Habitué du festival, le dissident russe Kirill Serebrennikov était cette année présent pour la quatrième fois à Cannes avec La Femme de Tchaïkovski. Mais, en mai dernier, après plusieurs années d’interdiction de sortie du territoire russe, le réalisateur a enfin pu, pour la première fois, venir présenter son nouveau film en personne sur la Croisette.
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Il y dresse le portrait d’Antonina Milioukova, l’épouse du célèbre compositeur, et chronique un amour obsessionnel non réciproque qui a fait sombrer la jeune femme dans la folie. Comme annoncé dans un carton dès l’introduction du film, La Femme de Tchaïkovski est également une peinture de la société russe de la fin du XIXe siècle.
Avant ce film, Serebrennikov présentait à distance l’an passé l’explosif La Fièvre de Petrov et, en 2018, c’était la claque Leto. Une plongée dans l’âge d’or du rock soviétique toujours considérée comme son chef-d’œuvre, qui électrisait le festival et qu’Arte propose en replay sur son site jusqu’au 28 juin prochain.
“À l’aube des années 1980, la scène underground de Leningrad est en pleine ébullition. Tandis que la jeunesse s’échange sous le manteau les disques de chanteurs occidentaux, les musiciens obtiennent l’autorisation de se produire en public à condition de jouer dans un club contrôlé par l’État et de soumettre leurs titres au comité de vigilance du Parti. Mike, le leader du groupe Zoopark, et sa femme Natasha rencontrent Viktor Tsoï, un jeune rockeur en quête de reconnaissance…”
Avec Leto (“été” en russe), Kirill Serebrennikov chronique l’émergence de la scène rock soviétique par l’amitié artistique et la rivalité amoureuse de deux rockers de Leningrad, ville artistiquement très active au début des années 1980, dans un film à la fois vibrant et mélancolique, d’une inventivité folle.
Pour contrebalancer la potentielle austérité du noir et blanc, des concerts assis et de la censure en vigueur en URSS, le réalisateur a eu notamment recourt à l’animation en incrustant à l’image des dessins et coloriages en surimpression pour symboliser l’ébullition créative et la fièvre artistique de sa joyeuse bande.
Rythmé par des classiques du rock soviétique et des reprises d’Iggy Pop ou encore de Lou Reed, magnifiées dans de jolies scènes oniriques – les seules qui soient en couleur –, Leto est une superbe ode à l’âge d’or du rock.