On a classé (objectivement) tous les films de David Fincher, du moins bon au meilleur

On a classé (objectivement) tous les films de David Fincher, du moins bon au meilleur

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(© UGC Fox Distribution / 20th Century Fox Sony / Netflix)

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Par Arthur Cios

Publié le

On ne parle que de films absolument incroyables, donc bon…

Alors que sort The Killer sur Netflix, on s’est repenchés sur la filmographie du maître David Fincher. On a beau ne parler que d’immenses films, on sait que certaines places ne vont pas plaire à tout le monde…

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#12. Alien 3 (1992)

Le premier long de David Fincher est un peu le vilain petit canard de cette liste. Le tournage s’est tellement mal passé pour le jeune David, confronté à des producteurs et une major lui enlevant tout contrôle créatif, qu’il rejette totalement le film. C’est le moins Fincher de toutes les œuvres qui vont suivre.

Pourtant, le film est loin d’être une bouse. Déjà, il s’inscrit dans une des plus grandes franchises de l’Histoire (véridique). Il réinvente totalement la formule, que ce soit avec le xénomorphe chien, ou avec cette fin culte. C’est un film qui mérite plus de respect, mais qu’on peut considérer comme le moins bon de la bande.

#11. The Game (1997)

On parle trop peu de The Game. Et pour cause, il est sorti entre Seven et Fight Club, deux de ses plus gros succès et réussites. On oublie alors l’expérience folle qu’a vécue Nicolas Von Orton (Michael Douglas), dans ce jeu plus vrai que nature où il doit se battre pour sa vie — à moins que ce soit une arnaque (à moins que ?).

Dans un entretien qui n’est désormais plus en ligne, Fincher racontait à Playboy en 2014 qu’il regrettait d’avoir fait le film, notamment pour son troisième acte. On comprend. La fin est une surenchère sur surenchère, qui peut rendre l’expérience un peu particulière. Mais il y a un réel plaisir à se replonger dans cet univers, à dénicher de petits détails sur ce CRS, les numéros… Il ne faudrait pas omettre l’influence du film sur la pop culture, 25 ans après.

#10. Panic Room (2002)

Il est souvent considéré comme un Fincher plus mineur, ce qu’il est loin d’être. Encore une fois, on parle d’un cinéaste à la filmographie assez remarquable. Son Panic Room est pourtant assez fou, avec une production pas évidente — on parle d’un remplacement d’actrice en dernière minute, avec un tournage qui a été arrêté plus d’une fois.

En racontant l’histoire de cette femme divorcée et sa fille diabétique obligées de se cloîtrer dans sa “panic room”, pièce conçue pour se protéger de potentielles catastrophes, alors que les trois cambrioleurs veulent justement accéder à ladite pièce, Fincher s’amuse à explorer une technologie qu’il avait déjà testée dans Fight Club, à savoir l’assistance informatique pour les mouvements de caméra (ce qui donne des plan-séquences à travers des trous de serrures). C’est un thriller hitchcockien résolument moderne et un huis clos d’une efficacité remarquable.

#9. Mank (2020)

Alors qu’il finissait la saison 2 de Mindhunter et face au refus d’une troisième, Fincher s’est permis un gros kif. C’est un caprice d’une beauté folle, mais c’est un caprice. C’est un film qui n’a rien à faire sur Netflix, mais que seul Netflix pouvait produire en 2020. C’est un film sur la genèse de Citizen Kane, en noir et blanc, à l’enregistrement audio conçu pour donner l’impression d’être d’époque.

Plus qu’un film sur une guéguerre pour savoir qui est le vrai auteur du film culte, entre certes Orson Welles mais surtout Herman Mankiewicz, c’est surtout l’adaptation d’un script du père de David, Jack Fincher. C’est un projet personnel et important, que Fincher enrobe dans un long-métrage sublime, extrêmement bien construit, avec des performances incroyables et l’une des plus belles B.O. de Trent Reznor et Atticus Ross.

#8. Millénium : Les Hommes qui n’aimaient pas les femmes (2012)

Quand David Fincher attaque l’adaptation de Millénium, alors qu’il y a déjà eu une franchise à succès en Suède, le réalisateur est déjà considéré comme le maître du thriller — alors même qu’il est un cinéaste rare qui n’en a fait, à l’époque, que 4. Comme le film sera moins marquant, moins impactant que les grandes œuvres de Fincher, il est rarement cité et est jugé comme plus mineur. Que nenni.

