Malgré la pandémie, une lutte acharnée entre deux films d’animation se déroule actuellement au Japon, où le phénomène Demon Slayer est en passe de battre le record national de recettes en salles détenu par Le Voyage de Chihiro du Studio Ghibli. Demon Slayer, dont le succès au cinéma ne se dément pas depuis sa sortie au Japon mi-octobre, talonne actuellement le chef-d’œuvre de Hayao Miyazaki (2001), après avoir dépassé le Titanic de James Cameron (1997).
Un rebondissement quasi hollywoodien vient cependant de perturber l’ascension inexorable du nouveau venu : mardi, les recettes du Voyage de Chihiro au box-office nippon ont été réévaluées à la hausse pour tenir compte de sa ressortie en salles cet été. Avec 31,7 milliards de yens (252 millions d’euros) de recettes, Le Voyage de Chihiro garde ainsi son trône pour l’instant, alors que Demon Slayer, toujours en salles, affichait 30,3 milliards de yens lors de la dernière mise à jour du classement du box-office lundi.
Demon Slayer raconte l’histoire de Tanjiro, un adolescent vivant au Japon à l’ère Taisho (1912-1926), qui devient chasseur de démons après le massacre de sa famille par ces créatures assoiffées de sang humain. L’œuvre combine le parcours initiatique du héros, un thème récurrent des mangas pour adolescents, avec des valeurs positives comme l’amour fraternel, l’amitié et la lutte du bien contre le mal, qui ont réchauffé le cœur des spectateurs japonais en pleine pandémie.
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Un bouche-à-oreille efficace
Le manga à l’origine de Demon Slayer, publié dans l’hebdomadaire Weekly Shonen Jump de 2016 à 2020, a encore gagné en popularité avec la diffusion en 2019 d’une adaptation en série animée. Puis ses ventes en librairie se sont envolées au printemps dernier, quand la population japonaise était appelée à rester chez elle à cause de la pandémie. Cette œuvre a ainsi réussi à séduire aussi bien les enfants que les adultes, qui avaient beaucoup de temps et disposaient d’un pouvoir d’achat plus important, a estimé Mme Ijima lors d’une récente conférence de presse.
Enfin le long-métrage, dont le lancement était initialement prévu au printemps, est sorti en octobre, “au moment où régnait un certain sentiment de sécurité” au Japon, avec un nombre de cas de contaminations quotidiens en relative baisse, a encore relevé la chercheuse.
Pour Kei, un jeune homme de 25 ans venu voir cette semaine le film à Tokyo avec sa sœur, “son succès est dû à la beauté et à la singularité de l’animation. C’est vraiment créatif”, déclare-t-il à l’AFP. Plus loin, un groupe d’amies explique avoir voulu voir le film car “tout le monde en parle” au Japon, tout en assurant ne pas craindre d’attraper le Covid-19 au cinéma.
L’effet est amplifié par le bouche-à-oreille et une habile campagne marketing. Des partenariats avec des marques, magasins et restaurants rendent le film omniprésent dans la vie des Japonais. Le choix de voix connues pour le doublage des personnages et les chansons entêtantes de la bande originale ont également contribué à son succès.
Le film, qui a déjà réalisé plus de 22,5 millions d’entrées au Japon, est aussi déjà diffusé ailleurs en Asie. Il est attendu l’an prochain aux États-Unis et en Europe. Le phénomène en salles a aussi bénéficié à l’œuvre originale : de longues files d’attente se sont formées devant les magasins début décembre à la sortie du 23e et dernier tome du manga, dont l’ensemble de la série a déjà tiré à plus de 120 millions d’exemplaires.
Traduit en 14 langues et disponible dans 33 pays et régions, selon sa maison d’édition Shueisha, il connaît aussi le succès à l’étranger. Selon l’institut de recherche Dai-ichi Life, la franchise aurait déjà généré 270 milliards de yens (2,1 milliards d’euros) en prenant en compte entrées en salles, ventes de mangas et produits dérivés.
Konbini avec l’AFP