Les dix meilleurs samples de Donny Hathaway, génie de la soul, décédé il y a 40 ans

Les dix meilleurs samples de Donny Hathaway, génie de la soul, décédé il y a 40 ans

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LOS ANGELES, CA – SEPTEMBER 11: Musician Donny Hathaway sits at a piano on the stage of Royce Hall in UCLA with an empty audience during the rehearsal for Roberta Flack’s Musical TV Special “Killing Me Softly” on September 11, 1972 in Los Angeles, California (Photo by Stephen Verona/Getty Images)

Sample Story #34. Retour sur un héritage musical exceptionnel.

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(© Stephen Verona/Getty Images)

Entre 1970 et 1973, la légende de la soul music Donny Hathaway a donné le meilleur de sa musique. S’il est parvenu à revenir sur le devant de la scène en 1978, notamment grâce à son amie et chanteuse Roberta Flack, c’est cette première période de grande qualité qui sera la plus samplée par les beatmakers hip-hop. De Ghostface Killah à Chance the Rapper, de Dr. Dre à Madlib, voici en toute subjectivité les dix meilleurs samples de la musique de Donny Hathaway, décédé le 13 janvier 1979.

10. “Magnificent Sanctuary Band” (1971) – The Artifacts, “Whayback” (1994)

En 1994, le groupe The Artifacts avait comme mot d’ordre de rendre hommage, avec sa musique, aux deux autres piliers de la culture hip-hop, à savoir le graffiti et la danse. Sur leur premier album, Between a Rock and a Hard Place, ils se placent comme des fers de lance de l’Underground East Coast en usant de samples bien sentis. Ils se sont plusieurs fois attaqués à l’œuvre de Donny Hathaway, notamment au breakbeat, culte du début de “Magnificent Sanctuary Band”, sorti en 1971.

Les Beastie Boys, Diamond D, Supreme NTM ou encore Action Bronson ont rappé sur cette batterie. Sur le titre “Whayback”, elle est bouclée simplement, dans une instru ravageuse qui porte sans conteste l’influence de Pete Rock.

9. “Jaelous Guy” (1972) – Chance The Rapper, “Juice” (2013)

En concert, Donny Hathaway aimait reprendre la musique des Beatles, ou des titres solos des membres du groupe. Sur son album Live mythique sorti en 1972, il reprend “Yesterday”, et surtout “Jaelous Guy” de John Lennon.

Avec ce piano reprenant la mélodie principale et partant en vrille au début du morceau, il a offert au producteur Nate Fox une matière première idéale. La boucle est très peu modifiée, et servira de base à l’instru de “Juice” de Chance the Rapper, compris sur l’EP qui va faire exploser le rappeur de Chicago, Acid Rap.

8. “Bossa Nova” (1972) – 9th Wonder, “Queen Soul” (2009)

Le CV de 9 th Wonder fait rêver. Jay Z, De La Soul, Jean Grae, EPMD, Sean Price, Lloyd Banks, KRS-One ou encore Erykah Badu ne sont que la face visible du gigantesque iceberg que représente la liste de ses clients de renom. En 2009, le beatmaker sortait une compilation de beats qui traînait dans ses ordis, la série Lost Beats, en six volumes. Sur le dernier volet, une prod égarée samplant des violons lancinants, doux, et une rythmique brésilienne, est nommée “Queen Soul”.

Pour en trouver l’origine, il faut se pencher sur l’une des plus belles productions de Donny Hathaway : la bande originale du film Come Back, Charleston Blue, composée par l’immense Quincy Jones et sortie en 1972. Le sample se situe à la vingt-quatrième seconde du superbe morceau “Bossa Nova”.

7. “Valdez in the County” (1973) – Madlib, “Episode VIII” (2010)

La série de disques Medicine Show de Madlib est une mine d’or. Inégale, certes, mais une mine d’or quand même, au même titre que sa série Beat Konducta. En 2010, il en sort le cinquième volet, l’un des plus prisés, History of the Loop Digga, 1990-2000. Comme à son habitude, il va chercher des morceaux de tous horizons, pour les sampler en y restant très fidèle, à tel point que beaucoup de titres se classent plutôt dans la catégorie du remix que du sampling. C’est le cas pour son morceau “Episode VIII”.

C’est le titre de Donny Hathaway “Valdez in the County” qui est, cette fois, la victime. La rythmique et la mélodie de Fender Rhodes présentes à la trentième seconde du morceau sont ralenties, filtrées et dotées, comme c’est souvent le cas chez Madlib, d’une batterie très légèrement off-beat avec beaucoup d’écho. Le résultat est définitivement signé de la patte du producteur.

6. “Magnificent Sanctuary Band” (1971) – KMD, “808 Man” (1991)

On évoquait plus haut le breakbeat, le plus fameux de la discographie de Donny Hathaway, avec un exemple de boucle plutôt simple. Cependant, avec ce même motif de batterie sommaire, on peut faire des choses bien plus complexes.

Pour le prouver, il suffit d’écouter le titre “808 Man” de KMD. Il s’agit du premier groupe de MF Doom, qui, à l’époque, se faisait encore appeler Zev Lux V. La formation n’aura qu’une courte existence puisque, suite au décès de DJ Subroc (frère de MF Doom), les membres se séparent en 1994, le temps de sortir deux albums, dont le premier en 1991, Mr. Hood, sur lequel figure “808 Man”.

Ici, le breakbeat est totalement redécoupé, ses éléments les moins stricts rythmiquement, comme le charleston ouvert, sont mis en avant. Couplé à une autre batterie, il se transforme en beat savant, complexe, et extrêmement bien vu.

