Qu’on se le dise, il était temps ! Après un an et demi de disette de concerts et de festivals, les affaires reprennent. Et quitte à retrouver le chemin de la foule et de la musique en live, autant voir les choses en grand. C’est pour ça qu’on a choisi de se rendre au Festival Marsatac à Marseille, un événement musical et une institution incontournable de la cité phocéenne.
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Pour la petite histoire, voilà 22 ans que le festival fait le bonheur des Marseillais fans de musiques électroniques. Une harmonie entre hip-hop et techno entamée en 1999, mais mise à mal par, comme dirait ce cher Renaud, un connard de virus. Et oui, le festival, aussi historique soit-il, n’a malheureusement pas échappé à la vague d’annulations provoquée par la crise sanitaire mondiale du Covid-19.
La renaissance de Marsatac
Touchées au cœur, comme bon nombre de leurs confrères de l’événementiel, après l’annulation de l’édition 2020, les équipes de Marsatac ne se sont pas laissées abattre pour autant. Pleines d’entrain, elles se sont adaptées et ont tout mis en œuvre pour revenir plus fortes cette année. Dans le respect des consignes sanitaires strictes du gouvernement bien entendu. Béatrice Desgranges, directrice du festival depuis la première édition, nous raconte : “Ce n’était pas facile, loin de là, mais on s’est battus jusqu’au bout avec les équipes pour défendre les valeurs du festival, tout en le réinventant. On l’a fait et on est très fiers.”
Après un premier report de la date et un line-up remanié par trois fois, l’édition Capsule de Marsatac a donc finalement eu lieu du 20 au 22 août. Pour la première fois de son histoire, le festival a posé ses valises au Parc Borély, ce grand espace vert du sud de la cité phocéenne, situé dans le huitième arrondissement de Marseille, à quelques minutes de la plage et des calanques. Un véritable coin de paradis où se sont réunis plus de 13 000 festivaliers pendant trois jours sous un soleil de plomb : “Nous offrir ce lieu c’est la reconnaissance de Marseille pour ce que le festival a apporté à la ville et à la musique”, s’est réjouie la directrice.
Au menu de cette 23e édition, un savant mélange entre talents émergents et têtes d’affiche incontournables. Cette année, au total, 24 noms ont été programmés, dont 10 artistes féminines et 50 % d’artistes marseillais. Entre autres, Sébastien Tellier, roi français de la New Disco, Princesse Nokia, Poupie, Alonzo, Sofiane, Naps, Soso Maness et PLK. Armés de notre pass sanitaire en règle, on y était pour les deux jours consacrés au rap. C’était magnifique et c’est le cœur empli d’émotions qu’on vous raconte les meilleurs moments.
La relève est assurée
Covid oblige, le festival, historiquement autant ouvert aux découvertes qu’aux têtes d’affiche internationales, a été contraint cette année de proposer une programmation quasi uniquement française. La seule artiste internationale de cette édition capsule, c’était Princesse Nokia, la rappeuse américaine d’origine afro-boricua principalement connue pour ses titres “G.O.A.T” et “Tomboy”, mais aussi pour sa splendide performance au Colors Show l’année dernière. Déjà présente sur le line-up de 2017, elle a de nouveau fait rayonner son style et son charisme sur scène, au point de mettre tout le monde d’accord.
Parmi les nouveaux artistes locaux mis en avant par le festival, on trouve notamment Tessae, chanteuse marseillaise pleine de talent. Évidemment pour elle dont la carrière démarre, c’était un grand moment : “Il y a deux ans, je commençais à peine à chanter, j’étais à Marsatac en tant que festivalière. Cette année, je suis montée sur la grande scène, c’était complètement incroyable pour moi !”, s’émerveille l jeune artiste de 21 ans. On vous parlait déjà d’elle il y a deux ans dans notre sélection des artistes à moins de 10 000 vues que vous deviez connaître. Déjà à l’époque, on était sûr de son talent, mais après sa performance, on en est définitivement convaincu : Tessae a l’étoffe d’une future reine de la chanson. Vous verrez, quand elle sera au sommet, vous pourrez dire que vous l’avez lu ici en premier.
On continue dans les étoiles montantes avec Poupie. Forte d’un cocktail musical trilingue mêlant hip-hop, trap, pop et reggaeton en français, anglais et espagnol, elle s’est offert la meilleure des vitrines avant la sortie de son premier album, Enfant Roi, prévu pour septembre. Un projet sur lequel figurera d’ailleurs “FEUX”, sa collaboration brûlante avec Jul : “Je suis une pile électrique plutôt excentrique, spontanée et naturelle, mais mon album qui arrive montrera une facette bien plus profonde, posée et pensive de moi”, prévient-elle. Ok Poupie, c’est noté !
