Souvenez-vous, il y a 8 ans : Pharrell Williams débarque à la cérémonie des Grammy Awards avec un chapeau haut en couleur qui fait jaser pour son côté rigide et disproportionné. Le chanteur en avait fait ensuite sa marque de fabrique pour l’album GIRLS, en plein milieu de son énorme succès symbolisé par “Get Lucky” avec les Daft Punk et ” Happy” pour la BO de Moi, Moche et Méchant 2.
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Ce chapeau si iconique est signé Vivienne Westwood, la créatrice de mode britannique la plus transgressive de son époque, qui vient de nous quitter à 81 ans. Pharrell ne l’a pas mis par hasard. Ce chapeau représente en effet un pan de l’histoire de la musique et surtout du Hip-Hop. Notamment avec le compagnon de Vivienne Westwood : Malcolm McLaren.
Au début des années 1980, Malcolm McLaren est déjà un énorme influenceur de la mode et de la musique en Angleterre. Avec sa compagne Vivienne Westwood, ils bousculent les étiquettes et les clichés, notamment avec leur boutique londonienne Let it Rock créée dans les années 1970. Par ce biais, ils voyagent à New York et commencent à travailler énormément avec les excellents New York Dolls. Plus tard, c’est dans cette même boutique renommée SEX que se créent les Sex Pistols et une bonne partie du mouvement punk de la fin des années 1970. Malcolm McLaren devient le manager du groupe phare.
Quand le Punk rencontre le Hip-Hop
Peu de temps après, en 1981, Malcolm McLaren s’occupe du groupe Bow Wow Wow et lors d’une tournée aux États-Unis, il découvre les block parties d’Afrika Bambaataa et de la Zulu Nation à New York. Il y voit pour la première fois la technique du scratch et reste scotché au travail des DJs sur les platines. Complètement subjugué par cette nouvelle musique, il décide de rentrer à Londres et de faire son propre album mêlant scratchs, influences world music et sa vision du Hip-Hop.
Le premier titre de cet album se nomme “Buffalo Gals” et reste un des morceaux les plus influents de l’histoire du Hip-Hop, bien que créé par un londonien proche du mouvement punk. Dans le clip, on aperçoit les danses dingues du Rocksteady Crew, les collages radio de la Supreme Team mais aussi le style du moment de Malcolm, mélange de cow-boy, de trappeur et de fermier.
Et au milieu de tout ça, le fameux chapeau signé avec sa compagne Vivienne Westwood pour leur collection très justement nommée “Buffalo Girls”, chapeau qu’il ne quittera quasiment jamais pendant la promotion de cet album. Comme Pharrell. Les influences de cette collection sont diverses. Inspirée des voyages en Afrique et en Amérique du Sud du couple, son esthétique s’éloigne des codes classiques du Hip-Hop de l’époque à New York. C’est précisément ce décalage qui marque les esprits.
Pour faire composer le morceau “Buffalo Gals”, Malcolm McLaren fait travailler deux DJs très en vue de la radio de l’époque, The World’s Famous Supreme Team. Ils aiment le concept des scratchs que recherche l’imprésario anglais. Et qui marquera le monde entier, car samplé par Public Enemy, Neneh Cherry, J.Cole, Missy Elliott ou même Eminem.
Une oeuvre décalée qui va influencer le monde entier
Par la suite, Malcolm McLaren et la Supreme Team feront un album ensemble, Duck Rock, sorti en 1983 et produit avec les plus grands compositeurs d’avant-garde anglaise du moment comme Trevor Horn (derrière “Buffalo Gals”), Anne Dudley et J. J. Jeczalik (qui vont créer le concept The Art of Noise dans la foulée) et l’excellent Thomas Dolby.
L’album marque durablement une génération entière de jeunes au Royaume-Uni mais aussi à travers le monde, véritable porte d’entrée pour la culture Hip-Hop, comme le montre cette interview de Malcolm McLaren dans l’émission The Tube en 1982, expliquant le concept du scratch.
En choisissant de remettre ce chapeau au goût du jour, Pharrell Williams reprenait donc plusieurs références importantes de la culture pop en rendant hommage au travail de Vivienne Westwood et Malcolm McLaren, qui voyaient la mode et la musique totalement entremêlées, impossibles à dissocier.