“Don’t Panic”, c’est le titre de Coldplay qui introduit Garden State et un Zach Braff aux abonnés absents. Ça aurait pu être le titre de cet article, tant le cinéma permet, comme l’indique avec justesse Marina Foïs, “de s’échapper de l’aridité, des coups durs, de la cata, ou d’aller chercher ailleurs quand la vie nous coupe les jambes”.
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Histoire de coller à un contexte particulièrement extraordinaire et éreintant, on vous a concocté une liste de 15 films qui nous ont toujours fait du bien. 15 films qu’on peut appeler “feel good movies”, étiquette cinématographique hasardeuse. 15 films qui traversent les décennies et les origines, d’un Vincent Lacoste tout jeune à un Jim Carrey particulièrement angoissé.
Rasta Rockett
Balance Man, Cadence Man… En 1994, Disney s’est amusé à retracer l’histoire vraie de la première équipe jamaïcaine de bobsleigh. De leur pays ensoleillé et chaleureux, les quatre sportifs débarquent aux Jeux olympiques d’hiver de Calgary au Canada. Le problème ? Ils n’ont jamais mis les pieds dans un bobsleigh et n’ont jamais vu un flocon de neige de leur vie.
Face à leurs adversaires bien plus expérimentés, ils vont devoir surmonter beaucoup d’obstacles pour se qualifier pour la compétition. Le temps, l’argent et les regards des autres. Entre les leçons de self-esteem face au miroir (“Je suis un type fier, un type fort, un type qui peut être très méchant quand il a la haine et qui n’accepte pas qu’on lui marche sur les pieds !”) et les entraînements intenses de leur coach bedonnant, les champions de Rasta Rockett nous en font voir de toutes les couleurs.
Dans ce récit très amusant, il est moins important de gagner la course que de se challenger. Brillant par sa morale, Rasta Rockett est un film culte revigorant. Ses personnages inoubliables et maladroits permettent de surmonter les petits coups de mou et de nous accrocher à nos rêves. [LB]
Garden State
À première vue, Garden State (2004) n’est pas vraiment le type de film à incorporer dans la case “feel good”. Il n’y a qu’à prendre connaissance du début de son scénario pour s’en convaincre. On suit Andrew Largeman dans une phase compliquée de sa vie : il est un jeune acteur qui a du mal à percer, serveur à ses heures déprimées à Los Angeles, et soumis aux effets de médicaments depuis un accident domestique. À la mort de sa mère, il rentre dans sa ville natale pour l’enterrement.
Dans un mélange d’absurdité et de mélancolie, Garden State risque de vous contaminer dans son élan de hasards à la fois inattendus, beaux et naïfs. Car ce premier long-métrage de Zach Braff, star naissante à Hollywood alors qu’il est le premier rôle dans la géniale série Scrubs, est une ode à un road trip intérieur, une lettre d’amour aux personnes étranges et, surtout, une histoire d’amour alambiquée avec une Natalie Portman très portée sur le mensonge et la musique de The Shins. L’actrice trouve ici une respiration cinématographique bienvenue entre deux Star Wars. Au casting, on retrouve aussi Ian Holm (Le Seigneur des anneaux), Method Man et Jim Parsons à ses débuts, avant qu’il ne soit connu pour son rôle de geek dans The Big Bang Theory.
Il en résulte une comédie à la fois romantique et dramatique, sublimée par une bande originale soignée, conviant à la fois Coldplay, The Shins, Nick Drake, Iron & Wine ou encore Simon & Garfunkel. Entre la dépression et le bout du tunnel, il y a parfois un film, et Garden State en est. [LL]
Les Beaux Gosses
Les Beaux Gosses pourrait presque nous faire regretter notre crise d’adolescence et nos hormones incontrôlables. Menée par un Vincent Lacoste boutonneux, cette comédie de Riad Sattouf présentée à Cannes décrypte l’adolescence avec beaucoup d’humour et très peu de poésie.
