“Le secret de la longévité ? L’eau, le fromage et le vin !” ; “Comme les hommes ne sont pas tous bons, il ne faut pas se précipiter pour se marier” ; “Je ne mange pas de sucreries ; le plaisir que procure une dose de sucre est infime comparé au bonheur d’être en bonne santé” ; “Le secret ? Rire, rire et encore rire ! […] Sois actif, sors, fais la fête, danse, joue de la musique et embrasse la vie !”. Voici quelques-uns des conseils récoltés par la photographe Arianne Clément au fil de ses voyages à travers les “zones bleues”, “ces endroits qui sont réputés pour la vitalité et le bien-être de leurs aïeuls”, explicite-t-elle.
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L’artiste, qui se décrit comme une “photographe d’aînés”, a rencontré des centenaires vivant dans la péninsule de Nicoya, au Costa Rica ; dans l’archipel d’Okinawa, au Japon ; en Sardaigne, en Italie ; dans la communauté religieuse des adventistes du septième jour de Loma Linda, en Californie, et sur l’île d’Icarie en Grèce. Dans ces endroits, précise Arianne Clément, l’espérance de vie est “exceptionnellement longue, non pas parce que ces gens auraient gagné à la loterie de la génétique, mais plutôt en raison de leur mode de vie”.
Hamako Kikuyama, 92 ans, village d’Onna-son, archipel d’Okinawa, Japon : Je suis très sociale et très occupée. J’ai beaucoup d’amies avec qui je fais de nombreuses activités. Nous effectuons des exercices aérobiques, des parties de golf, de la peinture, de la cuisine, de tout. Je suis aussi fermière et je vends mes produits au marché. Quand j’étais plus jeune, j’étais à l’emploi d’États-Uniens, dans le domaine du tourisme ; je vendais des billets de croisière. Lorsque j’ai pris ma retraite, à 70 ans, je m’ennuyais alors j’ai décidé de me lancer en agriculture pour me garder occupée et pour rencontrer des gens. Quand j’étais jeune femme, c’était la guerre ici. Les soldats états-uniens avaient réquisitionné notre maison, la plage était remplie de bateaux de guerre et il y avait des mines antipersonnel partout. Avec ma famille, nous nous étions creusé une cache dans les montagnes pour nous y réfugier, mais nous n’avions rien à manger. Ma grande sœur allait dans les villages pour voler des patates douces dans les jardins. C’est comme ça que nous avons survécu. C’est difficile pour moi d’aborder ce sujet car cette période a été tellement douloureuse. Mais je n’ai pas de ressentiment envers les États-Uniens ; après tout, ils m’ont donné un emploi. Cela dit, je suis préoccupée par le conflit entre le Japon et la Corée du Nord. Il faut à tout prix éviter une autre guerre. Il y a beaucoup de délinquance juvénile sur notre île et ça m’inquiète pour mes petits-enfants. Chaque fois que je regarde le lever du soleil, je prie pour eux ; même si je ne suis pas religieuse, je prie. (© Arianne Clément)
Les rencontres photographiques menées par l’artiste ont eu lieu entre 2017 et 2019. Elles revêtent une forme d’enquête bien qu’elles aient été effectuées de façons très différentes, note-t-elle : “Je suis restée au Costa Rica presque deux mois, ce qui m’a permis de passer beaucoup de temps avec mes modèles, de les voir plusieurs fois et de développer avec eux une profonde amitié. J’ai même habité quelque temps chez un centenaire qui avait proposé de m’héberger. À l’inverse, au Japon, j’ai dû faire appel à une interprète qui a organisé toutes mes rencontres avec les aînés. Le cadre était strict ; nous avions 50 minutes pour prendre les photos et faire une entrevue“.
“Dans tous les cas”, insiste-t-elle, elle avait chevillée au cœur l’intention de “créer un lien sincère” en faisant “preuve de transparence quant à [ses] intentions” en démontrant au modèle “de l’intérêt pour son histoire” tout en transmettant “beaucoup de respect et de chaleur humaine”. Une fois sur place, Arianne Clément improvisait les séances, réalisées “en lumière naturelle en utilisant les éléments accessibles sur place (outils, accessoires, vêtements, etc.) à la manière de la photographie documentaire”.
