À Munich, le musée de Lenbachhaus possédait depuis 1965 ce tableau d’August Macke réalisé en 1911. Après soixante ans en sa possession, le musée a changé un détail dans l’accrochage de l’œuvre, modifiant sa légende. Le titre est passé de Indianer auf Pferden (“Indiens à cheval”) à I******** auf Pferden. Le même changement a été opéré sur la version anglaise, passant de Indians on Horseback à I****** on Horseback. La modification était nécessaire puisque le mot “Indiens” utilisé pour désigner les peuples premiers américains est considéré comme raciste par les concerné·e·s. L’appellation viendrait de Christophe Colomb, qui aurait appelé ainsi les habitant·e·s du continent qu’il venait coloniser parce qu’il croyait arriver dans les Indes.
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Le musée fut contraint de s’expliquer dans un communiqué au vu des quelques mauvaises réactions suscitées par sa décision. Des médias orientés à droite ont qualifié ce choix de “wokiste” et ont crié à la “censure”. L’établissement a commencé par souligner que le titre de l’œuvre en question n’avait pas été donné par l’artiste lui-même mais par “Bernhard Köhler, mentor et collectionneur d’August Macke” qui “fut autrefois propriétaire de l’œuvre et nota le titre au dos de la toile”. Une première preuve qu’ajouter des astérisques au titre est loin de constituer une injure à son auteur.
I****** à cheval, 1911. (© August Macke/Städtische Galerie im Lenbachhaus)
De plus, le musée insiste sur la façon dont “aborder l’histoire et l’art du début du XXe siècle nécessite de traiter avec des sources historiques dont le langage et les images contiennent parfois des éléments désobligeants, voire racistes” et qu’il est important “de présenter les sources sans fard et de manière critique” tout en veillant à “être le plus respectueux possible dans le cadre de l’époque que nous vivons”. Remplacer les lettres du mot par des astérisques permet au public “d’identifier clairement de quel mot il s’agit” sans pour autant offenser les personnes concernées. Le Lenbachhaus ajoute que des explications étaient nécessaires et que le mot “Indiens” est donc inscrit en toutes lettres et entre guillemets dans “le livret et le texte à côté du tableau”, où le terme est “contextualisé de manière critique”.
De notre côté, on salue l’action : il ne s’agit pas d’effacer le passé mais seulement de vivre avec son temps et d’écouter les voix lésées et concernées. De plus, les astérisques permettent aux personnes qui ne sont pas sensibilisées à ces questions de vocabulaire de s’y familiariser et de ne pas répéter les mêmes erreurs, ad vitam aeternam. Le musée aurait pu toutefois préciser des termes alternatifs corrects à employer, à la place de celui qu’il a masqué, comme “peuples premiers”, “natifs américains” ou “Premières Nations”.