Maintenant que tous les films Star Wars sont disponibles (légalement) en ligne, l’heure est à se poser certaines questions. On ne va pas dire ici dans quel ordre regarder cette saga, certains préférant l’ordre chronologique de la sortie des longs-métrages et d’autres préférant suivre l’ordre du récit. Les deux équipes ont raison, et on ne saurait dire ce qu’il y a de mieux.
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Par contre, il est désormais temps de nous poser et de réfléchir tranquillement au classement des films de la franchise lancée par George Lucas en 1977. Et là, c’est très difficile. Surtout au sein d’une rédaction constituée en grande partie d’aficionados de la franchise.
Certains “puristes” ont détesté la dernière trilogie, et tout particulièrement l’épisode VIII. D’autres, a contrario, ne mettent pas les trois premiers films sur un piédestal. Quelques-uns adorent La Menace fantôme. Il y a aussi des épisodes sur lesquels à peu près tout le monde est d’accord, que ce soit pour détester Solo ou adorer Rogue One.
Mais il n’y avait pas assez de déterminants communs pour établir à la volée ce classement. Nous avons donc demandé aux fans de la rédaction d’établir un classement individuel des neuf films de la saga Skywalker et des deux spin-off. Une fois récoltés tous ces classements, nous avons mis des notes en fonction de leur place, puis on a additionné le tout.
En ressort un mélange de nos avis qui donne ce classement des 11 films de la saga Skywalker, du moins bon au meilleur. Magnéto George :
11. Solo : A Star Wars Story (Ron Howard, 2018)
Le mauvais élève. Le film de trop. Tout n’est pas à jeter dans ce Solo, entre de belles séquences et des personnages secondaires intéressants. Donald Glover en Lando jeune, ça a de la gueule. Woody Harrelson fait plaisir, et on ne peut qu’apprécier le droïde incarné par la géniale Phoebe Waller-Bridge. L’ambiance western est impeccable. La scène de course-poursuite après avoir fui la planète industrielle est réussie. Et le twist final fonctionne.
Mais voilà, ça ne suffit pas à sauver ce naufrage cinématographique : le reste du casting est insipide, ce qui n’aide pas un scénario maladroit et d’une lourdeur rare — ce besoin de vouloir tout expliquer et justifier, de l’origine du nom d’Han Solo ou de Chewbacca, est hautement insupportable et a donné à l’auteur de ces lignes une soudaine envie de quitter la salle.
Et le couac de production, qui a amené les réalisateurs initiaux Phil Lord et Chris Miller à être mis de côté pour être remplacés à la dernière minute par Ron Howard, ne peut pas expliquer à lui tout seul cet épisode dispensable. Pas étonnant que ce soit le seul film Star Wars pour lequel Disney a perdu de l’argent.
10. Star Wars II : L’Attaque des Clones (George Lucas, 2002)
Dans l’ensemble de la prélogie, on comprend ce qu’a voulu faire George Lucas : montrer l’apprentissage d’Anakin tout en développant l’importance de sa relation pour Padme sans oublier d’aborder la noirceur grandissante de l’adolescent. Trois éléments absolument nécessaires pour finaliser la transformation du jeune Skywalker en futur grand vilain.
Le problème est que L’Attaque des Clones est donc un épisode bâtard, qui n’a pour intérêt que de poser les bases de La Revanche des Sith. D’autant plus que beaucoup de séquences sont désagréables à regarder, mal interprétées, et parmi les pires de la saga. Oui, on parle notamment de toi, scène de romance à la niaiserie étourdissante, avec Padme et Anakin dans l’herbe.
La seule chose qui sauve le film ? Obi-Wan, à l’aide d’un Ewan McGregor encore meilleur que dans La Menace fantôme, et la découverte de l’armée des clones. Et le combat final, à la limite — pas tant le combat dans l’arène avec les monstres, mais plutôt celui qui suit et qui amène à la confrontation avec Dooku (et donc l’apparition de Yoda Super Saian).
9. Star Wars IX : L’Ascension de Skywalker (J.-J. Abrams, 2019)
Beaucoup ont détesté ce volet. Ce n’est pas spécialement le cas de l’auteur de ces mots. Néanmoins, il faut reconnaître une chose : c’est un film qui n’existe que pour annuler le précédent, le controversé Dernier Jedi. J. J. Abrams passe son temps à cracher sur toute l’entreprise de Rian Johnson, cassant l’arc narratif construit lors du huitième épisode.
Alors oui, c’est très beau, impressionnant d’un point de vue technique. C’est un film très chargé, qui contient presque deux films en un, comme si J. J. voulait faire son propre épisode VIII. Il développe la mythologie, pousse le destin de Kylo Ren dans ses retranchements, et conclut la saga, parce qu’il fallait bien la conclure.