Francisca Paula Obando Angulo, 99 ans, Los Jocotes, péninsule de Nicoya, Costa Rica : Voici mes conseils pour vivre 100 ans : il faut se nourrir d’aliments simples et entiers, bien mastiquer, bien dormir, se soigner avec des plantes et des produits naturels, éviter les conflits et ne jamais parler en mal des autres. Je conseille aussi aux jeunes de poursuivre leurs études. Mon plus grand regret est de ne pas avoir eu d’éducation. Si j’avais pu, je serais devenue infirmière ou violoniste. Toute ma vie, la pratique de la danse traditionnelle costaricaine a été une grande source de bonheur. Quand j’ai arrêté de danser, je me suis débarrassée de toutes mes robes sauf d’une. C’est avec cette belle robe blanche que je souhaite être enterrée. (© Arianne Clément)
Un projet intense
Ces deux années de rencontres ont profondément bouleversé la photographe et son mode de vie, qu’elle a changé assez dramatiquement, glisse-t-elle : “Ma famille et moi avons déménagé à la campagne sur un petit domaine surnommé ‘la petite zone bleue’. Nous tentons d’y mettre en pratique les enseignements des zones bleues ; nous avons adopté une diète essentiellement végétale, nous travaillons beaucoup à l’extérieur pour l’entretien de notre jardin et de notre terrain, nous tâchons de ralentir autant que possible pour profiter de la vie. Nous pratiquons plusieurs formes d’arts (musique, peinture, sculpture) et nous avons adopté la pratique d’une forme de shabbat non religieux pour nous ‘obliger’ à prendre une journée de repos par semaine. Plus que jamais, le message des aînés est précieux ; ceux-ci vous invitent à simplifier, à suivre le rythme de la nature, à prendre soin des autres, à cultiver la bienveillance et le contentement…”
C’est pendant le confinement, alors qu’elle pensait à toutes les vieilles âmes rencontrées les trois années précédentes, qu’Arianne Clément a décidé d’exposer son travail sur les zones bleues, intitulé “Comment vivre 100 ans” près de chez elle, dans la région canadienne de Montérégie : “Alors que le monde était plongé dans un chaos sans pareil, je les imaginais là, mes aînés des zones bleues.” Les grands portraits en noir et blanc des centenaires sont présentés entre les arbres et les feuilles, dans une “majestueuse forêt primaire”.
Hiroko Touyama, 98 ans, village de Nakijin-son, archipel d’Okinawa, Japon : J’ai eu deux professions : éleveuse de vers à soie et enseignante de calligraphie. Il faut méditer longuement avant de choisir son métier et lorsque l’on choisit, il faut persévérer et travailler avec acharnement. Aujourd’hui, je pratique encore la calligraphie pour le plaisir, je cultive des fleurs, j’écris chaque jour dans un journal et je vais souvent au camp de jour pour aînés. J’ai un bon tempérament ; je suis toujours de bonne humeur, coopérative et pacifiste. La guerre a été infiniment traumatisante pour moi et, si je pouvais m’adresser aux politiciens, je leur dirais ceci : s’il vous plaît, évitez la guerre à tout prix. Trouvez des solutions, des compromis, reculez devant l’ennemi, tout, mais plus jamais la guerre. (© Arianne Clément)
La photographe jugeait crucial d’installer ses portraits dans la nature, afin d’honorer les paroles et conseil des seniors, mais aussi afin de “tenter un parallèle entre les derniers vestiges de forêt primaire en Montérégie – une région du Québec fortement transformée par l’agriculture et l’urbanisation – et les zones bleues, derniers vestiges de modes de vie menacés par la modernisation et les changements climatiques”.
“Cela exprime également une inquiétude vis-à-vis des changements climatiques qui frappent la planète, incluant les zones bleues qui se situent sur des territoires menacés aujourd’hui par la hausse du niveau des océans, les canicules et les incendies de forêt qui en résultent. Par exemple, en juillet 2023, des records de chaleur ont été atteints en Sardaigne avec des températures de 48 degrés Celsius et de nombreux villages ont été évacués en Icarie à cause des incendies qui dévastent la région. Mes portraits sont confrontés aux aléas de la météo et aux intempéries, qui font en sorte que la dégradation à venir des œuvres prend également part au processus artistique de cette exposition.”