Hervé, 14 ans, est obnubilé à l’idée de sortir avec une fille. Il vit avec sa mère, trop curieuse et envahissante. Grâce à ses répliques débilos mémorables, la nonchalance de ces puceaux en rut et la justesse de ce portrait générationnel, le premier film de Riad Sattouf est devenu une comédie classique, dont la France, mauvaise élève du genre, peut vraiment se targuer. [LB]
Little Miss Sunshine
S’il passe par des phases assez sombres, que ce soit concernant la mort, la dépression, l’envie de suicide, l’amour de Proust et l’addiction à la drogue dure, Little Miss Sunshine est de ce genre de films qui peut ensoleiller ton week-end en très peu de temps.
Cette virée d’une famille comme aucune autre pour emmener la petite Olive à son concours de beauté pour gamines se transforme en une espèce de thérapie de groupe familiale jonchée de gags et de rebondissements. Un road trip qui donne envie de tout plaquer, traverser le pays, retrouver les siens. Certes, pas très confinement-friendly dit comme ça, mais ça fait étrangement beaucoup de bien, justement.
Libre et assoupi
En plein confinement, cette comédie irrésistible est de mise. Baptiste Lecaplain, sous les traits de Sébastien, n’a qu’un but dans la vie : ne rien faire – ce qui est en fait beaucoup plus difficile que ce que l’on imagine.
Contre l’avis de ses deux colocs, joués par Charlotte Le Bon et Félix Moati, l’anti-héros tente l’impossible pour tenir son objectif et rester ainsi éternellement dans son salon afin de vivre “peinardo comme un renardeau”. Réfractaire aux grands diplômes, aux bac +8 et à la surproductivité, Sébastien s’épanouit entre quatre murs et sans pression. De quoi nous relaxer pour un moment.
Plein de bonnes intentions et d’humour, ce premier film de Benjamin Guedj est une réussite un peu oubliée, qu’il est bon de ressortir au moment où notre canapé est notre nouveau bureau et que l’oisiveté est devenue notre nouvelle passion. [LB]
Nos jours heureux
Si nous ne sommes pas de grands amateurs des films sociaux d’Éric Toledano et Olivier Nakache, on leur concède cependant une excellente qualité d’auteurs de comédies. Le Sens de la fête en était l’ultime preuve, mais c’est à Nos jours heureux que va notre préférence.
On a souffert en même temps que Vincent Rousseau (Jean-Paul Rouve), le jeune directeur de colonie qui tente tant bien que mal de jongler entre enfants indisciplinés et une joyeuse bande d’animateurs incompétents.
Ses journées sont rythmées par ses multiples tentatives de responsabiliser un dragueur compulsif, d’épauler une timide maladive, de calmer les ardeurs d’un cuisinier qui engraisse toute la colonie tout en esquivant les contrôles de Jeunesse et Sport et en composant avec sa propre libido.
Le duo de réalisateurs a goûté aux joies de l’animation, c’est une évidence, et c’est pour ça qu’on rit tellement en se remémorant nos propres souvenirs de colonies de vacances face à ces stéréotypes qui n’en sont pas. [MM]
Good Morning England
Vous en avez ras le cul de 2020 ? Prenez votre petite valise, quelques fringues, un maillot, une trentaine de paquets de clopes, n’oubliez pas votre attestation pour un déplacement temporel qui ne sera ni bref ni dans la limite d’une heure, et barrez-vous au beau milieu de l’année 1966 dans une Angleterre aussi puritaine que rock’n’roll.
Dans Good Morning England, ou The Boat That Rocked en anglais, vous partirez à la rencontre des plus grands pirates anglais de la musique des années 1960, ceux qui étaient du genre à diffuser du Kinks, du Easybeats, du Turtles et du Beach Boys sur un bateau en mer du Nord. Si l’histoire est inspirée de Radio Caroline, elle est un prétexte pour que le spectateur fasse partie d’une équipe de timbrés ayant pour seule ambition de s’amuser, de boire, de passer des morceaux de rock dans une folie de tous les jours, face à un gouvernement britannique qui entend les censurer.
