Des femmes rebelles et pionnières mises à l’honneur dans une série colorée.
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Avec sa série 50 Rebel Women (“50 femmes rebelles”), Vix Harris a décidé de mettre en avant pendant un an des pionnières qui ont, chacune à leur manière, brisé le plafond de verre. Influencée par sa formation de designer textile, cette artiste d’origine britannique orne les portraits en noir et blanc de ces grandes femmes de mille et un motifs aux couleurs vives.
Aujourd’hui installée à Singapour, elle a vécu aux quatre coins du monde, et place le féminisme intersectionnel au cœur de sa démarche artistique. Elle explique choisir des femmes iconiques de différentes cultures “en fonction de leurs talents et de leur parcours de vie inspirants”, dont font partie, entre autres, la super-productrice Oprah Winfrey et la pop star Beyoncé Knowles.
Cheese a contacté Vix Harris pour discuter avec elle de son parcours artistique, de ses sources d’inspiration, de son univers et de l’importance du féminisme intersectionnel dans son travail.
Cheese | Comment t’es-tu découvert une passion pour l’art ?
Vix Harris | Ce n’était pas une découverte à proprement parler, mais plutôt quelque chose qui a toujours été en moi. Petite fille déjà, je dessinais, je peignais et je découpais du carton. Mes parents sont tous les deux artistes et mon père adore prendre des photos, j’ai donc baigné dans l’art dès mon plus jeune âge. Il ne m’est jamais venu à l’idée de faire autre chose.
Comment décrirais-tu ton travail ?
Mon travail étant lié à ce que je suis, il est difficile pour moi de le décrire avec précision. Mais j’ai conscience d’avoir été largement influencée par les pays que j’ai visités et les cultures que j’ai connues.
Je dessine beaucoup de motifs parce que j’ai étudié la création d’imprimés textiles pour la mode et la décoration d’intérieur aux Beaux-Arts. Mais aujourd’hui, mon travail se base essentiellement sur l’improvisation et la spontanéité. Quand je commence une œuvre, je démarre avec une petite partie directement au crayon et je vois comment le motif se développe. J’aime l’idée que chaque œuvre est une série de petites décisions.
Qu’est-ce qui t’as poussée à représenter des femmes ?
Je viens d’une famille de femmes (ma mère a deux sœurs et mon père en a trois), j’ai donc toujours été entourée de femmes fortes et indépendantes. Ma mère s’impliquait déjà dans le féminisme avant même que je ne sache ce que ce mot voulait dire, et elle m’a clairement donné l’exemple. Aujourd’hui, j’ai aussi quatre nièces, il est donc très important pour moi qu’elles voient des femmes de toutes les générations et de toutes les cultures qui prennent leurs propres décisions, et mènent une vie dont elles sont fières.
Pourquoi le féminisme intersectionnel est-il aussi important pour toi, en tant que femme et en tant qu’artiste ?
C’est une excellente question. J’ai passé mon enfance au Kenya et au Malawi où mes parents enseignaient l’anglais, et depuis vingt ans, je voyage partout dans le monde, et j’enseigne à des gens de toutes les cultures et de tous les milieux.
J’ai vécu dans des pays comme l’Indonésie, la Tanzanie, la Corée du Sud et le Viêt Nam. La plupart de mes étudiant·e·s étaient des femmes qui n’avaient pas accès aux privilèges et aux libertés auxquels ma nationalité britannique et ma famille m’ont donné droit.
Je ne pense pas qu’il soit possible de parcourir le monde en ignorant les inégalités et les injustices qui existent partout, particulièrement pour les femmes. Dans le féminisme, la notion d’intersectionnalité insiste sur le fait que différentes femmes connaissent différentes expériences en fonction de leur ethnie, du genre auquel elles s’identifient et de leur éducation.
En tant que féministe, on ne peut pas juste se concentrer sur les hétérosexuelles, parce que cela ne laisse aucune place à celles qui ont une expérience complètement différente de la vie. Nous avons beaucoup à apprendre de ces femmes, tellement que la seule chose à faire est de se taire et d’écouter.
En tant qu’artiste, le travail que je produis représente non seulement les choses dont la beauté me touche le plus, mais aussi les idées qui ont le plus d’importance pour moi. Il est essentiel que les femmes de tous les horizons soient représentées dans mon travail, à travers des symboles de leur culture et des traditions que je trouve fascinantes. Comme le disait Nina Simone : “On ne peut rien y faire. En ce qui me concerne, le devoir d’un artiste est de refléter son époque”.
Traduit de l’anglais par Sophie Janinet