À Paris, une exposition explore, pour la première fois, le lien entre la peintre Berthe Morisot (1841-1895), figure de l’impressionnisme, et ses homologues du siècle précédent. Quatre ans après une rétrospective au musée d’Orsay, le musée Marmottan Monet veut aller plus loin en mettant à nu les sources artistiques de cette artiste majeure de la modernité, redécouverte bien après sa mort. “Aujourd’hui, l’étoile Morisot brille dans le monde des arts. Mais, jusqu’ici, on ne s’était jamais intéressé à son background, à ses influences, comme on le fait avec les artistes de son envergure”, souligne auprès de l’AFP Marianne Mathieu, co-commissaire de l’exposition.
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Au cœur du projet : montrer comment le XVIIIe siècle a été la matrice du projet artistique de la peintre, considérée comme la première femme impressionniste et l’une des principaux membres du groupe aux côtés de Claude Monet ou d’Edgar Degas. Ce sont 65 œuvres présentées au public, dont de nombreux dessins. La plupart sont de l’artiste elle-même. Souvent, ses œuvres sont mises en dialogue avec des toiles de François Boucher, de Jean-Baptiste Perronneau ou encore de Jean-Honoré Fragonard, dont le monde de l’art explique depuis des décennies qu’il est un parent éloigné de l’artiste… Faux, démontre l’exposition, qui s’est accordé les services d’un généalogiste.
Boucher, Fragonard ont été mis de côté avec la Révolution française et ont dû attendre plusieurs décennies avant d’être redécouverts par le public. Leurs œuvres ont pourtant toujours accompagné Berthe Morisot, qui a évolué dans un milieu où l’art du siècle des Lumières était très présent. “C’est dans cette esthétique qu’elle se forge”, analyse Marianne Mathieu. Elle s’affirme toutefois dans une palette qui lui est propre, avec des couleurs vives. Elle se tourne vers le pastel, sans jamais délaisser la peinture à l’huile, plus noble.
Elle fusionne les techniques, innove. “Elle n’est jamais dans la copie mais, à chaque fois, développe sa propre singularité”, décrypte Dominique d’Arnoult, l’autre commissaire. “Elle ne se tourne pas vers Boucher ou Perronneau parce qu’elle apprend d’eux mais parce qu’elle veut discuter avec eux”, complète Marianne Mathieu. N’y a-t-il toutefois pas un paradoxe à incarner la modernité tout en ayant des racines artistiques ancrées dans l’Ancien Régime ? “Je crois que Berthe Morisot était quelqu’un qui avait une grande ouverture d’esprit. Ce qui l’intéressait, c’était le dialogue de peintre à peintre. Le reste était secondaire”, affirme Mme Mathieu.