Les grosses têtes d’affiche au rendez-vous
Bien évidemment, le gros du public était surtout présent pour retrouver les stars du game à l’affiche, Sofiane, Alonzo, Naps, Soso Maness et PLK. Si voir ses gros noms réunis sur un même événement fait évidemment plaisir, on ne peut s’empêcher de regretter la reformation avortée des Psy 4 de la rime sur la scène de Marsatac. Pour rappel, ce concert unique était initialement prévu pour l’édition annulée de 2020. Un rendez-vous manqué mais Alonzo espère quand même que ce sera partie remise : “L’année prochaine, ça sera les vingt ans de notre premier disque avec les Psy 4. Il n’y a rien de prévu pour l’instant car on a tous nos carrières solo, mais on espère…” En voilà une belle idée pour Marsatac 2022 ! D’autant que les Psy 4, aux côtés de la Fonky Family, du 3e Œil, et d’autres formations musicales historiques made in Marseille, étaient déjà à l’affiche de la première édition. On dit ça, on ne dit rien…
Mais là tout de suite, cessons de rêver et revenons à la réalité. Car elle aussi est belle tant Alonzo a su faire le show en solo. Seul sur scène, le Capo de Capi a brillé pour le plus grand plaisir de son public venu surtout savourer ses plus gros morceaux sortis entre 2015 et aujourd’hui. Surprise notable pendant son set : Naps l’a rejoint sur scène pour interpréter son couplet de “Bande Organisée”. Ce n’était que l’apéritif puisque le rappeur marseillais originaire du quartier Air Bel a repris le micro quelques heures plus tard pour son propre concert. Évidemment, il n’a pas manqué de jouer son morceau multi-platine, “La Kiffance”, en clôture de soirée, devant un public survolté et entièrement rallié à sa cause : “Okaaaaay, c’était le feu !”, nous a confié Naps à sa sortie de scène.
Évidemment, juste avant, Fianso a lui aussi fait le job en faisant jumper Marseille au rythme de ses plus grands classiques. Et comme on l’a suivi de près dans les coulisses de son concert, on vous invite si vous le souhaitez, à revivre son expérience par ici. Mais après la lecture de ce debrief, car le meilleur est encore à venir… Le plus gros morceau du festival avait effectivement lieu lors de l’ultime soirée du dimanche, avec la présence coup sur coup de Soso Maness et PLK. C’est le rappeur de Font-Vert qui a ouvert le bal des têtes d’affiche ce soir-là. Au sommet de sa notoriété depuis l’année dernière, le rappeur était forcément très attendu. Ça tombe bien parce qu’avant de monter sur scène, il est apparu conquérant et avait de l’énergie à revendre : “C’est Marsatac, toute ma vie j’ai vu des affiches collées dans Marseille et aujourd’hui je le fais, à domicile, c’est incroyable !”
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Conscient que c’était son moment, il a évidemment tout donné sur scène. Si le rappeur a fait vibrer le public au son de ses plus gros hits comme “So Maness” ou son fameux “Zumba Cafew”, son concert était indéniablement à placer sous le signe de la ferveur et de l’émotion. Entre deux sons de tambours et les chants de supporters de l’OM qui donnaient l’impression de revivre les plus gros matchs au stade Vélodrome, il a notamment fait entonner à tout le public du festival “La Chanson des Enfants des Quartiers Nord”, ce morceau riche d’histoire qu’il sample dans l’introduction de son album Mistral.
Le moment était déjà intense, mais ce n’est rien comparé à ce qu’il a vécu ensuite en partageant un moment de musique, d’amour et de tendresse sur scène avec sa fille de deux ans. Il raconte : “Monter sur scène avec ma fille et ma femme, c’est quelque chose de magnifique. J’ai voulu le faire ici car je ne sais pas où je serai demain. La carrière d’un artiste peut être éphémère donc je voulais vivre ce moment au moins une fois en famille et le partager avec le public.”
Et puisqu’on parle de transmission d’héritage et de partage avec le public, Soso a créé la surprise en invitant sur scène Sat L’Artificier, éminent MC de la Fonky Family pour une interprétation d’anthologie du classique de la FF “Art de Rue”. Un grand moment et l’occasion également de se rappeler que le mythique groupe de rap marseillais avait déjà marqué l’histoire de Marsatac, en se reformant une ultime fois sur scène en 2017, à l’occasion de la dix-septième édition.
Ok, Soso Maness, c’était complètement dingue, mais celui que tout le monde attendait plus que les autres n’était pas marseillais. Vous l’avez deviné, on parle bien du rappeur parisien franco-polonais, PLK, déjà programmé lors de l’édition 2016 avec son groupe Panama Bende. Son ascension éclatante sur le rap game l’a mené cinq ans plus tard à devenir LA tête d’affiche du festival.
Discret dans ses apparitions publiques et conscient de l’attente qu’il suscitait chez ses fans venus de toute la France pour le voir, Polak n’a pas déçu. Dans une forme olympique et accompagné de son soc Ormaz, il a enchaîné ses classiques d’hier et d’aujourd’hui à une cadence effrénée, en captant l’énergie brûlante d’un public en effervescence.
L’explosion est arrivée en toute fin de concert. Forcément, avec Soso Maness et PLK à l’affiche le même soir, il était impossible pour eux de manquer l’occasion d’interpréter pour la première fois ensemble sur scène, leur méga-hit, “Petrouchka”. La magie a bien eu lieu lorsque le Marseillais est remonté sur scène pour clôturer le festival en apothéose. Attrapé à chaud juste avant son retour en loges, Soso, tout en second degré et avec l’adrénaline, n’a pas pu cacher son émotion après cette performance : “Franchement, c’était nul et le morceau il est bidon… Tu déconnes ou quoi ? Faire ce morceau sur scène avec Polak, chez moi en plus, c’est un truc de fou !”
Finir trois jours de festival avec une telle frappe, il fallait oser, Marsatac l’a fait. Rien que pour ça, mais aussi pour tout le reste, on peut affirmer haut et fort un retour réussi. Une fois remis de leurs émotions après cette perf croisée de Soso et PLK, les Marseillais pourront une fois encore être fiers de scander leur devise préférée : “À jamais les premiers.”