Pour la première fois dans l’histoire du studio Disney, un personnage affiche clairement son homosexualité dans un film.
À voir aussi sur Konbini
Si certaines productions Disney ont déjà sous-entendu que certains de leurs personnages n’étaient pas hétérosexuels, la plupart du temps, les princesses finissent quand même par épouser des hommes et les princes se limitent à sauver les demoiselles en détresse. Mais les choses sont en train de changer. Alors que La Belle et la Bête est sur le point de sortir au cinéma, la production promet une scène “exclusivement gay”. Le personnage de Le Fou, l’acolyte de Gaston, incarné par la star de Broadway Josh Gad, aura donc droit à sa propre intrigue amoureuse.
C’est Bill Condon, le réalisateur du film, qui a fait cette révélation au magazine britannique Attitude, en déclarant :
“Le Fou est quelqu’un qui un jour veut être Gaston et veut l’embrasser le lendemain. Il ne sait pas ce qu’il veut. C’est un personnage qui réalise tout juste qu’il a ces sentiments. Josh en a fait quelque chose de subtil et réjouissant. Et, à la fin, cela paye. Mais je ne veux pas trop en dire. C’est un beau moment, exclusivement gay dans un film Disney.”
Le conte en lui-même fait aussi écho à la cause LGBT, évoquant les difficultés que connaissent aussi bien la Belle que la Bête quand il s’agit de s’intégrer et de trouver le bonheur dans leurs mondes respectifs. Par ailleurs, si Le Fou est le premier personnage de Disney ouvertement gay à l’écran, le film rend également hommage à un homme qui l’était en coulisses : Howard Ashman. Auteur de talent, il a longtemps travaillé au studio, et faisait partie de l’équipe de production de La Belle et la Bête en 1991. On lui doit, entre autres les chansons de La Petite Sirène “Under the Sea” et “Kiss the Girl” (que l’on connaît mieux de ce côté de l’Atlantique sous les titres de “Sous l’océan” et “Embrasse-la”) et les géniales “Friend Like Me” (“Je suis ton meilleur ami”) et “Prince Ali” dans Aladdin.
Le diagnostic du sida venait de tomber pour Howard Ashman quand il a commencé à écrire pour La Belle et la Bête. Il est malheureusement décédé huit mois seulement avant la première du dessin animé. Son travail chez Disney lui a valu trois nominations pour l’Oscar de la meilleure chanson originale. Il a remporté deux statuettes, dont une à titre posthume.
De nombreuses scènes musicales de La Belle et la Bête sont en réalité des allégories du combat que menait Howard Ashman à l’époque, et avec lui toute une génération frappée par l’épidémie du sida qui a tué des millions de personnes partout dans le monde pendant les années 1980-90.
Dans le passé, Disney avait déjà montré à l’écran des personnages LGBT friendly. Ursula, la sorcière de La Petite Sirène, était inspirée, sur les conseils de Howard Ashman, de plusieurs figures populaires de la communauté gay. Plus récemment, dans La Reine des neiges, la chanson d’Elsa “Libérée, délivrée” a tout d’un coming out. Cependant la scène annoncée dans le remake en live action de La Belle et la Bête marque une étape dans la normalisation de la représentation de l’homosexualité dans les films du studio.
Le rédacteur en chef du magazine Attitude, Matt Cain, a fait part de son optimisme sur la place accordée à la diversité dans les futurs projets de Disney :
“Le studio envoie un message sur ce qui est normal et naturel. Et c’est un message qui va être entendu dans tous les pays du monde, même ceux où il n’est pas socialement acceptable, voire illégal, d’être gay.
C’est un premier petit pas en avant vers la création d’un monde cinématographique qui reflète celui dans lequel beaucoup d’entre nous sont fiers de vivre. Mais c’est un pas dans la bonne direction et j’applaudis Disney pour avoir eu le courage de le faire, aidant au passage à changer les attitudes et à entraîner un vrai progrès social.”
Le Fou n’étant pas le personnage principal, son temps à l’écran sera limité. Mais alors qu’un long-métrage dont l’homosexualité est le thème central vient de gagner pour la première fois l’Oscar du meilleur film, on peut commencer à rêver de voir un jour prochain une princesse lesbienne.
Traduit de l’anglais par Sophie Janinet