C’est bientôt Halloween, et qui dit Halloween dit soirée films d’horreur. Sauf qu’on en a marre de se passer en boucle les sagas Scream, Saw ou Conjuring et de se la péter en recommandant la filmo d’Ari Aster comme si on était les nouveaux prophètes du bon cinéma intelligent. Et puis on a déjà fait une bonne sélection de pépites d’horreur que vous ne connaissez sans doute pas.
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À la place, cette année, pourquoi ne pas miser sur des films qui font vraiment flipper alors que ce n’est pas leur but ? C’est cadeau, et ça va vous mettre dans le mal le plus total (on sait que vous aimez ça) : les vingt meilleurs films non horrifiques qui font quand même (trop) peur.
Salò ou les 120 Journées de Sodome de Pier Paolo Pasolini (1975)
Il y a une atmosphère glauque indéniable qui plane sur ce film : le jeu des acteurs et des actrices, le gore, le sang, la scatophilie débordante. Beurk. Juste beurk. Mais chef-d’œuvre quand même.
Trash Humpers de Harmony Korine (2009)
Qu’on se le dise, sur papier, le film s’éloigne de tout ce qu’on aurait envie de regarder plus d’une minute : on suit un trio complètement barjot, qui mime des actes sexuels avec des poubelles et casse des trucs un peu partout. Oui, c’est tout. Pendant une heure et vingt minutes, le tout filmé avec une caméra VHS absolument éclatée et monté les yeux bandés, d’après son réalisateur – ça se ressent. On a l’impression de tomber sur une sorte de trace vidéo que personne n’aurait dû trouver, et on ne peut étrangement pas détourner le regard. Un genre de Jackass mais du genre qui t’empêche de dormir la nuit.
L’Histoire sans fin de Wolfgang Petersen (1984)
Si l’esthétique et le mood général du film suffisent à considérer L’Histoire sans fin comme l’un des plus grands traumatismes de notre enfance, la mort lente et suffocante d’Artax le cheval, englouti dans les marécages de la mélancolie, nous glace toujours le sang des dizaines d’années plus tard. On répète : ne pas tuer les chevaux (ni la mère de Bambi) dans les films, s’il vous plaît, c’est trop.
Wanda de Barbara Loden (1970)
Seul et unique film d’une certaine Barbara Loden, le long-métrage offre un type d’horreur plutôt métaphysique, dans le sens où on est ici face à une protagoniste effrayante de passivité. Wanda se retrouve malgré elle embarquée dans la cavale d’un braqueur de banque, mais rien ne l’atteint, rien ne la touche, rien ne l’émeut. Presque léthargique, le personnage fait flotter le film et lui donne un caractère hanté qui trotte dans la tête pendant une semaine après le visionnage. Le film est disponible gratuitement dans son entièreté sur YouTube grâce la chaîne Old Films Revival Project. C’est cadeau (mais ça va vous mettre mal).
White Bird de Gregg Araki (2014)
Le plus flippant dans ce film, c’est qu’il nous fait croire qu’on est dans une espèce de teen movie pétillant alors qu’on se fait lentement engloutir dans une torture psychologique oppressante qui se révèle au fil des minutes. Le casting est dingue, et chaque apparition d’Eva Green est tordue, malsaine ou sexy – parfois même les trois en même temps. C’est aussi un film qui file la phobie des congélateurs, et ça, c’est non négligeable.
Lost Highway de David Lynch (1997)
Film hybride, faussement film noir mais qui va piocher un peu partout, film labyrinthique complexe à appréhender, ce long-métrage demeure un monument d’angoisse. Le stalking, le visage blafard de Robert Blake, la double timeline, la possessivité excessive… L’un des meilleurs films d’horreur non horrifiques.
Respire de Mélanie Laurent (2014)
On n’attendrait pas forcément ce film dans ce genre de liste, et pourtant. Plus on y repense, plus on se dit que ce récit plutôt atypique sur l’amitié, son côté anxiogène, son évolution chaotique, et, forcément, son dénouement nous ont marqués au fer rouge. Impossible de le regarder sans une énorme boule au ventre et un espoir désespéré de voir l’histoire verser du bon côté – spoiler : ça n’arrive jamais. Le film qui va vous faire avoir peur de vos potes.
