Le rappeur Notorious B.I.G. a transformé le rap dès son premier album très attendu, Ready to Die. Un véritable manifeste qui a réussi à proposer un cocktail explosif entre rue et populaire et qui fêtait hier, dimanche 13 septembre, son vingt-sixième anniversaire. Pourtant, au départ, ce n’était pas écrit.
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Au début des années 1990, à New York, le paysage musical se métamorphose à une vitesse folle. Les avancées technologiques et le changement de génération amènent le rap à un niveau jamais égalé. La diversité est accentuée, il y en a pour tous les goûts, de De La Soul à Ice Cube en passant par Redman et Arrested Development. Les artistes sont de plus en plus nombreux, mais il y a une constante : la capitale du rap, c’est New York.
Pourtant, deux disques vont changer radicalement cette hégémonie territoriale : The Chronic de Dr. Dre puis Doggystyle de Snoop Dogg. Avec un univers plus dansant et léger tout en restant hardcore dans les paroles, Dr. Dre et Snoop Dogg vont mettre durablement la côte ouest au centre du jeu, avec un as dans leur manche : 2Pac.
C’est entre ces deux versions du rap, Dr. Dre et Snoop d’un côté, Nas de l’autre, que va apparaître une nouvelle pointure qui va rapidement prendre sa place : Notorious B.I.G. Et cette mise en orbite est très reliée au travail exceptionnel d’un producteur de génie encore peu connu à l’époque : Puff Daddy.
Une rencontre décisive entre la rue et le populaire
En 1992, Sean Combs aka Puff Daddy découvre un rappeur de 20 ans originaire du quartier Bedford-Stuyvesant à Brooklyn, Bed-Stuy pour les intimes. Christopher Wallace aka Biggie est un rimeur puissant qui parle de son quotidien de dealeur de crack avec un univers très large, élevé aux sons de Lord Finesse et Big Daddy Kane.
Puff est alors stagiaire chez Uptown Records, le label new jack de Guy, Jodeci, Mary J. Blige et Heavy D. Il décide de signer Biggie sous le nom de Notorious B.I.G. pour le faire travailler sur son premier album. Les enregistrements commencent en 1993, essentiellement sur des productions de Lord Finesse, DJ Premier et Easy Mo Bee.
Après plusieurs semaines de travail, Puff fait le point. Les premières maquettes sont extrêmement sombres, Notorious B.I.G. crie presque, on le sent plein de rage et complètement paranoïaque.
À l’écoute de ce qu’il se passe cette année-là dans le rap mondial, Puff Daddy se dit que ça ne va pas coller, que c’est trop hargneux, trop négatif. Au même moment, Puff Daddy s’embrouille avec son employeur d’Uptown Records et se fait virer pour avoir demandé un salaire. Le projet Notorious B.I.G. est au point mort.
Un album prêt à mourir
Christopher Wallace retourne alors dans la rue et passe quelque temps à vendre des stupéfiants en Caroline du Nord. Puff le recontacte, il vient de monter son propre label : Bad Boy Records. Il veut relancer l’album avec un son plus clair, plus frais. Ils reviennent ensemble sur toutes les maquettes et en changent la direction, le mix.
Ils bossent aussi sur des nouveaux morceaux avec une direction plus commerciale. Tous les détails vont être revus par Puff Daddy et son équipe d’ingénieurs, les Hitmen.
Le premier extrait de l’album s’inscrit dans cette nouvelle direction. “Juicy” est une relecture rap d’un morceau funk 80’s de Mtume, qui en fait un morceau plus accessible et doux. Biggie y apporte des détails précis de son quotidien de la rue en les mixant avec ses expériences de jeunesse avec la culture du hip-hop. Le succès est immédiat. Les deux acolytes ont trouvé leur formule secrète.
C’est là que naît la légende avec ce son si particulier sur “Big Poppa”, à la croisée du son G-funk de Dre et Snoop, de la new jack d’Uptown et du rap purement new-yorkais de l’époque. C’est aussi à ce moment-là que Notorious B.I.G. dit ne plus écrire ses paroles sur le papier, mais uniquement freestyler dans sa tête avant d’entrer en cabine d’enregistrement.
À deux, ils ont inventé le blockbuster en forme de film d’auteur, entre Nas et Snoop, entre DJ Premier et Dr. Dre. Et, 26 ans après, le son est toujours aussi clair, limpide. Un véritable classique.