Pour son nouveau film (qui a été un échec au box-office), Richard Curtis (Love Actually, Coup de foudre à Notting Hill) a choisi l’efficacité et le dynamisme plutôt que la profondeur. En tant que spectateur, on est tout de suite plongé dans une ambiance et une décennie lointaines, Good Morning England agissant comme une madeleine de Proust musicale sans qu’on n’ait pourtant jamais fait partie de cette époque, grâce à un casting sacrément bien choisi, que ce soit Philip Seymour Hoffman, Kenneth Branagh, Bill Nighy, Rhys Ifans ou encore Emma Thompson et Nick Frost. Vous reprendrez une lampée de Rolling Stones ? [LL]
I Love You, Man
Réalisé par John Hamburg, I Love You, Man est, sous ses airs de buddy movie, la parfaite antithèse. Le bien-aimé Paul Rudd y campe le sensible Peter Klaven, un homme aux antipodes d’une virilité toxique. Il rejette tous les stéréotypes dits “masculins”, les soirées poker et le combo foot/bière, leur préférant les soirées arrosées de vin organisées par Zooey, sa femme, la merveilleuse Rashida Jones.
Mais au moment de choisir son témoin de mariage, il ne trouve comme candidat potentiel que son frère (Andy Samberg, casting décidément parfait). Sous la pression de sa femme, il va alors se mettre en quête d’un “buddy”. Mais pensant que l’amitié virile est le seul modèle d’amitié masculine valable, il va se prendre les pieds dans le tapis, entre maladresses et malentendus.
Jusqu’au jour où il rencontrera Sydney Fife (Jason Segel), la quintessence du branleur mi-cool mi-gênant, qui va cependant lui faire comprendre que l’amitié ne se compte pas en heures mais qu’elle est davantage une affaire de qualité des moments passés ensemble. La bienveillance et la douceur de Paul Rudd vous réconforteront en attendant des jours meilleurs. [MM]
Le Nom des gens
Le joli film de Michel Leclerc oscille entre comédie romantique et satire politique tout en déconstruisant adroitement les préjugés.
Bahia Benmahmoud est blanche et très à gauche. Elle applique à la lettre le principe “faites l’amour, pas la guerre” et couche avec ses opposants politiques (comprendre tous les hommes qui ne sont pas à gauche) pour les convertir à sa cause. Quand elle croise la route du quadragénaire Arthur Dupont, juif, spécialiste de la grippe aviaire et pas vraiment déconneur, elle le voit d’abord comme une nouvelle conquête à son tableau de chasse politique.
Mais il s’avère que l’homme est en réalité un des derniers fervents jospinistes (qui vaudra d’ailleurs un mémorable caméo de l’homme politique en question) et qu’ils s’aimeront alors que tout les oppose à part… leurs opinions politiques. [MM]
The Breakfast Club
Une salle de classe, un week-end déprimant, et une flopée d’étudiants assis autour de vous en attendant que le prof vous donne ses instructions : ça ne vous rappelle rien ? Ces fameuses colles pour les conneries qu’on avait l’habitude de faire au lycée ou au collège. Dans Breakfast Club, si l’époque est différente, le procédé intemporel de la colle permet rapidement de se mettre à la place des personnages de ce film culte de John Huge.
En 1985, le cinéaste américain choisit pour son deuxième long-métrage l’histoire d’une bande de cinq lycéens rassemblés pendant une retenue un samedi de mois de mars, à la Shermer High School. Cinq personnalités différentes provenant de cinq milieux sociaux différents, face à un proviseur qui leur demande une seule et unique chose : écrire une dissertation en répondant à une question piège : “Qui êtes-vous ?”
Pendant 1 h 35, la caméra s’imprègne des cinq personnalités : il y a Andy “le sportif”, Brian “le cerveau”, John “le rebelle”, Claire “la princesse” et Allison “la détraquée”. Sans jamais juger ni prendre de haut, le film a marqué une génération entière d’Américains pour la simple et bonne raison que les histoires de ces adolescents sont prises au sérieux. The Breakfast Club raconte l’envers du décor de ces personnalités “cliché” et fait tomber les masques à travers des discussions, des flirts, des altercations, jusqu’à cette scène de danse désormais rentrée dans l’histoire du cinéma (utilisée par un internaute sur une musique de Phoenix) :
The Breakfast Club se lit alors comme une libération. [LL]
Le Grand Bain
Sur le papier, cela n’a rien pour vous enchanter : une bande de paumés dépressifs se lancent dans la natation synchronisée masculine en amateur, entraînés par une femme peu aimable en surface, qui fume beaucoup, et qui est en fauteuil roulant, et par une autre femme elle aussi sévèrement dépressive. Pas sexy, donc.
