Le dernier film de Roland Emmerich va loin dans le n’importe quoi mais n’oublie jamais de rester divertissant, pour un résultat qu’on peut trouver, au choix, drôle ou embarrassant.
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Vingt ans après le premier opus, Independence Day : Resurgence se situe à mi-chemin entre le blockbuster moderne post-Transformers et l’hommage décomplexé aux séries B les plus cheesy des années 1990.
C’est l’un des nanars les plus flamboyants de l’année, impossible à prendre au sérieux. Il s’inscrit dans la grande tradition des films estivaux qu’on peut regarder le cerveau éteint. Il se pose devant nous comme un très gros film de cinéma pop corn, un mélange fascinant de bêtise et d’ambition.
Saccagé par la critique depuis sa sortie américaine à la fin du mois de juin, Resurgence ne peut pas être considéré comme une déception, en toute honnêteté : il tient exactement les promesses de ses trailers et se place comme une suite très fidèle au précédent film, avec davantage de second degré.
Un cortège d’influences
En clair, cet Independence Day nouvelle formule peut être critiqué sur les mêmes points que le long-métrage de 1996 : il manque totalement de finesse et regorge de courageux héros américains, jusqu’au président lui-même, face à des extraterrestres unidimensionnels. Le synopsis est limpide : ayant reçu un appel de détresse à l’époque de la première invasion, un nouveau vaisseau alien encore plus grand que les précédents recouvre de son ombre un bon quart de la planète Terre, dans le but de la détruire expressément. C’est très efficace, mais l’humanité était (un peu) préparée et tente de résister à l’aide des technologies récupérées sur les vaisseaux abattus dans le film original…
On trouve ici l’une des bonnes idées de Resurgence, qui se situe dans un monde parallèle pas si éloigné du nôtre, mais futuriste et profondément marqué par l’invasion précédente. D’une manière plutôt simpliste, les grandes nations se sont donc associées sous une même bannière pour concentrer leurs efforts, histoire de former des troupes, construire des vaisseaux spatiaux et une jolie base lunaire — une solide organisation qui ne suffira pas, bien entendu, à repousser les méchants. Il faudra pour cela la participation combinée d’anciens personnages et de nouvelles têtes (Liam Hemsworth en chef de file), et encore, ce sera un peu juste.
Même s’il reste avant tout une production Roland Emmerich (Le Jour d’après, 2012…) — les impressionnantes scènes de destruction urbaine en images de synthèse portent bien la signature du réalisateur allemand — le film étale au grand jour un cortège d’influences récentes : il rappelle Pacific Rim dans son postulat de départ et son attitude globale, il évoque Transformers 3 (aïe) dans ses passages sur la Lune et sa conception des extraterrestres semble vaguement inspirée d’un mélange entre Aliens et Starship Troopers. On y décèle même une touche d’esthétique bleutée à la J.J. Abrams, et on pense beaucoup à District 9 au détour d’une scène se déroulant sous un vaisseau-mère alien désactivé en Afrique.
Le portrait robot du blockbuster de 2016
Par bien des aspects, Independence Day : Resurgence dresse le portrait robot du blockbuster contemporain type, cochant tellement de cases dans la catégorie qu’on ne peut pas s’empêcher de les énumérer :
- Réactualisation d’une vieille licence pour faire vibrer la corde nostalgique : les années 1990 ne sont jamais loin, incarnées notamment par un Jeff Goldblum au sommet de son art, et l’ombre de Will Smith (absent du projet) plane régulièrement sur le film.
- Beaucoup de personnages et un casting international : en témoigne la présence d’acteurs chinois (une forte tendance récente des blockbusters hollywoodiens, afin de faire plaisir au marché chinois) et cette arrivée hallucinante de Charlotte Gainsbourg au beau milieu de la cambrousse africaine.
- Au moins un jeune couple d’acteurs BG au premier plan : ici, il s’agit de Liam Hemsworth et Maika Monroe (vue dans It Follows) qui font très bien le job.
- Des personnages féminins actifs : même si les personnages masculins sont toujours mieux mis en avant, cet Independence Day contient quand même une présidente des États-Unis, une chercheuse et plusieurs femmes pilotes.
- Beaucoup d’effets numériques, un peu d’effets pratiques : comme dans un Marvel, le gros des scènes d’action est assuré par un déluge d’images de synthèse (avec au moins une scène aérienne très chargée, parce qu’on sait le faire), mais on voit aussi passer quelques aliens fabriqués à la main pour faire bonne mesure.
- Dispo en 3D et en 2D : avec une intro conçue pour rappeler immédiatement que les lunettes servent à quelque chose, mais pas trop insistante sur les effets de relief non plus.
Résultat, on a parfois un peu l’impression que le film suit attentivement une recette notée cinq étoiles sur Marmiton, mais il garde heureusement des spécificités bien à lui. Bête comme un Michael Bay (à l’ancienne, il fait même vraiment passer les Américains pour des imbéciles qui tirent d’abord et réfléchissent ensuite) Independence Day : Resurgence sait néanmoins cadrer son action et n’oublie jamais de rester lisible et agréable à regarder.
Quand bien même il annonce visiblement un troisième opus, il reste un film entier avec un début et une fin en apothéose (aussi ridicule que prévu) plus qu’un épisode noyé dans une série. Un peu décousu, il ne cherche pas à jouer au plus malin, assume parfaitement sa nature de pur divertissement et, franchement, c’est déjà pas si mal.