Alors vous me direz, le mettre en 8e place revient à considérer le film comme plus petit que ce qu’il est. Mais encore une fois, la filmographie de Fincher est si riche que 8e sur 12, c’est une bonne position. Sans être au-dessus de ses plus grandes œuvres, Millénium reste le parfait exemple de la capacité de Fincher à explorer un univers différent — c’est son film le plus sombre, le plus noir, peut-être le plus dur.

#7. The Killer (2023)

Si Mank était un pur kif égoïste que l’on prend plaisir à observer (parce que c’est un petit chef-d’œuvre), The Killer est un pur kif méga-altruiste. En adaptant la BD de Matz et Luc Jacamon, le cinéaste garde le côté tueur méticuleux avec 95 % de dialogues internes, façon Le Samouraï de Jean-Pierre Melville, mais transforme totalement la chose en un film épuré, mais d’une générosité dingue.

Les scènes de baston sont aussi impressionnantes (même s’il n’y en a vraiment qu’une, en réalité) que celles de préparation (dont consiste le reste du film), avec une photo et un montage millimétrés à la perfection. Le film prend le parfait contrepied de Millénium, avec un commentaire politique sur son époque, qui réussit à aborder le parcours d’un cinéaste trop méticuleux qui a un contrat à exécuter et qui n’y arrive pas. Fascinant. Il est trop tôt pour le considérer au-dessus du reste, sachant que Fincher le considère comme une série B, mais on verra ce que l’Histoire retiendra de cette folie.

#6. Seven (1996)

Imaginez : vous avez une belle carrière dans le monde de la pub et des clips. Vous êtes considéré comme un petit génie, tout le monde vous veut. Pour votre premier film, on vous propose de faire le nouveau volet d’une franchise dont le premier film est signé Ridley Scott et le deuxième James Cameron. Un Alien, quoi, ce n’est pas rien. Vous touchiez enfin à votre rêve de cinéma et c’est la pire expérience de votre vie. Les producteurs sont infâmes avec vous, vous êtes déçu du résultat au point de désavouer complètement le film.

Que faites-vous ? Beaucoup auraient abandonné. Beaucoup. David Fincher, lui, a créé, en réaction, un chef-d’œuvre. Un sacré chef-d’œuvre.

Aujourd’hui, on retient bien trop facilement son plot twist, Brad Pitt en pleurs devant un carton et passant de l’autre côté de la barrière. C’est omettre la construction parfaite de l’enquête, la glauquitude extrême des crimes, l’humidité qui transpire l’écran dans ce New York pluvieux, cette photographie qui détonne du reste des productions hollywoodiennes de l’époque, la manière de casser les codes des thrillers et l’écriture exemplaire. Ce générique avec le remix de Nine Inch Nails… Pfiou. Immense. C’est le début d’une carrière impressionnante.

#5. Fight Club (1999)

C’est hilarant, quand on pense deux secondes, que ce film soit devenu culte pour les mauvaises raisons. Beaucoup d’incels y voient la parfaite représentation de leur mal-être et une ode à la violence masculine, à la testostérone mascu au possible. C’est passer à des kilomètres du réel message de Fincher, qui est en réalité le parfait inverse. C’est assez logique.

C’est ce qui est assez remarquable avec l’écriture de Fincher et Uhls. En présentant Tyler comme un personnage qui intervient avec une critique du capitalisme qui fait sens et qui vient chambouler la vie un peu trop rangée et chiante du narrateur, on aurait envie de le suivre et être raccord. Sauf qu’évidemment, chacune des propositions qu’il fait est à la ramasse. Ce ne sont pas des solutions : c’est du chaos. Aussi anarchique que l’on puisse être, la fausse liberté mise en avant est au final loin d’être glorifiée. Sinon, les mascus deviendraient des militants anticapitalistes. Pourquoi ne retenir qu’une partie du message ? Brillant.

Fincher fait le tout avec une mise en scène, et un montage qui donnera le la aux productions des dix années précédentes. C’est un film d’une importance cruciale.

