Le cinéma WTF, entre navets et nanars, a été célébré pendant cinq jours au CutreCon, un festival qui se déroule dans les salles obscures de Madrid.
À voir aussi sur Konbini
On parle toujours de Cannes, Sundance, Berlin ou de la Mostra de Venise. Mais Madrid vient de frapper fort, question cinéma : la capitale a organisé un festival qui met à l’honneur les nanars, les films les plus mauvais, devenus cultes pour cette même raison. La sixième édition de CutreCon, qui a cette année été dirigée par le journaliste culturel Carlos Palencia, s’est déroulée la semaine dernière, du 25 au 29 janvier.
Quelque 3 500 spectateurs se sont rendus au festival. On a demandé à Régis Brochier, cofondateur du site Nanarland et réalisateur de la websérie Nanaroscope ! pour Arte Créative, son point de vue sur CutreCon, l’équivalent espagnol de son site ultra-culte dédié aux “mauvais films sympathiques”.
Konbini | CutreCon est un festival rare, car original et décalé. En tant qu’expert dans le domaine, quel est votre point de vue sur cette manifestation ?
Régis Brochier | Pour y avoir été lors de la précédente édition, afin de tourner des séquences pour notre websérie Nanaroscope !, c’est un excellent festival. Ce qui est génial, c’est qu’ils font les choses très sérieusement, mais sans se prendre au sérieux. Ils respectent beaucoup les films qu’ils projettent. On y rigole, forcément, mais on fait aussi connaissance avec les films, et ceux qui les ont confectionnés, via des présentation aussi marrantes que bien documentées. Ils arrivent à attirer des invités, acteurs ou réalisateurs, qui jouent le jeu, viennent parler de leurs films et rire avec le public.
Quel est votre regard sur la programmation ?
À Nanarland, on s’est bien reconnus dans la programmation : ils ne font pas de concession. Ils ne programment que des nanars de puriste, qu’on trouve dans des circuits de distribution pointus. Ils font donc la part belle à des films exclus des salles de cinéma, des chaînes de télévision, des vidéoclubs survivants ou des plateformes VOD.
Je ne sais pas ci cet événement peut avoir un impact sur le cinéma. En tout cas pas comme on l’entend souvent quand on parle de festivals mainstream, ces gros barnums qui servent aussi à assurer la tournée promo d’acteurs ou de réalisateurs, et qui peuvent garantir le succès d’un ou plusieurs films. Si ce formidable festival a un impact, c’est dans la démarche de redonner une vie à des œuvres oubliées, de les faire (re)découvrir dans la meilleure qualité possible, et surtout la meilleure ambiance qui soit. C’est déjà énorme et ça relève d’une vraie démarche cinéphile !
Pour aller plus loin, on vous propose un échantillon de la programmation :
Virus cannibale – 1980
Le cinéaste italien Claudio Fragasso était la grande star de ce festival. Virus cannibale (coréalisé avec Bruno Mattei) a été projeté la même soirée que Troll 2, classique de 1990 qu’il était venu présenter. Comme le nom l’indique, le spectateur doit faire face à du sang et de la chair humaine. Le genre du film de zombies est revisité sur une musique bien rock’n’roll signée Goblin.
The Apple – 1980
Sexe, drogue et chorégraphies délirantes : ce film futuriste irrésistiblement kitsch, réalisé par Menahem Golan, porte un regard aiguisé sur le monde du spectacle. The Apple suit un couple de chanteurs pris dans les filets d’un producteur tyrannique décidé à faire d’eux des stars.
Remake, Remix, Rip-off – 2015
Remake Remix Rip-Off Trailer from MONOLIT on Vimeo.
Cem Kaya signe un documentaire sur un certain âge d’or de la Turquie dans le domaine du cinéma. Durant la décennie 1960-70, le pays faisait partie des premiers producteurs mondiaux de films. Remake, Remix, Rip-off propose un regard sur cette période prospère durant laquelle le cinéma turc adaptait à sa sauce les œuvres pop de la culture occidentale, des westerns aux super-héros Marvel en passant par Zorro.
Retrouvez juste ici la programmation complète du CutreCon.