Arte propose en replay le documentaire Eau argentée, Syrie autoportrait, descente aux enfers hyperréaliste dans le quotidien des trois premières années de guerre en Syrie. On vous le recommande.
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Si ce n’est pas déjà fait, effectuez le test suivant : tapez “victimes guerre Syrie” dans Google. Les sources, nombreuses, renvoient vers des tas de données légitimées par des acronymes parfois mystérieux : ONU, HCDH, UNICEF, CICR, HRDAG mais aussi HRW, OSDH, CNS, VDC… Après cinq ans de guerre, le décompte des morts/disparus/blessés varie presque du simple au double. Bilan officiel : 260 000 morts. Selon d’autres témoignages, 470 000. Signe d’un conflit d’une violence inouïe, l’Onu a carrément arrêté de compter en 2014 et les médias européens ne s’intéressent plus au désastre régional que par le prisme des migrants.
Alors, lorsque les mots et les chiffres échouent à raconter l’horreur et le désespoir, il reste le cinéma ; il reste les images de manifestations réprimées dans le sang, d’exécutions, d’arrestations, de tortures, d’humiliations… Les corps qui jonchent les rues, les quartiers éventrés, les femmes qui pleurent leurs morts… On voit beaucoup, beaucoup de cadavres. Mais c’est ce qu’Ossama Mohammed, Syrien exilé en France, a décidé de montrer dans son documentaire Eau argentée, Syrie autoportrait, sorti en décembre 2014 et en replay pendant une semaine sur Arte.
La guerre au smartphone
Pour ce film, le cinéaste a collecté des images amateur, réalisées par des manifestants, des opposants au régime, de simples civils, des gardiens des geôles de Bachar Al-Assad et des soldats loyalistes. Ces images sont souvent filmées au téléphone portable, renforçant la terreur chez le spectateur.
Ossama Mohammed montre aussi les images captées par Wiam Simav Bedirxan, précieuse alliée restée en Syrie dont le prénom kurde signifie “eau argentée”. Armée de son désir viscéral de témoigner, elle filme l’enfer du quotidien à Homs, entre bombardements incessants, tirs dans la foule à balles réelles, snipers, arrestations, enterrements, lamentations, désespoir…
Par-dessus les images crues de “cette Syrie des tueurs et des victimes”, la correspondance poétique entre Ossama et Simav offre au spectateur la bouffée d’air nécessaire pour regarder ce film aux images barbares, parfois à la limite de la nausée, jusqu’au bout. Ossama Mohammed livre une fresque hyperréaliste option smartphones et réseaux sociaux, davantage un film de guerre ultracontemporain qu’une classique collection de témoignages. Une œuvre dure, mais indispensable.