Chaque mois, nous passons en revue les événements artistiques de notre beau pays, la France, afin de vous proposer la crème de la crème des expositions. Au programme : se balader dans les grands drapés de Katharina Grosse, contempler les premières peintures sages de Jackson Pollock, se perdre dans le monde si cosy d’Harriet Backer, passer des heures devant les installations textiles d’Olga de Amaral et un peu de photo de mode.
À voir aussi sur Konbini
“Jackson Pollock. Les premières années (1934-1947)”, au musée Picasso, à Paris
“L’exposition revient sur les débuts de la carrière de Jackson Pollock (1912-1956) marqués par l’influence du régionalisme et des muralistes mexicains, jusqu’à ses premiers drippings de 1947. Ce corpus, peu exposé pour lui-même, témoigne des diverses sources qui nourrissent les recherches du jeune artiste, croisant à l’influence des arts natifs américains celle des avant-gardes européennes, au sein desquelles Pablo Picasso figure en bonne place. Comparé au peintre espagnol et aux grands noms de la peinture européenne par la critique, Pollock est, rapidement, érigé en véritable monument de la peinture américaine, et ce faisant, isolé des réseaux plus complexes d’échanges d’influences qui nourrissent son travail durant ses années new-yorkaises.
L’exposition ambitionne de présenter en détail ces années qui furent le laboratoire de son œuvre, en restituant le contexte artistique et intellectuel dont l’un et l’autre se sont nourris. L’exposition propose un parcours articulé autour de plusieurs moments forts du parcours artistique et intellectuel du jeune Pollock au cours de ces années d’expérimentation. En convoquant ponctuellement certaines figures clefs de son parcours artistique (Charles Pollock, William Baziotes, Lee Krasner, André Masson, Pablo Picasso, Janet Sobel…), l’exposition s’attache à souligner l’intensité et la singularité de son œuvre dans ses différentes dimensions (peinture et travail sur la matière, gravure, sculpture).”
Jackson Pollock, Mask, 1941. (© Pollock-Krasner Foundation/ADAGP, Paris 2024)
Jusqu’au 19 janvier 2025.
“Katharina Grosse. Déplacer les étoiles”, au Centre Pompidou-Metz
“Le Centre Pompidou-Metz accueille à l’été une exposition de l’artiste Katharina Grosse (née en Allemagne en 1961, vit et travaille à Berlin et en Nouvelle-Zélande) qui, depuis plus de trente ans, utilise la technique du vaporisateur pour créer des peintures monumentales immersives. Lors d’un séjour à Florence, Katharina Grosse découvre avec fascination à quel point les fresques de la Renaissance intègrent l’architecture environnante comme élément pictural. Dès lors, le travail de Katharina Grosse amorce un tournant tridimensionnel. Elle commence à concevoir ses œuvres in situ, prenant pleinement en considération le lieu d’exposition. L’artiste délaisse le châssis à la faveur du mur, sur lequel elle déploie directement ses couleurs chatoyantes, qui investissent jusqu’aux angles et saillies les lieux d’exposition.
C’est justement pour mieux étreindre l’architecture, la contredire aussi et créer d’étonnantes tensions, que l’artiste se tourne à nouveau vers la toile dans ses installations. Ses mises en scène sont animées d’une verve qui allie la puissance décomplexée de l’expressionnisme états-unien à la sensualité subtile des ‘corps spatiaux colorés’ (Farbraumkörper) du peintre Gotthard Graubner, qui a été son professeur à l’académie des beaux-arts de Düsseldorf. Katharina Grosse est invitée à habiter la Grande Nef, espace magistral s’élevant jusqu’à plus de vingt mètres, qui s’offre sans entrave, dénué de scénographie. À cette occasion, l’artiste souhaite faire évoluer une installation de grande envergure conçue initialement pour le centre d’art Carriageworks à Sydney. 8 250 mètres carrés de tissu suspendu au plafond par d’énormes nœuds formeront ainsi un nouvel espace à l’intérieur de la galerie, prenant la forme d’un immense drapé dont les couleurs et l’énergie exubérantes déborderont de l’espace de la Grande Nef pour se prolonger à l’extérieur, sur le parvis du Centre Pompidou-Metz.
L’exposition offre au public l’expérience de traverser littéralement un écran de la peinture. Des fentes permettent de pénétrer cet abri aux parois ondulantes, d’entrer en son cœur pour plonger dans la couleur et le mouvement. Des traînées de couleurs vives, exécutées avec une gestuelle véhémente, s’entrechoquent avec des halos vaporeux, laissant entrevoir çà et là, dans les plis du tissu, un blanc immaculé. L’effet de dépaysement de cette œuvre puissante et étonnante d’optimisme est saisissant. Elle se fait tour à tour cabane intimiste et décor de théâtre (la même Grande Nef a accueilli Parade, le rideau de scène de Picasso, en 2012), laissant le public s’essayer à la performance. Avec sa peinture, Katharina Grosse cherche à condenser les émotions et à provoquer une intense agitation : ‘De cette expérience positive ou négative, mon intention est que nous développions le désir d’initier un changement’.”
