Des sculptures et des peintures qui quittent leurs supports, s’animent et discutent une fois les portes du musée d’Orsay refermées : c’est ce qu’a imaginé l’auteur et dessinateur Christophe Chabouté dans son roman graphique, Musée, qui paraît aux éditions Vents d’Ouest. En 192 pages d’un ouvrage dessiné en noir et blanc, l’auteur propose une “déambulation au rythme lent”, de nuit, au musée d’Orsay.
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Une fois les visiteur·se·s parti·e·s, l’Olympia de Manet, qui passe sa vie allongée, déserte sa couche, Les Raboteurs de parquet de Gustave Caillebotte, fatigués, partent se dégourdir les jambes, tandis que la statue d’Héraklès d’Antoine Bourdelle se dirige vers les toilettes, dont il explore tous les aspects et accessoires sans les comprendre.
Berthe Morisot, amoureuse d’un promeneur de chiens, observe ce personnage tous les soirs à travers la fenêtre, tandis qu’une sculpture se dispute régulièrement avec une femme peinte par Modigliani, que d’autres personnages, amoureux, passent la nuit à discuter ou que l’ours blanc de François Pompon quitte sa pose pour aller dormir.
“Ça raconte simplement ce que les regardés disent des regardeurs, ce que les peintures et les sculptures racontent de ce qu’elles voient”, explique l’auteur à l’AFP. L’idée est née “devant les petites sculptures des parlementaires” du caricaturiste Honoré Daumier à Orsay, “que je n’avais jamais vues. J’ai eu l’impression qu’ils chuchotaient entre eux et racontaient des trucs chaque fois que je quittais la pièce”, raconte-t-il. “J’y suis retourné il y a quatre ou cinq ans et j’ai eu la même impression. Je suis reparti avec 3 000 photos, plein de croquis et j’ai commencé à écrire dans le train”, ajoute-t-il.
Temps distillé
L’ouvrage comprend peu de textes, ce qui est un peu la “marque de fabrique” de cet auteur prolifique qui a publié ses premières planches chez Vents d’Ouest dans Récits en 1993, un album collectif sur Rimbaud. “C’est l’intérêt de la bande dessinée, ce qu’on ne peut écrire, on peut le dessiner et je préfère raconter en images plutôt qu’en texte”, dit-il.
Cette fois, “j’ai plus eu envie de raconter des jolies choses plutôt que des accidents de la vie ou des problèmes”, ajoute-t-il, parlant d’un récit au thème “plus léger” que ceux abordés dans ses précédents ouvrages. Suivant le fil rouge qui traverse toute son œuvre, Christophe Chabouté essaie d’y mettre en avant “le quotidien, les petites choses, ce qui ne paraît pas important et qui l’est pourtant le plus, les petites choses qu’on ne regarde plus parce qu’on les a trop vues”, dit-il.
“On est saturés d’images qui vont vite, là, au contraire, c’est un temps distillé, un peu lent, dans lequel on se promène doucement”, ajoute cet admirateur du réalisateur Jacques Tati. La déambulation se poursuit de scène en scène, sans scène d’action. “Le seul personnage rapide est un chien qui court”, souligne l’auteur qui aimerait que son roman graphique incite son lectorat à se rendre au musée d’Orsay “pour écouter et sentir les œuvres” en “ouvrant” leur imaginaire.
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