Si la parole s’est considérablement libérée ces dernières années à Hollywood, l’omerta continue de régner sur le petit milieu du cinéma et des séries français. Chose rare, des technicien·ne·s de la fiction Netflix Jusqu’ici tout va bien ont témoigné dans une enquête de Mediapart, publiée ce dimanche, sur les conditions de tournage de cette saison 1 et sur l’ambiance délétère qu’aurait instaurée Nawell Madani, scénariste, réalisatrice, comédienne, productrice et showrunneuse du projet.
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Ces multiples casquettes – dont l’usage est un peu plus commun chez nous qu’outre-Atlantique — feraient partie des raisons données pour expliquer le comportement de l’humoriste belge. L’article fait notamment état de remarque homophobe envers une scripte lesbienne, d’équipes humiliées et devant s’adapter aux revirements inopinés de la réalisatrice ou encore de conditions de travail dangereuses et au mépris de la loi. Quelques mois plus tard, au moment de sa mise en ligne le 7 avril 2023, la série devenait le programme Netflix le plus regardé en France et culminait à 7,5 millions d’heures vues.
“Ce tournage n’a été qu’une souffrance”
Le tournage de Jusqu’ici tout va bien a débuté en janvier 2022, quelques mois seulement après que Nawell Madani a accouché, et a duré soixante-dix jours. Rapidement, selon les dires des témoignages recueillis par Mediapart, des tensions ont émergé. L’une des membres de l’équipe image raconte, plus d’un an après, les séquelles de cette expérience : “Quand je vois Nawell Madani, j’ai des nausées et la colère qui remonte. Ma psy dit que c’est du stress post-traumatique.” Une autre explique que “ce tournage n’a été qu’une souffrance”.
Toutes les personnes qui ont accepté de partager leur récit avec Mediapart l’ont fait sous la condition de rester anonymes, par peur des représailles, comme l’explique une autre technicienne : “J’ai encore peur d’elle et des conséquences que cet article peut avoir sur ma carrière. Elle connaît beaucoup de monde.” Pour ce membre de l’équipe son, chaque jour se déroulait dans le fracas et les cris :
“Les hurlements, c’était en permanence. J’allais bosser la boule au ventre tous les jours.”
D’autres ajoutent que Nawell Madani traitait tout aussi mal ses propres comédiennes, et une collaboratrice affirme même avoir dû consoler plusieurs fois l’une des actrices. De nombreux signalements ont été faits via une plateforme que Netflix met désormais à disposition de toutes les équipes de tournage, mais selon les dires des témoins, cela n’aurait servi à rien. Le géant du streaming a dépêché sur place un “référent” pour gérer la situation, mais ce dernier, à défaut d’assurer son rôle de médiateur, aurait préféré admirer Nawell Madani sur le plateau.
Ni Netflix, le diffuseur, ni Elephant Story, la société de production, n’ont souhaité réagir aux accusations très sérieuses soulevées par cette enquête.