Jusqu’au 24 février 2025.
“Harriet Backer (1845-1932). La musique des couleurs” au musée d’Orsay, à Paris
“À une époque où les femmes n’étaient pas considérées en Norvège comme des citoyennes à part entière, Harriet Backer s’est hissée à la force du pinceau comme une figure importante de la scène artistique de son temps. Membre du conseil d’administration et du comité d’acquisition de la Galerie nationale de Norvège pendant vingt ans, elle ouvre au début des années 1890 une école de peinture où elle forme des artistes importants de la génération suivante, tel Nikolaï Astrup, Halfdan Egedius et Helga Ring Reusch. Elle est soutenue par le collectionneur Rasmus Meyer, également grand mécène d’Edvard Munch. Alors que la peinture de Backer a beaucoup évolué d’un point de vue stylistique au cours de sa longue carrière, elle est restée fidèle à un nombre resserré de sujets et sa pratique est toujours nourrie par l’étude sur le motif.
Après avoir évoqué la formation de l’artiste dans les grandes capitales culturelles de l’époque que sont notamment Munich et Paris, l’exposition présentera également le cercle des proches d’Harriet Backer, des artistes femmes scandinaves, également formées à travers l’Europe et qui partagent ses engagements féministes. Le parcours abordera ensuite les grands thèmes de prédilection de l’artiste : les intérieurs rustiques, les peintures d’églises traditionnelles norvégiennes, les paysages et son sens très particulier des natures mortes. L’exposition consacrera une large place aux représentations de scènes musicales. Il s’agit en effet d’une composante importante dans la vie de Backer, dont la sœur Agathe Backer Grondhal fut une musicienne renommée en Norvège, et un sujet central dans son œuvre où les vibrations de la touche rendent perceptibles les notes de musique.
Cette exposition, première rétrospective consacrée à cette artiste en France, rejoint un des axes majeurs de programmation du musée d’Orsay qui propose, en parallèle des présentations des figures les plus emblématiques, des découvertes des artistes moins célèbres mais essentiel·le·s pour comprendre les grandes évolutions de l’art de la seconde moitié du XIXe siècle. La Norvège fait l’objet d’une attention toute particulière en raison du dynamisme de sa scène artistique et des liens privilégiés que les artistes entretenaient avec les avant-gardes parisiennes.”
Jusqu’au 12 janvier 2025.
Le festival international de mode, de photographie et d’accessoires de Hyères, à la Villa Noailles
“Depuis 1986, le festival promeut et soutient la jeune création internationale de mode, depuis 1997 un concours est ouvert aux photographes émergent·e·s et depuis 2016, un concours distingue les nouveaux·elles créateur·rice·s d’accessoires de mode. Il est reconnu comme le plus ancien concours de mode destiné aux jeunes professionnel·le·s dans le monde. Plusieurs prix récompensent les créateur·rice·s en compétition grâce aux dotations des partenaires du festival qui s’engagent avec lui pour les accompagner dans la durée. Une aide pratique est apportée dès la sélection des candidat·e·s, puis pendant une période de deux ans couvrant de nombreux domaines : financement, production, artisanat, matériaux, édition, juridique, presse, exposition, atelier et résidence.”
Jusqu’au 12 janvier 2025.
“Olga de Amaral”, à la Fondation Cartier, à Paris
“La Fondation Cartier pour l’art contemporain présente la première grande rétrospective en Europe d’Olga de Amaral, figure incontournable de la scène artistique colombienne et du Fiber Art. L’exposition rassemble près de 80 œuvres créées entre les années 1960 et aujourd’hui, dont beaucoup n’ont jamais été présentées hors de Colombie. Outre les créations vibrantes à la feuille d’or qui ont fait la notoriété de l’artiste, l’exposition révèle ses toutes premières recherches et expérimentations textiles, ainsi que ses pièces monumentales.
Depuis les années 1960, Olga de Amaral repousse les limites du médium textile en multipliant les expériences sur les matières (lin, coton, crin de cheval, gesso, feuille d’or ou palladium) et les techniques : elle tisse, noue, tresse, entrelace les fils pour créer d’immenses œuvres tridimensionnelles. Inclassable, son art emprunte tant aux principes modernistes, qu’elle découvre à l’académie des arts de Cranbrook aux États-Unis, qu’aux traditions vernaculaires de son pays et à l’art précolombien. Après avoir présenté six œuvres de la série Brumas dans le cadre de l’exposition Géométries Sud en 2018, la Fondation Cartier retrace l’ensemble de la carrière d’Olga de Amaral et célèbre celle qui a marqué une véritable révolution dans l’art textile.”
Jusqu’au 16 mars 2025.