5. “I Believe to My Soul” (1970) – Nate Dogg, “I Got Love” (2001)

C’est peut-être le plus gros hit basé sur un sample de Donny Hathaway. En 2001, le producteur Bink devient l’un des plus prisés du game après son travail sur l’album The Blueprint de Jay Z. Il est alors appelé pour bosser sur le deuxième disque de Nate Dogg, Music and Me, et compose la prod du titre “I Got Love”.

C’est sur le premier album de Donny Hathaway, Everything Is Everything, qu’il trouve son bonheur, plus précisément sur le début du morceau “I Believe to My Soul”. Le riff de piano et de batterie, qui sert une mélodie de Rhodes Fender, est peu modifié, mais boosté par une basse supplémentaire et une batterie bien plus moderne. Après un travail de nettoyage du son et de légère découpe, Bink livre une instru complètement ancrée dans son époque, très West Coast, et surtout très successful.

4. “Vegetable Wagon” (1972) – Dr. Dre feat. RBX et Snoop Dogg, “Ra-Tat-Tat-Tat” (1992)

Dr. Dre n’est plus à présenter. Lorsqu’il s’échappe du groupe N.W.A., pour sortir son premier album solo The Chronic, classique parmi les classiques, il expérimente la technique du replay, consistant à sampler, certes, mais à rejouer l’extrait échantillonné pour avoir un son plus propre, mais aussi pour ne pas payer les droits masters de l’original.

Or, il y a aussi beaucoup de samples réalisés dans les règles de l’art sur ce disque. Comme sur le titre “Ra-Tat-Tat-Tat”, en featuring avec Snoop Dogg et RBX, où il utilise plusieurs sources sonores : la batterie de “Pot Belly” de Lou Donaldson, les éléments harmoniques “Brother’s Gonna Work It Out” de Willie Hutch, et une basse terrible.

Cette dernière provient du morceau “Vegetable Wagon” de Donny Hathaway, composé par Quincy Jones en 1972. Une ligne mélodique servie sur un plateau, lourde, que Dr. Dre sublime sans avoir à y changer grand-chose.

3. “She Is My Lady” (1971) – Ghostface Killah, “Ice” (Interlude, 2001)

Si vous ne savez pas à qui Action Bronson a piqué son flow, écoutez Ghostface Killah. En 2001, le rappeur prolifique du Wu-Tang sort son troisième effort solo, Bulletproof Wallets. Vers la fin de la tracklist, l’interlude “Ice”, produite par Rsonist, retentit.

Il y a ces cordes grandiloquentes, qui hantent toute la prod. Elles proviennent du titre “She Is My Lady” de Donny Hathaway, datant de 1971. En fait, Rsonist les accélère, en augmente la tonalité (les pitche, donc), et les mélange à d’autres cordes produites par un synthé, histoire d’accentuer les breaks. Le travail de production est savoureux, volumineux sans écraser le rap habité de Ghostface Killah. Ça valait bien la troisième marche du podium.

2. “We’re still Friends” (1972) – Ras Kass feat. RZA, “The End” (1998)

C’est peut-être le sample le moins reconnaissable de cette liste, et c’est ce qui en fait toute sa saveur. Alors qu’il vient de s’imposer comme l’un des boss de l’Underground avec son premier album, Ras Kass sort son second disque, Rasassination en 1998. La liste des producteurs qui le coachent est belle, et notamment composée par l’excellent Easy Mo Bee (2Pac, Notorious B.I.G., Big Daddy Kane, etc.). C’est lui qui se charge de l’instru du morceau de clôture de l’album, sobrement intitulé “The End”.

Pour cela, il va piocher dans le Live de Donny Hathaway. Au début de la piste, avant que le morceau “We’re Still Friends” (l’une des deux seules compositions du soulman comprises sur ce disque) ne démarre, Hathaway raconte une petite histoire au public en jouant quelques notes de Rhodes Fender. Easy Mo Bee les sample, et les intègre intelligemment à une instru aussi composée par un autre échantillon tiré de “Nighttime” d’Oliver Sain, principal motif mélodique du morceau. La science du mélange, la précision du mix, le groove… Tout y est.

1. “Tim’s High” (1972) – Pusha T, “I Am Forgiven” (2013)

Il a fallu plus d’un an entre l’annonce de la sortie de la seconde mixtape de Pusha T, Wrath of Caine, et sa parution finale en janvier 2013. Un an durant lequel une Dream Team de producteurs s’est affairée à faire de ce projet un tremplin définitif à la carrière du rappeur. Kanye West, Jake One, The Neptunes, Southside… et Bink, qui aime tant les samples de Donny Hathaway. Il s’occupe de la dernière instru de la mixtape, celle du morceau “I Am Forgiven”.

Pour la composer, il se tourne vers la bande originale du film Come Back, Charleston Blue réalisée par Quincy Jones, et décidément bien représentée dans cette liste. À 1 mn 01 du morceau “Tim’s High”, on entend la voix de Donny Hathaway s’élever dans les airs, et surtout des montées et descentes de harpe et de piano électrique, qui donnent à ce passage un aspect féerique.

La force de Bink, ici, est de parvenir à mettre en évidence ces montées, tout en ayant drastiquement augmenté la tonalité de l’extrait samplé. Extraire une voix sans que celle-ci n’empiète trop sur celle du rappeur est déjà une science en soi, parvenir à intégrer à l’ensemble ces motifs harmoniques de façon aussi juste relève de la prouesse. Et quel morceau…