Le ton était donné. Rick Owens a choisi le parvis du Palais de Tokyo et du musée d’Art moderne pour son défilé printemps-été 2025, là où, en temps normal, les skateurs enchaînent des ollies. C’est une véritable performance artistique, plus qu’un simple défilé, que le créateur de mode états-unien a imaginé pour cette saison. Comme une messe futuriste (ou un dîner des Rothschild), 200 étudiant·e·s ont été mobilisé·e·s pour marcher avec de longues capes cosmiques en soie, sur la “digne et élégante” “Symphonie n° 7” de Beethoven.
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Mais pourquoi avoir fait appel à des étudiant·e·s venu·e·s de tout Paris ? “Je me sentais un peu coupable d’avoir exclu tant de gens, mais plus particulièrement les étudiant·e·s en mode qui se trouvent généralement devant la porte, à l’extérieur, lorsque vous faites les défilés. Alors je me suis demandé : ‘Comment puis-je répondre à ça ? Eh bien, nous allons simplement inviter tout le monde au spectacle. Tous·tes les étudiant·e·s en mode, tous·tes celles et ceux qui souhaitent participer au défilé, peuvent y participer'”, a justifié le créateur qui se fait le passeur de la relève.
Hollywood, années 1930
Pour prolonger ses régulières collaborations avec des modèles non professionnel·le·s, Rick Owens dit avoir invité “tout le monde”, des étudiant·e·s, des apprenti·e·s créateur·rice·s, ou encore des ami·e·s d’il y a 25 ans et des grandes figures trans, rapporte l’AFP. Cette collection, intitulée “Hollywood”, est un clin d’œil au “boulevard du vice” qu’a fréquenté Rick Owens quand il a quitté, jeune, sa ville natale quelque peu conservatrice. D’autres clins d’œil sont faits au cinéma muet et au Hollywood des années 1930, celui qui censurait les films jugés indécents par la société de l’époque.
Il y a des références au film Metropolis de Fritz Lang, mais aussi à l’homoérotique Lot in Sodom et au censuré Le Signe de la croix avec des références bibliques, Art Déco, où le péché et la rédemption, le Bien et le Mal règnent. Et c’est magnifique : il y a du voile, des coiffes en forme d’auréoles dorées, des épaulettes angéliques, des plateformes d’aliens mi-Gladiator mi-Dune, une atmosphère “spartiate du futur”.
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Une “armée de l’amour”
Si la mise en scène peut paraître exubérante, sachez que le créateur de mode a tout de même misé sur le minimalisme : pas de décor, quelques accessoires, seulement des modèles et des vêtements. “C’est juste un défi – un merveilleux défi – de réfléchir à la façon dont nous pouvons utiliser [l’espace] avec les gens, au lieu d’utiliser des décors qui sont jetés. Au lieu de choses jetables, présentez une masse de gens, une armée de l’amour.”
Le défilé a atteint son climax, dans un final en 666 secondes bien sûr, lorsqu’un radeau triangulaire, porté par une “armée de l’amour” pirate et surmonté de gymnastes tenant un drapeau, est passé. Sur le drapeau, deux mains, l’une noire et l’autre blanche, se tiennent en symbole d’unité “face à l’explosion d’intolérance que nous expérimentons dans le monde en ce moment”. Il faut savoir, nous dit Dazed, que le créateur organisait depuis deux saisons ses défilés dans l’intimité de son appartement parisien, afin d’éviter les situations dystopiques à la Met Gala 2024 : des défilés de stars extravagants organisés alors que la souffrance de notre monde, les massacres et les guerres grondent.