On sait tous que la société est encore, et depuis toujours, sexiste. Les femmes sont critiquées sur tous les aspects de leur vie : le corps, les cheveux, la voix, la féminité, la sexualité, et bien sûr, les vêtements. En fonction des âges et des mœurs, la définition de la “tenue correcte” féminine a beaucoup varié.
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Pendant un temps, le pantalon est exclusivement masculin. Les femmes, elles, le portent sous leurs jupes et il est appelé “pantalon de lingerie”. Pendant un autre temps, les jupes au-dessus du genou sont réservées aux femmes de “petite vertu”.
Et pendant des siècles, la société a dicté ce qu’une femme considérée comme “convenable” devait faire et porter. Et c’est pareil en politique. Dans l’imagerie encore très sexiste, la femme politique doit s’habiller sobrement et encore mieux, elle doit être en costume !
Mais la gent féminine ne s’est jamais laissé faire. Dans les années 1930, on tolère enfin les femmes en politique. Mais elles n’ont pas le droit d’enlever leur chapeau.
Les sous-secrétaires ne lâchent rien et enfin, elles gagnent le droit de se découvrir la tête dans les lieux politiques. Les changements sont lents. Et les femmes politiques sont constamment interrogées sur leurs styles vestimentaires. Questions qu’on ne poserait pas forcément aux hommes. Et plus les années passent, plus elles veulent se détacher de la féminité imposée.
En 1972, Michèle Alliot-Marie arrive devant l’Assemblée en pantalon. Le choc. Alors que des années plus tôt, les femmes adoptent ce vêtement synonyme de liberté de mouvement et de puissance, l’Assemblée leur interdit encore. Taquine, Mme Alliot-Marie assure que si c’est le pantalon qui gêne son entrée, elle peut l’enlever sur place.
À l’époque, il n’y a pas encore d’obligation paritaire et les femmes sont très minoritaires en politique. Alors, elles ne veulent pas faire de vagues et elles veulent être entendues et vues pour leurs idées, et non pour leurs tenues. Elles souhaitent se fondre dans la masse masculine, alors elles adoptent leurs codes vestimentaires. Beaucoup mettent des vestes et des pantalons sombres et celles qui n’adoptent pas ce style gardent les coupes droites et sobres. Comme Simone Veil, lors de son discours pour l’avortement, son chignon est strict, le collier de perles est discret, tout comme la tenue. Rien ne doit être superflu.
Au début des années 1990, Édith Cresson va venir chambouler tout ça. La première femme Premier ministre ne reste qu’un an à son poste mais ses tenues et vestes colorées vont ouvrir la voie, malgré les critiques acerbes et continuelles.
Peu à peu, les femmes politiques qui veulent et qui osent vont s’approprier la couleur. La société semble être prête pour le changement et semble vouloir mettre les femmes en avant. Les femmes politiques saisissent l’opportunité pour se démarquer et retenir l’attention. Les costumes sombres laissent la place aux tailleurs et les couleurs se font plus claires et flashy (hello, Roselyne Bachelot).
Les sexistes tolèrent la couleur chez les femmes politiques (et encore) mais tout le reste est très critiqué par le public ou hué à l’Assemblée. Comme Cécile Duflot, dont la robe à fleurs énerve l’hémicycle en 2012.
Aujourd’hui encore, les tenues des femmes politiques sont épiées à la loupe. Et tout écart à la norme leur est gravement reproché. Certaines tiennent tête et sont épaulées par une société teintée par toutes les luttes sociales et l’émancipation féminine. Mais beaucoup de femmes politiques ne veulent pas prendre de risque. Elles ne veulent pas que l’attention soit davantage portée sur leurs apparences physiques que sur leurs programmes. Alors, elles misent sur le costume.
À quand le vrai changement ? On attend avec impatience une femme Premier ministre en minijupe et talons aiguilles. Parce qu’on s’est assez battues pour que l’habit ne fasse pas le moine.