Les paroles des chansons de Young Thug pèseront-elles à son procès pour crime organisé ? Les débats de fond commencent lundi dans l’affaire visant cette figure très influente du rap américain.
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Le rappeur originaire d’Atlanta est accusé d’association de malfaiteurs et de participation aux activités criminelles d’un gang. À l’appui, des faits présumés de meurtres, trafic de drogue, vols de voiture… Il se dit innocent.
Avec une vingtaine de personnes, il a été inculpé en mai 2022 par un grand jury de Géorgie, État du sud-est des États-Unis, pour appartenance présumée à une branche du gang des Bloods identifiée comme Young Slime Life, ou YSL. Des initiales qui correspondent à celles de son label fondé en 2016, Young Stoner Life Records.
N’oubliez pas les paroles
L’arrestation en mai de l’interprète de “Best Friend”, “Hot” ou “Check” avait été un choc pour l’influente scène hip-hop d’Atlanta dont il est une figure centrale.
À 32 ans, le rappeur a collaboré avec les plus grands noms du rap et de la pop, de Drake à Travis Scott, en passant par Dua Lipa et Justin Bieber.
Les procureurs s’appuient, pour preuves, sur des paroles de certaines chansons de Young Thug, de celles d’un autre rappeur, Gunna (qui a passé un accord de plaider coupable) et d’un titre posthume de Juice WRLD, mort en 2019 d’une overdose.
Les audiences du procès ont pour l’instant été exclusivement consacrées à la sélection des jurés, une tâche extrêmement ardue, qui s’est étendue sur près de 11 mois.
L’affaire entre désormais dans le dur, avec au cœur du dossier 17 extraits des titres de Young Thug qui constituent, selon l’accusation, autant d’aveux des crimes dont le rappeur est accusé.
Ses avocats ont cherché à exclure ces paroles des pièces à conviction, affirmant que l’utilisation de couplets pourrait influencer injustement les jurés.
“Des confessions de fin de soirée” pour le procureur
Un argument défendu par de nombreux partisans de la liberté d’expression et acteurs de l’industrie musicale, qui craignent que cette pratique nuise à la créativité des artistes et affecte disproportionnellement les Afro-Américains.
“On ne parle pas ici de paroles de rap, mais de paroles de gang”, a rétorqué le procureur Mike Carlson. “Ce sont des confessions de fin de soirée.”
Ce n’est pas la première fois que des vers de hip-hop atterrissent dans une salle d’audience. La défense, qui insiste sur le fait qu’YSL n’est rien d’autre qu’un label artistique, a cité comme témoin un spécialiste du sujet, le professeur à l’université de Richmond, Erik Nielson.
Dans un entretien à l’AFP au début de l’année, cet expert affirmait que “cette question du rap dans les procès n’est qu’une nouvelle illustration d’un système qui s’acharne à emprisonner les jeunes hommes de couleur”.
“Si vous avez d’autres preuves, n’utilisez pas les paroles de rap”, a jugé M. Nielson. “Et si vous n’avez pas d’autres preuves, ne portez pas plainte.”
Le procès, qui se déroule dans le même tribunal d’Atlanta où l’ancien président Donald Trump sera bientôt jugé, verra défiler des centaines de témoins, dont les rappeurs T.I. et Killer Mike.