Giacobba Lepori, 104 ans, Villagrande, province d’Ogliastra, île de la Sardaigne, Italie : Je m’habille toujours entièrement de noir et je porte un voile noir sur la tête parce que mon mari est mort et que la tradition veut qu’une veuve se vête ainsi. Je ne sais pas ce qui va m’arriver à la fin de ma vie. Personne ne sait, mais je ne crains pas la mort. Le cycle de la vie se poursuit. (© Arianne Clément)
L’artiste considère son exposition comme “un tableau vivant” où “le regard que l’on porte sur les œuvres est différent suivant les heures, les jours et les saisons”. “Contrairement aux environnements stables et contrôlés des salles de musées, les photographies se retrouvent exposées à diverses luminosités, au vent, à la pluie, à la neige, au verglas, etc. Cet incessant changement de décor renvoie à l’impermanence de la vie et de la nature.”
De quoi profiter du vent dans ses cheveux, du soleil sur sa peau, de la pluie sur son crâne, bref, de quoi profiter de tous les petits indices qui nous rappellent que nous sommes en vie face à des visages qui témoignent de leur longue balade à travers celle-ci.
Umeto Yamashiro, 99 ans, village d’Yomitan, archipel d’Okinawa, Japon : Plus jeune, j’avais un petit commerce sans prétention ; je vendais des bricoles. C’était assez pour survivre, mais tout juste. Quand j’ai eu 80 ans, j’ai décidé de réaliser mon rêve de devenir danseuse. J’ai approché une troupe de danse traditionnelle okinawaïenne qui donne des spectacles pour les touristes et, comme j’étais vraiment déterminée à apprendre, on m’a donné ma chance. Maintenant, je suis danseuse étoile ! Je suis en parfaite santé, je n’ai pas de maladie et je ne prends aucun médicament. Lors de mon dernier examen médical, le médecin m’a avoué être jaloux de ma santé irréprochable. Le secret ? Rire, rire et encore rire ! Ne laisse pas la colère, la haine ou l’inquiétude t’habiter. Fais un effort pour aimer et accepter les autres. Sois actif, sors, fais la fête, danse, joue de la musique et embrasse la vie ! La mort de mon époux a été une libération. Mon mariage n’a pas toujours été facile, mais, à la fin de sa vie, mon mari m’a tout de même remerciée et m’a dit que j’avais été une formidable épouse. Nous nous sommes donc quittés le cœur en paix. Cela dit, j’adore être célibataire ! Je batifole constamment avec les hommes, les jeunes aussi bien que les vieux. J’aime flirter, séduire, plaire, rigoler, taquiner les touristes en me comportant de façon affriolante. Je ne sors jamais sans avoir appliqué mon fond de teint et mon rouge à lèvres. J’ai même acheté un parfum luxueux que j’ai payé 130 $. Je sens merveilleusement bon ! (© Arianne Clément)
Karyou Akayama, 97 ans, cité d’Urasoe, archipel d’Okinawa, Japon : J’ai eu une bonne carrière comme calligraphe et j’expose encore dans d’importants musées. Il y a un poème chinois qui explique que lorsque l’on voit, dans le miroir, notre visage vieilli par les années, on doit s’en féliciter et s’en réjouir. C’est une philosophie à laquelle j’adhère complètement ; je suis très heureux d’être âgé. Mon conseil pour les plus jeunes générations est d’être, comme moi, extrêmement discipliné. Ça prend un esprit fort et beaucoup de détermination pour vieillir en santé. Il faut faire les mêmes choses dans le même ordre chaque jour. Par exemple, tous les matins, je mesure ma température, mon rythme cardiaque et ma pression. J’ai un podomètre et je m’impose de marcher 5 000 pas par jour. Je mange, en petite quantité, des aliments sains. J’aime les sucreries, mais je les évite car je veux conserver mon poids. Généralement le matin, je déjeune avec du riz brun, des légumineuses, des légumes et de la soupe miso. Le soir, je mange sensiblement la même chose, mais j’ajoute un peu de viande. Deux repas par jour suffisent amplement. J’ai un journal dans lequel je fais l’inventaire de tout ce que je mange. Mes enfants se moquent de mon zèle, mais ça m’est égal. Comme il est important de maintenir des liens sociaux, je m’impose aussi cette règle : je mange toujours en compagnie de ma famille. Pour maintenir mon acuité intellectuelle, j’étudie la guitare traditionnelle et je joue aux échecs une fois par semaine. (© Arianne Clément)