Mais il y a trop de facilités, trop de raccourcis, trop de décisions douteuses, trop de tentatives insupportables de faire revivre la flamme. Et puis, faire revenir Palpatine sans prévenir, dans un simple message du générique, pour en faire le vrai grand méchant, avant de le transformer en grand-père de Rey. Non.
8. Star Wars VIII : Les Derniers Jedi (Rian Johnson, 2017)
Ce film est problématique. Si énormément de fans ont été déçus, c’est que Rian Johnson a décidé d’avoir un peu de courage et de faire quelque chose moins fan service que sir J. J. sur Le Réveil de la Force, sans doute suite aux critiques engendrées par le renouveau de la saga, qui était une espèce de copie conforme du Nouvel Espoir. Audacieux, mais casse-gueule. Car pour certains, Star Wars, c’est sacré. Et ce film serait un blasphème.
Donner des nouveaux pouvoirs aux Jedi ; faire de Leia une personne ayant la capacité de contrôler la force comme personne ne l’a jamais fait et s’envoler façon Superman dans l’espace ; le trick de la vitesse-lumière pour briser un vaisseau amiral, et surtout le comportement de Luke sont tant de choses qui font que des millions de “fans” ont détesté ce film. Et c’est sans parler des scènes qui ne sont pas à la hauteur (toute la séquence dans le casino, pour ne citer qu’elle), et l’aspect contre-la-montre un peu “facile” selon certains.
N’empêche qu’on parle du Star Wars le plus beau, et audacieux de toute la saga. Que Crait est une planète plus splendide que tout ce que le reste de la trilogie a bien voulu nous monter. Que la scène du combat dans la salle du trône est l’une des plus belles scènes des 11 films.
7. Star Wars VII : Le Réveil de la Force (J. J. Abrams, 2015)
Il ne faut pas avoir froid aux yeux pour accepter le job. Le poste maudit du réalisateur/scénariste qui va relancer la saga Star Wars, introduire de nouveaux personnages principaux, sans trahir l’héritage de George Lucas. C’est d’ailleurs la seule raison pour laquelle il est devant les autres films de la trilogie. Pour le courage de l’entreprise.
Car Le Réveil de la Force est maladroit, a des dialogues mal écrits, copie la structure du Star Wars originel, reste dans une zone de confort (qu’on comprend, mais qui affaiblit le propos du film) rendant le schmilblick un poil ridicule, possède une imagerie nazie peu subtile, et une Étoile de la mort de plus en plus grande (ici, de la taille d’une planète). Étoile de la mort que la Résistance va détruire, bien sûr !
Heureusement que certains personnages ont de la gueule (même si pas exploités à fond, à l’instar de Poe). Puis, on ne va pas se mentir : revoir Han, Leia, et brièvement Luke, sans parler de Chewie, R2 et C3-PO, ça fait quand même beaucoup de bien. Oui, le fan service, à petite dose, peut être bénéfique. Encore ne faut-il pas baser tout son projet dessus.
6. Star Wars I : La Menace fantôme (George Lucas, 1999)
L’objet de la discorde. Culte pour certains, nanar pour d’autres. Il faut dire que pour toute une génération, c’est ici que réside la découverte de Star Wars, la découverte sur grand (ou petit) écran d’un univers immense. Il faut donc regarder ce long-métrage de 1999 tel qu’il est, sans méfiance ni nostalgie. Spoiler : La Menace fantôme est un bon Star Wars.
Il souffre de personnages lourds, certes. Mais comme un peu tous les films au final. Il essaye d’introduire, un peu maladroitement, un aspect politique qui ne sera pas assez exploité mais qui demeure la grande nouveauté du volet. Il présente des aspects des blockbusters d’action des années 1990 assez plaisants à retrouver dans cet univers (oui, on parle de la course de racers), avec tous les défauts que cela implique.
De toute manière, c’est simple : Dark Maul. Le vilain sauve tout le film, en devenant en quelques minutes seulement à l’écran le méchant le plus charismatique et stylé de toute la saga — heureusement que le personnage sera exploité dans le monde des séries animées Star Wars, car se passer de lui aurait été un beau gâchis. De là, difficile de ne pas reconnaître à La Menace fantôme son importance dans la saga.
5. Star Wars III : La Revanche des Sith (George Lucas, 2005)
De loin le meilleur film de la prélogie. La conclusion (presque) parfaite qu’on attendait tous depuis deux films déjà. C’est déjà le plus beau et le plus consistant de la trilogie, et il n’y a pas grand-chose à changer – à part le jeu d’acteur d’Hayden Christensen, ou sa chute dans le côté obscur qui peut paraître soudaine pour certains.
