En 1967, le Musée national d’art moderne consacrait une monographie à la peintre parisienne Suzanne Valadon (1865-1938). Près de 60 ans plus tard, le musée Pompidou remet ça avec une nouvelle exposition consacrée à celle qui est arrivée dans la peinture en tant que modèle, avant de prendre le pinceau et de marquer l’histoire de la peinture avec une œuvre moderne, révolutionnaire et affranchie des conventions de son époque. Visible jusqu’au 26 mai 2025, cette vaste rétrospective consacrée à Suzanne Valadon propose de (re)découvrir les autoportraits, les natures mortes et les nus de la peintre mythique de Montmartre.
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Suzanne Valadon, Les Deux Sœurs, 1928. Collection particulière. (Photo : © Matthew Hollow)
Le nu émancipé du male gaze
À cheval entre un avant-gardisme du 19ème siècle et un autre du début du siècle suivant, Suzanne Valadon est de ces artistes difficile à classer. Elle s’émancipe des courants dominants contemporains – le cubisme, l’art abstrait – pour tracer son propre sillon.
Née Marie-Clémentine, la jeune femme se fait appeler “Maria” lorsqu’elle se rapproche du milieu artistique en posant pour des artistes peintres, avant de troquer son véritable prénom pour Suzanne, en référence à “Suzanne à les Vieillards”, récit adapté maintes fois en peintures. Lorsqu’elle peint, Suzanne Valadon adopte, à contrario des vieillards de l’Ancien Testament, une approche non voyeuriste, mais aussi réaliste : “Ne m’emmenez jamais pour peindre une femme qui cherche l’aimable ou le joli, je la décevrais tout de suite” avertissait la peintre.

Suzanne Valadon, Catherine nue allongée sur une peau de panthère, 1923. Lucien Arkas Collection.<br>(Photo : © Hadiye Cangokce)
Sans artifices, la figure de Montmartre donne vie à des nus et des (auto)portraits lumineux aux couleurs riches. Son réalisme s’exprime par exemple par les pubis fournis en poils pubiens qu’elle s’attache à représenter, à une époque où l’on aime à s’offusquer de nus qui ne subliment pas les corps. La peintre suit sa ligne directrice : “Rester soi-même, tâcher de traduire les multiples et changeants aspects de la vie, de la lumière, des formes, c’est pour l’artiste, la seule loi”.
Un héritage complexe et moderne
À travers près de 200 pièces, Pompidou revient sur l’œuvre de la peintre parisienne en cinq thématiques. Ces sections quadrillent autant que se peut la modernité de l’héritage pictural qu’elle laisse derrière elle : Apprendre par l’observation, Portraits de famille, “Je peins les gens pour apprendre à les connaître”, “La vraie théorie, c’est la nature qui l’impose” et Le nu : un regard féminin. Le parcours est enrichi d’archives inédites et d’œuvres d’artistes femmes contemporaines de Valadon (aux thématiques picturales similaires), pour se replonger pleinement dans la peinture de Suzanne Valadon, qui reste toujours aussi moderne près de 90 ans après la disparition de l’artiste.

Suzanne Valadon, Portraits de famille, 1912. Don aux Musées nationaux de M. Cahen-Salvador en souvenir de Mme Fontenelle-Pomaret, 1976 Paris, musée d’Orsay, en dépôt au Centre Pompidou, Musée national d’art moderne. (Photo : © GrandPalaisRmn (musée d’Orsay) / Christian Jean / Jean Popovitch)
La rétrospective consacrée à Suzanne Valadon est visible jusqu’au 26 mai 2025 au musée Pompidou.
Konbini, partenaire du musée Pompidou.