Giorgos Karoutsos, 92 ans, Nas, île d’Icarie, Grèce : Je suis marié depuis 63 ans et je suis toujours très amoureux de ma femme. Je ne serais pas l’homme que je suis sans elle. J’ai toujours été fou d’elle ; j’ai toujours voulu être à ses côtés, l’accompagner partout où elle va, lui démontrer mon affection en lui prodiguant caresses et baisers. Malheureusement, les jeunes d’aujourd’hui ne veulent plus faire l’effort que demande une relation durable. Il est plus facile de rompre avec son partenaire que de fournir la patience et le travail que le mariage exige. Voici, en vrac, les raisons de la longévité sur l’île d’Icarie : l’air et l’eau sont purs, la nourriture et le vin viennent directement de nos petites fermes et ne contiennent aucun contaminant, le stress est inexistant, nous marchons constamment, nous nous rassemblons régulièrement entre amis pour manger, fumer, boire, danser, faire de la musique, jouer aux cartes ou pour aller aux nombreux événements et festivals qu’offre la communauté. En tant que fermier, j’ai toujours été très actif. Il fallait s’occuper du jardin, des vignes, des oliviers et des autres arbres fruitiers, des ruches, des moutons, des chèvres, des vaches, des cochons, des poules, etc. Maintenant, j’ai une blessure au genou qui m’empêche de travailler, ce que je trouve extrêmement pénible. Je fume quelques cigarettes chaque jour pour me réconforter. (© Arianne Clément)
Richard Nelson, 99 ans, Loma Linda, Californie, États-Unis : J’étais médecin chirurgien et j’ai arrêté d’exercer à l’âge de 89 ans. Je suis né au Japon et j’y ai fait ma médecine dans une université de l’Église adventiste du septième jour. Mes années passées à Tokyo ont été les plus satisfaisantes de ma vie. Ma carrière m’a permis de contribuer positivement à la société et de m’accomplir comme être humain. J’encourage les jeunes à acquérir une bonne éducation. C’est même primordial pour se réaliser complètement. Je me préoccupe de ma santé ; je suis végétarien et presque végétalien. Je me permets une crème glacée une fois par semaine et le reste du temps je ne mange que des aliments sains. Je fais aussi beaucoup de vélo stationnaire et j’effectue des exercices aérobiques en groupe. J’avais peur de venir habiter au centre pour personnes âgées adventistes de Loma Linda ; je craignais de devenir inactif, de rester assis toute la journée et de m’ennuyer mais, finalement, c’est tout le contraire. Il y a tellement de choses à faire ici ! Malheureusement, ma vue a terriblement baissé. Comme j’adore lire et rester informé, ma femme me fait la lecture chaque jour. Nous avons un mariage heureux. Pour réussir son mariage, il faut s’investir pleinement dans la relation et s’intéresser activement à son partenaire. L’une des règles que nous avons établies au début de notre union, et que j’affectionne particulièrement encore aujourd’hui, est celle-ci : si l’un de nous deux est en colère, l’autre doit s’efforcer de garder son calme pour éviter que la situation ne s’envenime. Ce petit effort de régulation émotionnelle nous a permis de désamorcer tous nos conflits. (© Arianne Clément)