On y trouve le plus long et impressionnant combat de toute la saga ; l’un des meilleurs vilains (Grievous), des scènes cultes entre Anakin et Palpatine. C’est visuellement le volet le plus impressionnant. Le plus profond émotionnellement. Le plus fort.
Alors pourquoi malgré toutes ses qualités n’est-il pas plus haut dans le classement ? Bonne question. C’est que là, nous arrivons sur le haut du panier, et qu’aussi bon soit-il, il ne dépasse pas pour autant la trilogie originale. Car dans ce débat, il semble évident que : la trilogie originale > la prélogie > la nouvelle trilogie.
Je pense que tout le monde serait d’accord avec ce postulat, et ce qu’il implique.
4. Star Wars VI : Le Retour du Jedi (Irvin Kershner, 1983)
Le dernier Star Wars de la trilogie originale, que le commun des mortels pensait être la conclusion de la saga au départ, n’est pas exempt de défauts. Disons-le : sans doute que l’amour intarissable pour les premiers films nous a incités à le mettre aussi haut. Car si on regarde de plus près, on est loin de la qualité des deux premiers.
La séquence avec Leia esclave ; la mort de Boba Fett ; les Ewoks (qui auraient sans doute été autant détestés qu’un certain Jar Jar s’ils n’étaient pas dans la trilogie originale), la redondance d’avoir une nouvelle Étoile de la mort : tant de choses qui portent préjudice à l’histoire centrale, qui se concentre autour de la transformation finale de Luke en Jedi, et de l’affrontement avec son père.
Sauf que tout cela n’enlève rien à la puissance d’autres scènes. Car passée cette première heure décevante qui contient malgré tout de belles séquences (la bataille dans le désert), on a quand même une course-poursuite dans la forêt qui a marqué une génération entière de fans, des retournements de situation, et un grand final.
Il ne faut pas oublier l’une des plus belles scènes de toute la saga Skywalker : le réveil de Vador pour sauver son fils. Le sacrifice ultime de ce grand vilain pour sa famille qu’il avait lui-même détruite, qui donnera à la trilogie toute sa force, et qui explique en grande partie pourquoi elle a marqué des générations comme une œuvre à part entière.
Impossible de le placer plus bas en réalité ; aussi jonché de défauts qu’il soit, Le Retour du Jedi est culte et trop important.
3. Rogue One : A Star Wars Story (Gareth Edwards, 2016)
Le film qui a pris tout le monde de court. Personne n’était emballé par l’idée d’un spin-off, et Gareth Edward nous a prouvé ô combien nous avions tous, mais vraiment tous, torts. Qu’il ne fallait pas forcément user des vieux personnages cultes pour rendre intéressant et poignant un récit lié à une saga. Que l’écriture était ce qui primait. Qu’on pouvait respecter les fans sans leur faire du fan service gratuit — et savoir le doser avec intelligence.
Le vrai point fort de ce film est qu’il n’est pas qu’un film Star Wars. C’est un excellent film. Certains bons Star Wars sont de très bons Star Wars, mais ne transcendent pas cette condition. Tenez, un exemple : La Revanche des Sith est un excellent Star Wars, mais n’est pas un excellent long-métrage en tant que tel. Un très bon blockbuster, soit, mais pas un grand long-métrage. Rogue One l’est.
Sans jamais trahir l’esprit Star Wars, il s’affranchit des traditions de la saga pour devenir un vrai film à part entière — chose que devraient faire tous les spin-off en somme, et que Solo a lamentablement ratée. C’est un film d’infiltration, d’espionnage, un thriller d’action spatiale d’une ampleur inédite. Le casting, les personnages, l’écriture, la mise en scène, la photographie, l’atmosphère : il n’y a rien à jeter dans ce film.
Et puis cette fin. D’une part, le sacrifice d’une clique d’héros à laquelle on commençait à s’attacher. De l’autre, l’arrivée d’un personnage connu de tous. L’incroyable frisson qui parcourt votre corps quand le grand vilain débarque quelques secondes à l’écran, rappelant au commun des mortels que Dark Vador n’est pas qu’un objet pop devenu culte, mais bien un grand méchant qui a hanté des générations de fans, et qui va continuer de le faire. Que 40 ans après sa première apparition, Vador a encore cette puissance.
Rien que pour cette fin, Rogue One mérite largement, largement, cette place sur le podium.