#4. L’Étrange Histoire de Benjamin Button (2009)

Désolé si vous trouvez le terme galvaudé, mais c’est le cas : cette pépite est sous-estimée au possible. Tout le monde le regarde de haut quand on parle de Fincher, parce que c’est le moins sombre et violent, parce que c’est le plus romantique, parce qu’il est trop long, parce qu’il y a trop d’effets spéciaux, parce qu’il a vieilli. Quelle erreur.

C’est un projet des plus casse-gueule. Spielberg et Tom Cruise s’y sont cassé les dents. Fincher en rêvait depuis plus de 10 ans et attendait que la technologie soit à la hauteur du projet — et que Spike Jonze lâche l’affaire. Fincher raconte une histoire d’amour à l’envers, avec un Brad Pitt bébé vieux qui rajeunit en vieillissant. Ce qui a été créé est immense. Ce que Fincher raconte et réussit à transmettre en termes d’émotion est d’une puissance folle (le scénario est signé Eric Roth, à qui l’on doit Forrest Gump, rien que ça).

C’est sans parler de la sublime photo de Claudio Miranda, l’une des plus belles compositions d’Alexandre Desplat et le couple Cate Blanchett – Brad Pitt, à jamais dans notre cœur. C’est incompréhensible que l’on ne considère pas ce chef-d’œuvre à sa juste valeur.

#3. Zodiac (2007)

Il aura fallu cinq ans après Panic Room pour voir David Fincher revenir sur les écrans géants. Lui qui poussait déjà la technologie à bout décide de totalement se réinventer en passant au numérique, en abandonnant la pellicule, passant à la HD, sublime. Bon, ça lui a donné au passage la liberté de tourner en quantité industrielle, ce qui, pour un cinéaste aussi méticuleux et réputé pour faire tourner les scènes des dizaines et des dizaines de fois, peut être un problème. Mais ça ne s’arrête pas là.

Fincher réinvente le personnage qu’il aime raconter, les polars paranos des années 1970, sa réputation de faiseur de thriller à l’imagerie plus sombre que le reste de Hollywood qui va donner le ton de ce qui suivra pendant des années. Encore une fois, Fincher est précurseur avec cet immense polar au casting parfait. Au final, ce film n’est pas reconnu à sa juste valeur — c’est un flop au box-office et il n’a eu aucune nomination aux Oscars.

#2. Gone Girl (2014)

Dès le début, les critiques furent unanimes sur l’incroyable qualité du nouveau thriller de Fincher. Comme du bon vin, Gone Girl vieillit remarquablement bien et monte dans notre estime jour après jour, semaine après semaine et année après année. Finira-t-il par être premier ? Sans doute pas. Mais s’en rapproche doucement.

C’est vrai chef-d’œuvre puissant, féministe, critique de son époque et des médias fasciné par les “true crime”, ces thrillers à twist, mais qui fait partie de la catégorie rare de films qui restent fascinant, voire le sont encore plus quand on connaît ledit twist. Et puis, c’est le meilleur rôle et performance de Rosamund Pike et ce n’est pas loin d’être la meilleure performance de Ben Affleck aussi.

Le voir une fois, c’est être fasciné par ce personnage féminin et se dire que c’est l’histoire d’un lâche qui a une femme tarée. Le revoir, c’est comprendre que c’est le récit en creux de deux personnes toxiques, “fucked up”, et donc parfaitement faites l’un pour l’autre.

#1. The Social Network (2010)

N’est-ce pas remarquable que la plus grande, la plus puissante et fascinante œuvre du maître du thriller soit un drame sur la création d’un réseau social ? Comment un film quasiment entièrement constitué de dialogues devant des ordinateurs ou parlant devant un jury, sans action réelle, sans enquête, peut être aussi remarquable ?

C’est la magie de Fincher. C’est la magie de la bande originale de Trent Reznor et Atticus Ross, leur première et leur meilleure à date. C’est la magie de la révélation de Jesse Eisenberg, mais surtout d’Andrew Garfield. C’est la magie d’une mise en scène épurée racontant une tragédie grecque moderne, où se mélange ego mal placés, amitiés et amours brisées et trahisons en tout point. C’est la magie d’un script signé Aaron Sorkin, maître du dialogue ping-pong.

C’est une pièce magistrale, de bout en bout.