Non, le cinéma n’est pas mort, mais les films de plus de trois heures sont potentiellement en train de le tuer. C’est en tout cas ce que suggère la réalisatrice Céline Sciamma lors d’un entretien accordé au média El Español dans le cadre du festival espagnol LesGaiCineMad, qui est le Festival international de cinéma LGBTQIA+ de Madrid, et durant lequel elle a été récompensée du Prix d’honneur.
À voir aussi sur Konbini
Interrogée sur l’aspect capitaliste de l’industrie du cinéma, la réalisatrice de Portrait de la jeune fille en feu et du sublime Petite maman n’a pas mâché ses mots, tout en rappelant que si certaines sphères cinématographiques meurent, d’autres n’arrêtent pas de s’enrichir.
“Vous savez, ils disent que ‘le cinéma est en train de mourir’. C’est le seul art dont ils disent toujours qu’il ‘meurt’, mais ce n’est pas tout à fait vrai, parce qu’il y a plein de films qui rapportent beaucoup d’argent.”
Plus loin, elle donne un avis tranché sur la question des films de près de trois heures ou plus, qui se sont multipliés cette année et l’année précédente avec des succès comme Oppenheimer, Killers of the Flower Moon, Beau Is Afraid, The Batman, Avatar : La voie de l’eau ou encore Babylon. Selon Céline Sciamma, ces films longs de plus de trois heures ne sont pas bénéfiques pour le cinéma, et s’apparentent même à du militantisme égoïste.
“Il y a aussi des films très longs qui ont le monopole des écrans de cinéma. Je fais des films courts parce que j’essaie de faire de la place aux autres. Faire un film de trois heures signifie que les cinémas ne pourront programmer que trois séances de votre film par jour. Si vous faites un film de trois heures, vous militez pour vous, pas pour le cinéma.”
Ailleurs dans l’interview, la réalisatrice française s’exprime sur son attrait pour TikTok, dont elle salue l’effervescence de créativité, mais aussi l’accessibilité qu’elle lie même à l’essor du cinéma féministe :
“J’ai plus ri sur TikTok qu’au théâtre ces dernières années.”
Finalement, Céline Sciamma s’explique sur son choix de présenter à Venise, en septembre dernier, son court-métrage This Is How a Child Becomes a Poet, réalisé en hommage à la poétesse italienne Patrizia Cavalli, et ce, après avoir déclaré ne plus soumettre ses films aux festivals de cinéma, qu’elle décrit “sans joie et spéculatifs”.
“Je décide très librement, parce que le fait de produire [ce court-métrage] moi-même et de n’avoir personne à qui rendre de comptes, c’est une expérience formidable et très vintage. J’ai l’impression d’être Alice Guy, de me promener avec mon film sous le bras. Cependant, maintenant que j’ai vu les réactions que le film suscite, j’ai le sentiment qu’il devrait être accessible à tout le monde, mais j’avance pas à pas.”