Enter the Void de Gaspar Noé (2009)
Le choix facile concernant Gaspar Noé aurait été de citer Irréversible. Un choix prévisible, bien qu’absolument logique – la scène de viol est un traumatisme, et le massacre dans la boîte de nuit un véritable moment de terreur. Mais quitte à évoquer le cinéaste, autant parler d’un autre cauchemar plus rarement cité. Pourtant, la divagation de l’âme d’un homme mort d’une overdose à Tokyo est un moment terrible pour toute personne ayant peur de la mort – et une expérience quasi traumatisante pour certains.
Dancer in the Dark de Lars von Trier (2000)
Pareil, tous les médias ayant déjà fait des articles similaires à celui-ci (spoiler : c’est un angle vieux comme le monde, évidemment qu’on n’est pas les premiers) citent Melancholia. Et c’est logique : la fin du monde, la peur de mourir, la dépression… La vision de Lars von Trier est cauchemardesque. Mais elle l’a toujours été. On aurait pu parler de Breaking the Waves, de Dogville, d’Antichrist, de The House That Jack Built (bon, lui, c’est véritablement un film d’horreur), mais rien n’égalera l’épouvante, la terreur et l’angoisse provoquées par Björk, filmée avec une caméra dégueu, qui se fait malmener de bout en bout, avec un final traumatisant.
C’est arrivé près de chez vous de Rémy Belvaux, André Bonzel et Benoît Poelvoorde (1992)
Véritable monument du cinéma belge, ce film concept en forme de documentaire parodique n’a ni éthique ni morale et ne s’en excuse jamais. On y suit le quotidien banal d’un mec comme les autres, à la seule exception qu’il est serial killer et qu’une équipe de tournage le suit dans ses meurtres sordides qu’il détaille et exécute avec un sang-froid et un naturel absolument glaçants. Même l’humour imparable et délicieux de Poelvoorde n’enlève rien à l’horreur de l’ensemble, qui prête finalement autant au rire qu’à l’angoisse. André Bonzel, l’un des réalisateurs, nous a même confié que le film n’aurait jamais dû sortir.
The Humans de Stephen Karam (2021)
Du génie. Ce film en huis clos nous invite à la table d’un dîner de famille comme ceux que l’on connaît toutes et tous mais le tourne avec les codes propres au cinéma d’horreur : des musiques angoissantes, des décors glauques, une luminosité suffocante et une atmosphère absolument anxiogène. On ne s’éloigne pas trop de nos vrais dîners de famille, finalement. Ce film va vous suivre longtemps après l’avoir vu.
Parasite de Bong Joon-ho (2019)
Bon, on est tous d’accord pour dire que ce film est (brillamment) angoissant au plus haut point, mais qui se souvient de la scène où le gars de la cave glisse sa tête par les escaliers ? Parce que nous, on y pense chaque soir avant de s’endormir.
2001 : L’Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick (1968)
On sait que tout le monde attend Orange mécanique ou The Shining lorsqu’il est question de Kubrick et d’horreur. Sauf qu’après avoir récemment revu son petit bijou de science-fiction, il était de notre devoir de vous rappeler la séquence de vol galactique à travers l’infini dans le troisième acte du film – et la scène absolument loufoque qui suit et clôture le long-métrage. Rien ne nous a plus fait flipper par rapport à notre insignifiance existentielle que ce voyage abstrait, insensé et tout bonnement terrifiant.
Requiem pour un massacre d’Elem Klimov (1985)
Visuellement, ce film est la retranscription la plus exacte de l’horreur. Elem Klimov filme la guerre comme peu osent le faire, en racontant l’exécution des Biélorusses par les nazis dans une forme quasi documentaire qui donne encore plus la chair de poule. Et le fait que tout soit à hauteur d’enfant rend le film plus horrible encore.