Carol Mary Nelson, 97 ans, Loma Linda, Californie, États-Unis : J’aime les gens. J’aime m’asseoir et les observer. J’aime imaginer leurs pensées et essayer d’identifier leur type de personnalité. Chaque personne a sa propre façon de marcher, son propre langage corporel et c’est absolument fascinant. Il faut dire que je suis thérapeute de profession. Avant, je participais à plusieurs activités à la résidence pour personnes âgées membres de l’Église adventiste du septième jour où j’habite mais, dernièrement, j’ai préféré passer tout mon temps avec mon mari. Mon mari a 99 ans, chaque minute avec lui est précieuse. Comme sa vue a baissé, je lui fais la lecture plusieurs heures par jour. Je lui lis les nouvelles, des textes religieux, des articles sur la santé, des biographies, etc. Il est important, en vieillissant, de rester curieux et de nourrir son esprit. Chaque jour, je lui dis que je l’aime. Il faut aimer son partenaire de vie encore plus que l’on ne s’aime soi-même et faire les choses par amour et non par devoir. Je fais attention à ce que je mange car je veux préserver ma santé autant que possible. Je ne mange pas de sucreries ; le plaisir que procure une dose de sucre est infime comparé au bonheur d’être en bonne santé. Mon pire défaut est d’être impatiente. À plusieurs reprises, j’ai été impatiente avec mon mari et je m’en veux encore. Le soir lorsque je me couche, je révise les événements de ma journée et je me blâme pour ce que j’ai dit ou fait de répréhensible. La religion est très importante pour moi car elle me donne une ligne de conduite. Quand je lis la Bible, je me rends compte du chemin que j’ai encore à parcourir, même si je tends à m’améliorer. Il est important d’être tolérant et d’aimer les autres exactement comme ils sont. Il ne faut pas médire et il faut éviter la jalousie, qui est très destructrice. Il faut aussi voir le bon côté des gens et des choses et rire le plus souvent possible. (© Arianne Clément)
Helen Dalgleish, 95 ans, Loma Linda, Californie, États-Unis : Je suis une enfant de la Grande Dépression. Contrairement à beaucoup de membres de l’Église adventiste du septième jour, je ne suis pas issue d’une famille aisée. Mon père travaillait illégalement un peu partout à travers la Californie ; nous déménagions fréquemment à la recherche de petits boulots dans les champs de coton. Par chance, un jour, nous avons déménagé à San Bernardino où mon père avait trouvé un emploi chez un producteur d’oranges. C’est alors que nous avons découvert les adventistes du septième jour. L’Église nous a offert une éducation, à moi et à mes frères et sœurs, ce qui nous a permis de nous élever socialement. Plus tard, comme mon défunt mari était docteur, il assumait seul le rôle de soutien financier familial. J’ai donc élevé mes enfants sans être obligée de travailler à l’extérieur de la maison. Quand mes enfants ont été grands, je suis allée à l’université pour étudier les arts. J’ai eu mon diplôme à l’âge de 49 ans, ce qui est assez inusité. J’ai eu un beau mariage qui a duré 70 ans. Voici mon conseil pour les amoureux : si vous avez un conflit, n’allez jamais vous coucher sans régler votre différend. Avant d’aller au lit, faites la paix et dites à votre partenaire que vous l’aimez. L’art occupe une grande place dans ma vie. Dieu s’attend à ce que nous prenions soin de notre santé et à ce que nous repoussions tout ce qui n’élève pas l’esprit. L’art élève l’esprit. La musique, les arts visuels et la littérature en sont des exemples. Personnellement, je fais partie d’un chœur, j’écris mes mémoires, je joue du piano, j’assiste à des projections de films et je veux me remettre à la peinture. Je vais aussi à des exercices d’aérobie et je participe à plusieurs réunions et rassemblements. J’ai beaucoup d’amis et je suis très active sur Facebook. J’ai maintenant un petit ami. J’avais un faible pour lui quand il est arrivé, il y a trois ans, à la résidence pour personnes âgées adventistes où j’habite et les choses se sont développées. Nous parlons et nous nous embrassons. Je crois que c’est excellent pour la longévité. Le plus grand obstacle de ma vie a été la mort de mon petit-fils. J’ai cependant espoir de le retrouver au paradis. Il paraît que les tremblements de terre sont de plus en plus fréquents et que la planète se réchauffe, entraînant toutes sortes de catastrophes naturelles. C’est possiblement le début du Jugement dernier. Nous, les croyants, pensons que lors du Jugement dernier, le Seigneur et ses anges viendront sur Terre pour nous sauver et nous emmener au paradis. (© Arianne Clément)
