Mais finalement, c’est quoi le but de la performance artistique ?

Mais finalement, c’est quoi le but de la performance artistique ?

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© Bennett Raglin/WireImage/Getty Images

Sensibiliser son public par le biais de la performance : non, cet art n’est pas complètement incompréhensible.

Oui, on vous entend d’ici râler en disant que ces gens qui se roulent par terre et qui se jettent de la peinture à la tronche ne font aucun sens. Mais suivez-nous, nous allons vous mener sur le chemin de la compréhension, voire de l’amour, de la performance artistique. La performance est un art qui répertorie de nombreuses façons de la pratiquer. C’est pour cela qu’il ne faut pas se braquer : vous trouverez sûrement un type de performance ou un·e artiste en particulier qui vous séduira. La vraie question est de savoir pourquoi l’humain·e pratique l’art performatif ?

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L’art est en général un moyen de transmettre une émotion à travers une création. Dans l’art performatif, l’artiste utilise donc son corps à la manière d’un pinceau pour communiquer ses idées et sentiments. Il y a une sorte de hâte dans la façon de présenter ses émotions à vif, car tout passe par le corps et rend alors l’œuvre plus authentique. On se sert de soi-même pour toucher les autres et on préfère interagir autrement. Toute l’importance de la performance est là : agir autrement pour choquer, faire réagir ou toucher le public. Voilà pourquoi vous avez peut-être déjà eu l’occasion d’être interloqué·e face à une performance, puisque la sobriété et l’accessibilité ne sont pas forcément les mots d’ordre.

L’éphémérité et l’interaction avec le public

Le fait que cet art soit pratiqué par l’humain·e avec son propre corps rend la chose unique. Chaque performance est exceptionnelle, et c’est bien normal car l’artiste ne se représentera qu’une seule fois de cette manière. Les fois d’après seront forcément différentes : aucune performance, même s’il s’agit de la même œuvre jouée en boucle, ne se ressemble. Le caractère temporaire de cette démarche est d’ailleurs parfois voulu par l’artiste, qui ne souhaite laisser que le souvenir de son passage pour marquer les esprits.

L’imperfection est alors de mise, ce qui rend la performance d’autant plus charmante car elle expose l’humain·e avec ses failles et fragilités. Il n’y a donc pas de séparation entre le public et l’artiste, qui partagent le même espace et qui ont la possibilité de communiquer leurs énergies respectives à travers la pièce. Lors de certaines performances, l’artiste joue même de cela en interagissant directement avec son public. Ajoutant du dynamisme à l’œuvre, cette expérience immersive renforce les liens humains.

La performance, un art libérateur et politique

L’artiste pointe du doigt, dénonce, remet en question les conventions sociales, crie haut et fort en exagérant les traits pour faire réagir, revit une expérience qu’il veut partager au public qui pourra s’identifier. Avec cette forme de libération du corps, on en arrive à celle de l’esprit. On délie les langues par les mouvements effectués et aborde des sujets sensibles en évoquant parfois des problématiques sociétales. En utilisant son propre corps, l’artiste se met alors en scène pour interpeller son public et faire réfléchir sur tout type de sujets tels que la politique, l’écologie, l’identité, les discriminations…

Par exemple, le 2 juillet 2009, l’artiste Alice Newstead s’accrochait dans une vitrine d’une boutique de sels de bain, en association avec Sea Shepherd, dans le but de sensibiliser aux massacres de requins à travers le monde. L’artiste avait donc accroché deux hameçons pour requins dans son dos durant plus d’un quart d’heure afin d’interpeller les passant·e·s. C’est une démarche idéale pour appeler à l’empathie et pour faire prendre conscience de la souffrance vécue par les requins par le biais de son propre corps mutilé.

Dans A Noiva e o Boa Noite Cinderela, la performeuse Carolina Bianchi dénonce les violences sexuelles. La performance n’était accessible qu’aux personnes majeures car l’artiste consommait sur scène la prénommée “drogue du violeur” et laissait le public être témoin de la suite. Autre exemple : Alex Schweder et Ward Shelley ont présenté une roue de hamster à taille humaine lors de leur performance In Orbit, afin de questionner le rythme soporifique du “métro, boulot, dodo”. Les artistes tournaient dans cette roue infernale constituée de tous les objets du quotidien qui rappellent nos habitudes : un lit, une chaise, une télé, un bureau, une table… De quoi interroger nos routines. Si, justement, vous voulez sortir de votre routine, rien de tel qu’une bonne performance.