le tout à travers un regard, une moue, une posture, retranscrits avec grâce par les coups de pinceaux abstraits et libres de l’artiste. Le travail repose sur la capacité de l’autre à dépasser la sexualisation facile qu’induisent ces corps dénudés, pour déchiffrer les récits qui y sont creusés.
“Mes modèles se dénudent pour parler d’identité à travers nos chairs et nos corps.”
“Certain·e·s s’arrêteront sur leurs désirs, d’autres iront plus loin. Je n’ai pas envie de sexualiser mes modèles. Mes modèles se dénudent, au contraire, pour parler d’identité à travers nos chairs et nos corps. Mes modèles acceptent d’être peint·e·s pour partager une expérience intime avec le public et agir en tant que sujet, fixent et défient le regard de ‘l’autre’. L’état de nature des corps queers non normés est à voir et à intégrer pleinement dans nos paysages. Tout ça n’est qu’amour”, nous confie-t-il.
Sa technique de peinture à l’huile, guidée par des traits fluides et hypnotiques, laisse transparaître l’essence même de la communauté qu’il représente dans ses œuvres : en mouvance permanente, en perpétuelle réinvention. En mêlant les genres, Clément Louis donne corps à des textures et des effets exubérants qui happent l’œil, infusant un délicieux jeu de contrastes avec les postures dramatiques de ses modèles.
Les œuvres transcendent, voire obsèdent, qui oserait laisser traîner son œil assez longtemps sur telle courbe, tel détail. “L’idée du rouge est venue de mon propre désir de peindre […]. C’était un processus rapide, violent et passionnant. Le rouge, le pourpre, le rose, le fuchsia : tout ce camaïeu représente énormément d’idées complémentaires qui coïncident avec nos combats, la passion, la vie, l’amour, la violence. Je pense que j’ai peint toutes ces personnes avec mes tripes et leurs émotions en moi. C’est un acte d’amour.” “Acts of Love” est un hommage vibrant, à la fois intime et politique, à la communauté queer.
“Acts of Love”, une exposition de Clément Louis à découvrir jusqu’au 24 juin 2023 à la Double V Gallery de Marseille.