Dario Loi, 88 ans, Villagrande, province d’Ogliastra, île de la Sardaigne, Italie : Le secret de la longévité ? L’eau, le fromage et le vin ! Je suis retraité mais comme la pension de retraite ne suffit pas, je fais encore de l’agriculture. Je cultive un peu de tout et j’ai quelques porcs. J’exploite aussi des vignes car j’aime boire un verre de vin en mangeant. J’ai l’impression que, pour aller de l’avant dans la vie, ça prend un peu de vin. C’est mon humble avis. Je ne bois pas trop, mais je ne me passerais pas d’un verre ou deux aux repas. Grâce à Dieu, j’ai une vie glorieuse. Tout va bien pour moi. Avec mon épouse, on s’entend bien, on s’occupe de la ferme, on va souvent à la mer, on fait de petits voyages, on visite des églises. Et bien que je sois un petit vieux, je n’ai rien perdu de mon ardeur au lit ! (© Arianne Clément)
Dominga Ema Albares Rosales, 104 ans, Santa Cruz, péninsule de Nicoya, Costa Rica : Lorsque j’étais enfant, il n’y avait pas d’école dans mon village alors je n’ai jamais appris à lire ou à écrire. Il m’a fallu faire avec. Comme mon père était violent, j’ai quitté la maison quand j’étais encore jeune. J’ai eu 11 enfants et j’ai été fermière toute ma vie. Le travail était éreintant, mais la vie était moins stressante qu’en ville. Nous mangions beaucoup de nourriture sauvage ce qui, selon moi, est encore meilleur pour la santé que la nourriture de ferme. C’est probablement le secret de ma longévité. Maintenant que j’habite en ville avec ma fille, je déprime beaucoup. Mes poules me manquent. (© Arianne Clément)
Maria Trinidad Espinoza Melina, 102 ans, Copal de Quebrada Honda, péninsule de Nicoya, Costa Rica : J’ai encore toute ma tête et ma mémoire est excellente. Des visiteurs des quatre coins du monde sont venus discuter avec moi au sujet de la longévité et j’espère qu’il en viendra encore car j’adore rencontrer des étrangers ! Je suis reconnaissante d’avoir une si bonne santé et j’aimerais vivre encore plusieurs années. Je ne veux pas mourir, j’aime la vie. Avant, les choses étaient meilleures. Il n’y avait pas de produits chimiques dans la nourriture et les gens étaient en meilleure santé. Nous gagnions peu, mais nous avions toujours assez pour vivre, d’autant plus que nous nous entraidions continuellement. Aujourd’hui, notre pauvreté est extrême. Le coût de la vie est très élevé alors que notre pension de retraite est ridicule. Ma fille ne peut plus travailler à l’extérieur et gagner sa vie car elle doit s’occuper de moi à temps complet. Ce qui fait que nous sommes deux à vivre de ma petite pension, qui suffit à peine à payer l’électricité. Nous manquons toujours d’argent pour tout : les médicaments, les factures de téléphone, la nourriture, ou pour acheter des lunettes, des souliers ou des tissus avec lesquels ma fille confectionne nos vêtements. J’aimerais demander au gouvernement d’aider davantage les aînés au Costa Rica car le manque de ressources est une grande source de stress et de désespoir. Je conseille aux jeunes femmes de bien se comporter, d’être bien soignées, de ne pas marcher dans la rue le soir, de ne pas prendre de drogue et d’alcool et de choisir un amoureux bienveillant. Comme les hommes ne sont pas tous bons, il ne faut pas se précipiter pour se marier ; il est préférable d’attendre quelques années afin de s’assurer d’avoir un compagnon respectueux. (© Arianne Clément)
L’exposition “Comment vivre jusqu’à 100 ans” est visible dans la forêt de Montérégie jusqu’à l’automne 2025. Vous pouvez retrouver le travail d’Arianne Clément sur son site et sur Instagram. Nous avions déjà parlé du travail de la photographe sur les sexualités des personnes âgées précédemment, avec ses séries Vieillir queer et L’Art de vieillir.