Ce dimanche 13 mars prochain aura lieu la 95e cérémonie des Oscars à Los Angeles. Si l’excellente comédie Everything Everywhere All at Once a été nominée 11 fois et mène la course aux prestigieuses statuettes, on a laissé parler notre sensibilité pour vous livrer nos prédictions mais surtout nos vœux à deux jours de la cérémonie.
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Meilleur film
Qui va gagner : Everything Everywhere All at Once
Qui devrait gagner : Everything Everywhere All at Once
La comédie de science-fiction absurde des Américains Daniel Kwan et Daniel Scheinert chronique les folles aventures d’une propriétaire de laverie, incarnée par l’actrice malaisienne Michelle Yeoh, épuisée par ses tracas administratifs avec le fisc soudainement plongée dans des univers parallèles. Le film a dominé les Screen Actors Guild Awards et les Producers Guild Awards, et rien que pour le symbole – tant pour l’originalité de ce pseudo-Marvel azimuté que pour la diversité de son casting –, le film doit remporter la plus prestigieuse des statuettes, qui serait très méritée. Favori à l’unanimité, il serait l’Oscar le plus insolite de l’histoire de la cérémonie.
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Meilleure réalisation
Qui va gagner : Daniel Kwan et Daniel Scheinert pour Everything Everywhere All at Once
Qui devrait gagner : Steven Spielberg pour The Fabelmans
Si les Daniels ne voleraient pas leur statuette de la meilleure réalisation, on aimerait que leur folie et leur talent certains n’éclipsent pas les autres grands films nominés, notamment le dernier long-métrage de Steven Spielberg, personnel, bouleversant et d’une virtuosité de mise en scène impressionnante. Parmi les récentes – et parfois ad nauseam – “lettres d’amour au cinéma” d’éminents réalisateurs, celle de Spielberg est de loin la plus pertinente et la plus réussie, portée par des acteurs absolument admirables.
Meilleure actrice
Qui va gagner : Cate Blanchett pour Tár
Qui devrait gagner : Cate Blanchett pour Tár
Lydia Tár est une des meilleures cheffes d’orchestre au monde et la toute première femme de l’Histoire à diriger un grand orchestre allemand, mais Tár n’est pas un biopic. Si le personnage de Cate Blanchett est un pur produit de fiction, l’examen scrupuleux des mécanismes du pouvoir dans le monde de l’art, mené par Todd Field, est lui on ne peut plus actuel. Et comme Lydia Tár au début du film, Cate Blanchett y est au sommet de son art en cheffe d’orchestre tyrannique, l’un des rôles les plus difficiles de sa vie. Déjà récompensée par deux Oscars, une troisième statuette serait néanmoins amplement méritée pour célébrer le travail accompli.
Meilleur acteur
Qui va gagner : Austin Butler pour Elvis
Qui devrait gagner : Paul Mescal pour Aftersun
Pour son premier rôle principal au cinéma, l’acteur irlandais il y a peu inconnu est nommé à l’Oscar du meilleur acteur à l’âge de 26 ans seulement. Dans Aftersun, premier film et coup de maître de la jeune réalisatrice écossaise Charlotte Wells, il incarne Calum, un père divorcé en vacances avec Sophie, sa fille de 11 ans, dans un hôtel à petit budget sur les côtes turques à la fin des années 1990. Sous la caméra de la réalisatrice qui a su capter, avec une rare délicatesse, un moment de tragique bascule, mélancolie et ambivalence parviennent à pénétrer ce physique de statue grecque. Une performance de père aimant mais imparfait si émouvante que l’on veut absolument voir récompensée.
Meilleure actrice second rôle :
Qui va gagner : Angela Bassett pour Black Panther : Wakanda Forever
Qui devrait gagner : Jamie Lee Curtis pour Everything Everywhere All at Once
Angela Bassett est une grande actrice, personne ne doute de cela. Mérite-t-elle pour autant une statuette dorée pour le rôle de la maman de Black Panther, certes touchante mais pas particulièrement marquante ? Ne serons-nous pas plus contents de voir la grande Jamie Lee Curtis, qui n’a jamais été oscarisée, être enfin récompensée – surtout pour ce film, ce rôle, cette transformation physique, cette diversité d’expressions faciales ?
Meilleur acteur second rôle :
Qui va gagner : Ke Huy Quan pour Everything Everywhere All at Once
Qui devrait gagner : Barry Keoghan pour Les Banshees d’Inisherin
Évidemment que l’on serait ravis de voir Ke Huy Quan célébré aux Oscars. Mais comment ne pas adorer Barry Keoghan, sa bouille d’amour et son accent superbe dans le trop beau Les Banshees d’Inisherin ? Parce que oui, Colin, oui, les décors, oui, la réal. Le film est vraiment un bijou, en particulier grâce à la partie de notre caméléon préféré, capable de s’amuser chez Marvel comme en Joker dans The Batman, tout en bossant avec les plus grands (Lanthimos, Nolan, Lowery). Ce film est une preuve de plus de son talent, et le voir avec un Oscar dans les mains nous donnerait presque les larmes aux yeux – presque.
