Invader, star mondiale du street art, connu pour ses mosaïques, ouvre une partie de ses archives et expose dans un immeuble de neuf étages au centre de Paris. “C’est un lieu magique et la plus grande exposition jamais faite à Paris”, présente lors d’une visite à la presse Fabrice Bousteau. Le commissaire d’exposition se décrit comme “passif” tant Invader est un “control freak” : tout ce qu’on voit a été agencé par cet “obsédé du contrôle” qui cultive toujours secret et anonymat. “Ici, on a 3 500 mètres carrés, par comparaison au Centre Pompidou, pour un artiste vivant, c’est autour de 2 000 mètres carrés, et comme le dit Laurent Le Bon, président du Centre Pompidou venu ici, il y a plusieurs expositions dans l’exposition”, poursuit Fabrice Bousteau.
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La référence au Centre Pompidou n’est pas anodine. Un télescope permet de voir à 900 mètres à vol d’oiseau le 1 500e et dernier Space Invader installé à Paris, tout en haut d’un conduit d’aération du Centre Pompidou. Le dernier-né parisien est blanc, yeux et silhouette en rouge. Pour rappel, le premier à Paris, il y a un quart de siècle, était bleu, avec déjà les yeux en rouge. Pour cette exposition-événement, le choix de l’immeuble, près de la Place de la République, ne doit rien au hasard. “Invader aime bien revenir sur les lieux de ses crimes”, s’amuse le commissaire d’exposition.
Comme dans un jeu vidéo
L’édifice, un ancien garage, abrita un temps les locaux du journal Libération. En 2011, Invader avait envahi Libé en trafiquant toutes les lettres A des titres et débuts d’articles. L’artiste avait aussi profité du toit-terrasse composé de grosses dalles carrées pour réaliser un Space Invader géant aux couleurs du logo du journal, visible en prenant de la hauteur via l’application Google Earth. L’œuvre, usée par le temps et les intempéries, s’offre une nouvelle jeunesse pour l’exposition. Comme dans un jeu vidéo, chaque étage permet d’explorer un niveau différent autour de l’œuvre ou dans l’œuvre de celui qui a posé ses créations-signatures dans 32 pays et 188 villes.
La 4 000e a été installée en Bolivie à 4 000 mètres d’altitude. Près de 350 000 fans dans le monde se mesurent désormais sur l’application FlashInvaders, qui permet de connaître son classement à chaque Space Invader photographié. La première place revient à un chasseur d’Invader qui en a photographié plus de 3 400 sur moins de 4 200 répertoriés. C’est un pilote de ligne français devenu star dans la communauté des fans. “Invader Space Station”, jusqu’au 5 mai 2024, présente entre autres des “portraits” des Space Invaders, en plan serré, et des photos contextualisées, avec environnement et parfois passant·e·s autour de l’œuvre.
Toutes ces photographies sont prises par Invader lui-même. Il faut rappeler qu’il a posé en personne toutes ses œuvres, à l’exception de celle, sous-marine, au Mexique, installée avec l’aide d’un spécialiste des sculptures sous l’eau, et de celle dans la Station spatiale internationale, où une astronaute italienne l’a placée. L’exposition, dont la réservation en ligne est indispensable, est riche en surprises.
Comme cette pièce où un dispositif à base de séparateurs autoroutiers, baigné dans un son électro et sous lumières vives, renvoie au célèbre jeu vidéo à la charnière des années 1980, source de sa première inspiration. Un nouveau travail d’Invader sur l’image, à partir de figurines collectionnées, comme celles des Kinder Surprise, est aussi dévoilé. De nouvelles œuvres sont aussi présentées dans le cadre du projet d’Invader à base de pièces de Rubik’s Cube. Comme cette réalisation tirée d’une image du film 2001, l’Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick. “Invader Space Station” a pour initiales ISS : l’espace, on y revient toujours.