Mother! de Darren Aronofsky (2017)
On a hésité avec Black Swan et Requiem for a Dream, mais pareil, ils sont trop évidents. Alors que Mother!, cette relecture biblique, est trop rarement cité. Sans doute parce que trop difficile d’accès, ou parce qu’avec un sous-texte que certains (pas nous) qualifieront de grossier. Ce serait omettre l’incroyable montée en tension, ce grand huit émotionnel absolument insoutenable, qui est bien plus oppressante que tout ce qu’a pu faire Aronofsky jusque-là. Un grand film, d’horreur presque.
James et la Pêche géante de Henry Selick (1997)
Si, pour beaucoup, le film d’animation à la source d’un traumatisme d’enfance est indéniablement Coraline et ses yeux en forme de boutons, le nôtre est un autre film de Henry Selick : James et la Pêche géante. Et si le visage disproportionné du protagoniste et les insectes géants absolument creepy ne suffisent pas à vous convaincre, concentrez-vous sur la texture générale de l’ensemble du film qui, pour une raison qui nous échappe encore, nous fait juste flipper à chaque fois qu’on y repense. Ne montrez pas ça à vos gosses.
We Need to Talk About Kevin de Lynne Ramsay (2011)
En 2011, le terrifiant film de Lynne Ramsay a eu l’effet d’un coup de scalpel. Puissant par sa réalisation, dérangeant par son sujet et mémorable par la performance de Tilda Swinton, il autopsiait une relation malsaine entre une mère dépassée et un fils possédé, la révélation Ezra Miller, au même physique froid et tranchant. L’actrice, qui se murait derrière un visage à la fois hautain et désemparé, nous a fait osciller entre la détestation de cette mère indigne qui n’a pas su aimer son fils et la compassion pour la première victime de ce monstre aux élans sociopathes. Car en décimant sa classe, son père et sa sœur cadette à coups de flèches mais en laissant la vie sauve à cette mère qu’il exècre, Kevin la punit de la pire des manières. Et à l’écriture de ces quelques lignes, notre estomac se noue une nouvelle fois en souvenir de ce duo glaçant.
Canine de Yorgos Lanthimos (2009)
En 2009, le réalisateur grec déployait tout le potentiel horrifique de la cellule familiale dans une chronique pastel, paisible et surtout très tordue. Dans Canine, un père despotique enferme ses trois adolescents presque adultes dans la villa familiale sans contact avec le monde extérieur ni notion de celui-ci pour les préserver de toute influence extérieure, selon sa logique. La seule présence étrangère acceptée dans l’enceinte de leur demeure est une vigile chargée de satisfaire les besoins sexuels du fils. Ce huis clos d’enfermement façon Virgin Suicides pousse les curseurs du malaise au maximum pour dénoncer un patriarcat tout-puissant qui ronge même la chair de sa chair.
Take Shelter de Jeff Nichols (2011)
Il y a deux types de Michael Shannon parano. Il y a l’effrayant obsédé des parasites qui pulluleraient dans sa chambre dans Bug de William Friedkin, véritable film d’horreur sans l’ombre d’un doute – en plus d’être l’un des meilleurs longs de son cinéaste –, et il y a l’homme aux visions de fin du monde qui veut absolument protéger sa famille en l’enfermant dans un abri antiatomique. Des cauchemars à la vision oppressante d’un patriarche en début de schizophrénie, tout est incroyable. Et flippant au possible.
Nocturnal Animals de Tom Ford (2017)
On oublie bien trop facilement que Tom Ford, grand styliste américain, est également cinéaste. Deux films, deux bombes. Un drame, A Single Man, et un thriller terrible (avec la meilleure scène d’ouverture du XXIe siècle), Nocturnal Animals. Détesté outre-Atlantique, adoré par les puristes. Avec, derrière d’incroyables performances, de véritables tranches d’angoisse. Vous vous souviendrez du kidnapping, on vous le garantit.
Article coécrit par Flavio Sillitti, Arthur Cios et Manon Marcillat.