Cela fait un paquet de temps qu’elle est la risée des décisions politiques de ces dernières années. Lancée en 2010 par Nicolas Sarkozy, la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi) devait être le rempart contre le téléchargement en ligne. Surprise : ça n’a pas (du tout) été le cas.
À voir aussi sur Konbini
Pour rappel, il fallait avoir reçu un avertissement, continuer à télécharger, se prendre un deuxième avertissement et continuer à télécharger des contenus pour qu’une amende tombe. Tout en sachant qu’Hadopi ne prenait en compte que le téléchargement dit en P2P, comprendre par torrent et non en téléchargement direct ou en streaming – et encore, il ne surveille pas tous les fichiers torrent qui circulent sur Internet… Bref, en termes d’outil, on a connu plus efficace.
C’est d’ailleurs une critique qui a souvent été formulée : une réglementation trop lente, pas assez conséquente, pas à même de lutter contre le téléchargement, et qui coûtait trop cher. Pour ce dernier point, nous n’avions pas toujours les chiffres les plus précis, mais c’est désormais le cas. Next INpact dévoile que le rapport d’Hadopi de 2019 appuie ce dernier argument, et c’est assez vertigineux. Pour faire simple : Hadopi a coûté 1 000 fois plus à l’État qu’elle ne lui a rapporté d’argent.
En dix ans, elle a engrangé 87 000 euros en amendes. Sachant qu’il n’y a eu jusque-là aucune amende à 1 500 euros (le montant maximum), mais plutôt des amendes à 300 euros, cela fait assez peu de réprimandes. En somme, le but d’Hadopi était d’inciter les internautes à ne plus télécharger et non pas d’être rentable. Donc ça peut ne pas être bien grave.
Sauf qu’à côté de cela, et ce sans même prendre en compte l’efficacité du process ou non, on se rend compte qu’elle a coûté 82 millions d’euros au ministère de la Culture. Un euro gagné pour 942 de dépensés. Ou, si vous voulez un autre chiffre : ces 87 000 euros représentent quatre jours du budget pour faire vivre Hadopi – qui, elle, existe depuis 4 000 jours.
Encore une fois, le but n’était pas de faire nécessairement rentrer de l’argent dans les caisses de l’État, mais d’arrêter les pratiques de téléchargement. La Hadopi se dit fière d’avoir envoyé 13 millions d’avertissements, et souvent sans qu’un deuxième ne soit nécessaire — comprendre que la récidive était quasi nulle, et que la menace fonctionnait.
Mais c’est ne pas prendre en compte l’évolution de la consommation des médias à l’ère des plateformes de streaming. Car le nombre d’abonnés à des services de streaming légaux, type Netflix, OCS, Amazon Prime et autres, a explosé en France ces dernières années, amenant sans doute à une baisse du nombre de foyers téléchargeant de manière illégale des contenus audiovisuels. Et ce n’est pas forcément la peur d’Hadopi qui a poussé les foyers à s’abonner à ces services.
Une efficacité toute relative, donc.