Meilleur scénario adapté
Qui va gagner : À l’Ouest, rien de nouveau
Qui devrait gagner : Women Talking
Si nous n’avons pas été particulièrement conquis par la mise en scène trop théâtrale et par le résultat final trop scolaire et didactique de Women Talking, le travail d’adaptation du livre de Miriam Toews, inspiré de faits réels – ceux des viols collectifs et nocturnes de 150 filles et femmes, droguées à l’aide de sédatifs, d’une communauté mennonite de Bolivie – est quant à lui à souligner. À la façon de Rebecca Lenkiewicz et Maria Schrader, la scénariste et la réalisatrice de She Said, Sarah Polley a choisi d’éclipser ces actes sordides du récit et laisser les agresseurs hors-champ afin de donner toute la place à la parole des victimes.
Meilleur scénario original
Qui va gagner : Everything Everywhere All at Once
Qui devrait gagner : Everything Everywhere All at Once
Il y a fort à parier que les Daniels remporteront également la statuette du meilleur scénario original tant l’originalité des mondes parallèles dans lesquels sont propulsés leurs héros pour les extraire de leurs petits tracas quotidiens n’a d’égal que leur réjouissante absurdité, dans un imaginaire complètement fantasque et sans aucune limite. Un pied de nez inattendu au conformisme de l’Académie que l’on espère voir en direct dimanche.
Meilleur film d’animation
Qui va gagner : Pinocchio
Qui devrait gagner : Marcel the Shell With Shoes On
Si Guillermo Del Toro, son talent et sa passion ont leur place dans ces nominations, on aimerait le voir cette année céder sa place de favori à Dean Fleischer-Camp, le réalisateur du plus mignon des films d’animation. Dans un faux documentaire en prises de vue réelles, il a incorporé les aventures de Marcel le petit coquillage et de sa grand-mère Nana, dans leur quête pour retrouver leur petite communauté. Doublé par l’inégalable Jenny Slate à la voix reconnaissable entre mille, ce petit coquillage isolé, sensible et poétique à l’ingéniosité sans limite mérite assurément sa statuette.
Meilleur documentaire
Qui va gagner : Navalny
Qui devrait gagner : Fire of Love
Réalisé par l’Américaine Sara Dosa, Fire of Love documente l’histoire du couple de volcanologues français Maurice et Katia Krafft unis dans la vie par leur ardente passion commune pour les volcans, qui leur coûtera la vie en 1991 sur le flanc d’un volcan japonais en éruption. Réalisé à partir des vidéos époustouflantes et terrifiantes tournées par les Krafft sur les cratères du monde entier, enrichies d’images animées et d’archives d’interviews, Fire of Love est un documentaire à part qui s’intéresse surtout à l’inhabituel “triangle amoureux” qui unissait les deux chercheurs et leur obsession volcanique. Une magnifique histoire d’amour et l’histoire d’une passion incandescente trop peu célébrée.
Meilleur film étranger
Qui va gagner : À l’Ouest, rien de nouveau
Qui devrait gagner : Close
Pour prendre le contre-pied d’un cinéma qui valorise surtout les histoires d’amour, Lukas Dhont a décidé de faire un film sur l’amitié, son importance mais aussi sa fragilité, qui serait également l’occasion de voir plus grand et de parler de masculinité et du poids de la norme. Dans Close, il filme l’amitié de Léo et Rémi, deux adolescents de 13 ans inséparables, qui partagent leurs jeux et leur lit. Perçue comme ambiguë par leurs nouveaux camarades de classe, leur tendresse va se déliter et Léo, qui ne supporte pas les sous-entendus, va tout faire pour s’éloigner de Rémi. Jusqu’à l’impensable. Un drame douloureux et pudique à la fois qui célèbre la tendresse et qui brise les cœurs.
Meilleure chanson :
Qui va gagner : “Lift Me Up” (Rihanna, Ryan Coogler)
Qui devrait gagner : “Naatu Naatu” (M. M. Keeravani)
Tout le monde attendait le retour de Rihanna, surtout pour un Black Panther. Sauf qu’au risque de se mettre du monde à dos, il faut le reconnaître : le morceau n’est pas dingue. Alors que “Naatu Naatu”, si. Quiconque ayant vu RRR sait que si Keeravani n’a pas d’Oscar, ce sera l’un des plus gros hold-up et scandales de cette édition 2023. Ni plus ni moins.
Meilleure BO
Qui va gagner : Babylon, par Justin Hurwitz
Qui devrait gagner : Babylon, par Justin Hurwitz
Damien Chazelle a brillé par son absence dans ces nominations. Babylon, sa démentielle fresque hollywoodienne très mal reçue par la critique et le public américain, n’a écopé que de trois nominations techniques. Si Hollywood n’a certainement pas apprécié le miroir déformant tendu par Damien Chazelle, on aimerait que Justin Hurwitz, son fidèle compositeur déjà lauréat de deux statuettes pour La La Land, soit récompensé pour sa bande originale jazzy et entêtante qui rythme le film de 3 h 08 de la première à la dernière minute.
