On revient sur l’histoire de “Minuit 13”, l’outro de l’incroyable album “Paradise” d’Hamza

Minuit 13

On revient sur l’histoire de “Minuit 13”, l’outro de l’incroyable album “Paradise” d’Hamza

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© Photo d’Hamza au festival les Ardentes par @worldwidezem & Cover “Paradise”

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Par Simon Dangien

Publié le

"Dans l’noir comme les autres soirs."

Récemment certifié single d’or par le SNEP, “Minuit 13”, ce featuring avec Christine and the Queens et Oxmo Puccino, est indéniablement un chef-d’œuvre du premier album d’Hamza, Paradise, sorti en mars 2019. Focus sur ce titre en quatre infos importantes pour comprendre l’histoire qui se cache derrière ce morceau.

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Il fait la fierté d’Hamza

Pour notre format Track ID, Hamza est revenu sur le morceau de son album dont il est le plus fier. Et dans le mille… il s’agit de “Minuit 13” : “Le fait d’avoir Christine et Oxmo sur le morceau, je trouve c’est quand même quelque chose qui est assez exceptionnel et j’en suis assez fier”. Une connexion qui a su surprendre au moment de sa sortie, réunissant avec brio et équilibre plusieurs générations, plusieurs profils, plusieurs styles, et des pointures dans leur domaine artistique respectif. Une belle réunion de crack, en gros.

“J’écoutais beaucoup le morceau de The Korgis et je voulais absolument le sampler”

La genèse du morceau, c’est évidemment le mélange des univers, la création de quelque chose qui n’existe pas vraiment, de l’ordre de l’innovation, de la prise de risque. Ici, Hamza et Christine and the Queens touchent clairement du doigt une alchimie quasi céleste. Pour arriver à ce que l’on entend encore aujourd’hui comme un morceau magnifique et intemporel, que faut-il avant tout ? Une prod, bien sûr.

“Minuit 13” reprend les accords du plus grand succès des Korgis, “Everybody’s Got to Learn Sometime”. Ce titre, sorti premièrement en 1980 est énormément repris depuis sa création. Que ce soit par des artistes comme Voulzy, Sharon Corr ou l’Italien Zucchero, des DJ et leurs remix comme celui de Laidback Luke ou encore par l’Orchestre national de jazz en France en 2014. Bref, “Everybody’s Got to Learn Sometime” a fait du chemin mais c’est peut-être ce sampling du Sauce God qui semble le plus à propos dans son interprétation. À noter que c’est en grande partie Christine and the Queens qui s’occupe de reprendre les voix reconnaissables du titre d’origine, qu’elle se réapproprie jusqu’à nous faire presque oublier la version des Korgis. Hamza, lui, se balade sur la prod retravaillée pour coller à l’univers hip-hop, suppléé de Christine aux backs.

La production est donc cosignée Hamza (l’idée du sample vient de lui comme il l’explique dans cet entretien pour Antidote) et le producteur et grand ami du rappeur, Ponko. James Warren, membre des Korgis, est également crédité puisqu’il est à la création du morceau des dizaines d’années auparavant. La production offre un large terrain d’expression aux artistes, à la croisée de la pop et du rap, univers plutôt communs pour les deux collègues puisque, d’un côté, Hamza a toujours pioché dans de riches influences, quitte à délaisser parfois le rap pour mieux le retrouver plus tard. De l’autre côté, Christine and the Queens a toujours montré son ouverture, son amour et sa curiosité pour le rap, comme lorsqu’elle collaborait avec Booba sur le titre “Here”.

Pourquoi pas “Minuit 16” ?

D’après Genuis, le titre du morceau trouve sa signification dans une explication extrêmement simple. Il s’agirait de l’heure à laquelle Hamza a commencé à enregistrer le son. On comprend mieux l’ambiance nocturne assez exceptionnelle que l’on ressent à l’écoute du titre. Le tout est teinté d’un spleen et d’une lente mélancolie que seule la disparition du soleil sait faire ressortir comme il se doit pour nous toucher.

Oxmo Puccino ou le grand narrateur

Dans cet article, la mention d’Oxmo Puccino arrive tardivement, tout comme dans le morceau. En effet, la place qu’occupe Oxmo dans “Minuit 13” est particulière. Il arrive à la fin du titre et conclut alors l’album. Particularité supplémentaire, Oxmo Puccino ne rappe pas ici, préférant déclarer son texte à la manière d’une poésie, à la force des mots. Pendant une minute, il va nous gratifier de sa sagesse et d’un message profond :

“Et nous y sommes, ni ciel, ni terre, comme avant le commencement. Mais là, c’est après le dernier jour d’une courte vie.”

Si certains lui reprochent sa posture et dévalue l’importance de sa participation dans la réussite de “Minuit 13”, la présence d’Oxmo Puccino ne semble en rien liée au hasard. En 2019, Hamza explique au média Antidote avoir voulu “collaborer avec un narrateur”, ajoutant qu’“Oxmo, c’est le meilleur qui soit dans le rap français, c’est une légende”. Plus tôt, en octobre 2018, le père d’Hamza décède. Une tragique nouvelle qui viendra tout chambouler et, par extension, la conception de Paradise.

Au regard du sens du texte narré par Oxmo et la proximité temporelle qui lie les deux évènements, on pourrait analyser la portée des mots d’Oxmo comme une volonté de rendre hommage à la famille et au père d’Hamza. Une fin d’album pleine de sens, d’une triste beauté qui ancre un peu plus “Minuit 13” dans la légende, accentuant le souvenir qu’il laisse. Oui, le souvenir qu’il laisse…