De 1998 à 2002, le début d’un jeu de piste
Depuis le début de sa carrière, le réalisateur britannique a imposé son goût pour les scénarios complexes et les ambiances tourmentées. Dans la majorité de ses films, la psychologie des personnages fait partie des points décisifs de leur histoire, tout comme le sont le mensonge, la manipulation et la trahison.
Dès son premier long métrage, Following (1999), Christopher Nolan pose les jalons de son cinéma en nous plongeant dans un polar à la narration éclatée. Tourné dans un noir et blanc sentant bon l’énigme, le film raconte l’histoire de Bill, poursuivi par une obsession, filer les inconnus dans la rue. Où vont-ils ? Que font-ils ? Un jour il se met à se rapprocher, trop près, d’un homme. Il le conduira à une aventure dont il ne sortira pas indemne.
Une première réalisation qui donne les premiers indices de ce qui sera ensuite son génial Memento (2000), dans lequel le spectateur se perd à mesure que le film avance. Quand finalement on croit avoir compris, on se rend compte que tout cela n’était qu’illusion. Enfin, peut-être.
Sa deuxième oeuvre déjà très aboutie vient asseoir le goût prononcé de Nolan pour les twists, les narrations tortueuses et les allers et venues dans une temporalité difficilement identifiable. Une puissance narrative corrélée avec le fait qu’il écrive lui même tous ses scénarios, ce qui lui donne une maîtrise totale de son oeuvre, et une patte aujourd’hui très reconnaissable.
Avec Insomnia, sorti en 2002, Nolan continue d’explorer les possibilités infinies liées au thème de la mémoire, auquel il rajoute celui du sommeil, qui annoncera Inception. Ses films sont immersifs et plongent les spectateurs au coeur d’intrigues au mystère difficilement compréhensible.
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Batman : Hollywood version Nolan
Après avoir installé dans ses premières productions cette ambiance mystérieuse qui caractérisera ensuite toutes ses oeuvres, Nolan est choisi par la Warner pour redonner un nouveau souffle aux aventures du célèbre homme au costume de chauve-souris : Bruce Wayne. Avec Batman Begins, premier volet de sa trilogie, on assiste à la refonte d’un mythe : Christopher Nolan insuffle à sa vision du super-héros une dimension plus noire et torturée.
Comme à son habitude, le cinéaste britannique continue dans Batman à mettre en place des sursauts d’une narration éclatée, dans laquelle il entremêle différentes strates temporelles, confond passé et présent dans d’habiles flash-backs.
Lors de son passage au Festival du Film Américain de Deauville pour Insomnia, il expliquait :
Je suis très intéressé par le conflit entre la vision subjective d’un individu et la réalité objective. Pour moi, le cinéma est le meilleur médium pour développer cette tension.
Les deux volets suivants de sa trilogie se poursuivront dans la veine du premier, et malgré la pression engrangée par des films à aussi gros budgets, Nolan parvient à ne pas perdre de son génie créatif, ce qui lui permet de rencontrer un immense succès critique et publique. La trilogie Batman se termine en 2012.
Un mystère sans fin ?
Entre les réalisations des deux derniers volets de son Batman, Nolan trouve le temps de s’intéresser à la magie dans Le Prestige (2006) et aux rêves dans Inception (2010). Il continue de manipuler à sa guise le public, jouant avec ses attentes pour mieux le tromper. Rien n’est aussi simple qu’il n’y paraît, et le cinéaste entend brouiller les pistes et confondre le spectateur. Le but n’est pas ici de simplement le piéger, mais de l’emmener dans une réflexion qui perdurera bien après le générique de fin pour questionner la notion de réalité.
Inception, qui met en scène l’excellent Leonardo DiCaprio, est certainement l’un des films les plus énigmatiques du réalisateur britannique, et celui qui a déchaîné le plus les passions en raison d’une fin ouvertement mystérieuse. Le personnage principal est-il finalement sorti de son rêve ? Car Nolan, qui a construit peu à peu son mille-feuille de songes, sème dans cet épilogue des pistes contradictoires.
À la sortie du long métrage, les interprétations vont bon train, notamment sur Internet, où des dizaines de forums ont vu fleurir des théories plus ou moins vraisemblables, comme cette vidéo :
Nolan s’amuse avec les frontières de l’illusion pour embrumer l’esprit de ses personnages et de ses spectateurs. Il assoit ainsi une signature aussi bien narrative et visuelle qu’intellectuelle. La perception de la réalité : sa spécialité.