2. Star Wars IV : Un Nouvel Espoir (George Lucas, 1977)
Le premier. L’original. Celui qui lança tout. Celui qui aurait pu tuer dans son œuf la carrière d’un certain George Lucas. Ce dernier a galéré à le financer, avant de se lancer avec un budget minime. Les avancées technologiques sont spectaculaires bien qu’encore balbutiants. Le film est à l’opposé de ce que propose Hollywood alors — de la SF à l’univers riche et avec une structure narrative sortie tout droit du récit de héros médiéval.
Lucas a enchaîné les complications, a cru échouer mille fois. Alors qu’il voyait son ami Spielberg concocter lui aussi une autre pépite culte de la science-fiction, Rencontres du Troisième Type, lui ne croyait plus… en lui. Son projet a été retardé, a subi mille galères (tempêtes, blessures, soucis techniques), a nécessité de faire gonfler le budget — ce qui a bien agacé les pontes de la Fox.
Un film né dans la douleur, qui devient l’un des plus importants du septième art. On sait, il est niais, il est moins bien joué que les suivants, les effets spéciaux ne sont pas encore au niveau de ce qui arrive, le combat au sabre entre Obi-Wan et Dark Vador est simpliste. Il est loin d’être parfait. On sait.
Mais il est trop important, pour ne pas atterrir sur la deuxième place de ce podium. Il installe tout, la franchise mais aussi le modèle des blockbusters des décennies suivantes. Un modèle d’écriture inégalé de par la richesse de son univers, la manière dont il nous est introduit, et par la fluidité de son récit. Lucas ne nous prend jamais pour des cons, part du principe qu’on va adhérer dès le début à son histoire de princesse, de Jedi, de force, d’étoile de la Mort, et qu’on va tout comprendre. Et ça marche. Ça marche trop bien, même !
1. Star Wars V : L’Empire contre-attaque (Irvin Kershner, 1980)
Personne ne peut le nier. L’Empire Contre-Attaque est le meilleur film Star Wars. De loin. Après avoir posé les bases de son univers, Lucas a pondu un script proche de la perfection, réussissant à développer ses personnages, son univers et, surtout, à surprendre son audience. Pourquoi ? La liste est longue, mais allons-y.
La bataille sur Hoth, qui est incroyable. La relation entre Han et Leia qui aboutit à l’une des meilleures lignes de dialogue (improvisée par Harrison Ford : “I love you” ; “I know”). Yoda, qu’on prend pour un monstre gentillet avant de devenir le meilleur personnage de la saga. L’apprentissage de Luke, qui nous en dit plus sur la force ; la Marche Impériale, que l’on découvre ici pour la première fois. La course-poursuite dans le champ d’astéroïde, vraie claque visuelle. L’ambiguïté de Lando, trop rare à l’époque dans ce type de récit grand public entre un gentil et un méchant. Boba Fett — comment ne pas l’aimer. Le combat entre Luke et son père, le plus impressionnant de la trilogie. L’audace de couper la main de notre protagoniste. Et ce twist final, le plus populaire de l’histoire du septième art.
Le fait que ce soit le volet le plus sombre, le plus adulte. Le fait que le personnage de Luke passe de celui d’un adulescent crédule à un Jedi (ou presque). Le fait qu’il n’y ait aucun passage superflu, ou dialogue niais. La puissance qui ressort de Dark Vador. Le fait d’exploiter des planètes aux opposées de celles présentées dans le premier volet. Le fait de ne jamais prendre le spectateur pour un imbécile. Le fait d’exploiter son univers, sans aller trop loin, tout en le faisant croître. Le fait de finir sur une fin douce-amère où les gentils ne ressortent pas grands gagnants.
Car, certes, Luke ressort vivant de son combat contre son père. Mais il a perdu une main, est traumatisé de sa découverte, tandis que Han est cryogénisé après la trahison. Une double cliffhanger incroyable, qui en plus d’être osé pour l’époque (le public aurait complètement pu détester cette fin, puisqu’à l’époque, le happy end est roi), est très malin.
Derrière le classique “Je suis ton père” réside un ressort scénaristique qui ressemble à ce qu’on appellerait aujourd’hui un “twist”. Mais il a plus de profondeur que ça, lorgnant du côté de Shakespeare avec la trahison du père spirituel (Obi-Wan) qui aurait menti par omission pour protéger le jeune homme, et la découverte de la vérité par son ennemi juré devenu père.
En deux mots : le meilleur. À tout jamais.
Classement établi avec la participation de Pierre Bazin, Aurélien Chapuis, Raphaël Choyé, Arthur Cios, Adrien Delage, Mike Germain, Mathilde Gros, Hong-Kyung Kang et Louis Lepron.