Sauf que le film de Gilles Lellouche est une bombe de bonheur pur. Plutôt que de transformer ce récit original en drame, le cinéaste va puiser du côté du génial Full Monty. L’aventure devient alors une course à l’émancipation, à la redécouverte de son identité, à l’envie de s’ouvrir aux autres.
Et c’est sans parler des scènes (nombreuses) foncièrement drôles, portées entre autres par un Philippe Katerine naïf, une Leïla Bekthi énervée et un Mathieu Amalric qui donne plein d’espoir. Le Grand Bain est une bouffée d’air frais dans un cinéma français parfois en manque d’inspiration, prouvant que tout est possible. Vraiment tout. [AC]
Yes Man
Dans un monde où l’on ne peut plus rien faire et où nos libertés ont été entérinées par le Covid-19, revoir Yes Man est comme une résurrection. L’histoire ? Celle d’un homme célibataire, casanier et aussi attrayant qu’un steak de soja. Jim Carrey, qui incarne ce personnage négatif, vide et sans passion, va reprendre du poil de la bête lorsqu’il va rencontrer un séminaire d’auto-assistance dont le credo est : répondre “oui” à tout.
Dans sa nouvelle vie, le héros aventureux est d’abord confronté à quelques soucis – comme donner de l’argent à tous les SDF qui passent et accepter toutes les pub sur Internet – avant de se révéler pleinement sous son meilleur jour, retomber amoureux et vivre à 200 à l’heure. Que celui qui n’a jamais rêvé de tester ce mode de vie ultra-positif lève la main.
Le film de Peyton Reed, sorti en 2008, est un classique indémodable aussi efficace qu’un Prozac dans nos moments de faiblesse. Jim Carrey nous embarque dans sa folle existence en nous rappelant qu’avec un état d’esprit un peu plus positif, notre passage sur terre est loin d’être une corvée. [LB]
Soyez sympas, rembobinez
Jack Black est une figure tellement sympathique que, à quelques exceptions près, voir sa tronche procure un grand sourire et fait un bien fou à n’importe quel être humains. Nous aurions donc pu mettre sa filmographie presque entière ici. Mais force est de reconnaître que le film le plus réconfortant et agréable reste celui réalisé par notre cher Michel Gondry (cocorico), Soyez sympas, rembobinez.
Dans ce dernier, notre acteur fétiche incarne un type maladroit, ami de l’employé d’un vidéoclub (joué par Mos Def !), et qui efface par mégarde toutes les VHS du magasin. Le seul moyen de sauver la boutique est de tourner façon “home made” les films désormais indisponibles.
Ôde au septième art, aux effets spéciaux artisanaux, à la cinéphilie, mais aussi à l’amitié, ce film est un petit bonbon qui fait rire, sourire, rend nostalgique, et fait beaucoup (beaucoup) de bien au moral – surtout en ce moment. [AC]
Sans Sarah, rien ne va
On retrouve une nouvelle fois Jason Segel (mais quel meilleur antidote pour se sentir mieux ?), toujours aussi gauche, mais cette fois-ci le cœur brisé en plus.
Dans cette comédie, produite par le roi de l’humour qualitatif Judd Apatow, au casting une nouvelle fois impeccable, il tente d’oublier son actrice d’ex (Kristen Bell) dans un paradisiaque décor hawaïen. Seule ombre au tableau : son ex, la fameuse Sarah, a eu la même idée sauf qu’elle a invité son nouveau copain, un rocker gênant (Russell Brand), à se joindre au voyage.
Mais une équipe de choc composée de Mila Kunis, Paul Rudd et Jonah Hill lui remontera le moral en même temps que le vôtre. Dans Sans Sarah, rien ne va, on retrouve tout ce qui fait le sel des productions Apatow : des personnages nerds, de l’humour gras, des dialogues acérés mais aussi du doute et des questionnements existentiels. [MM]
(© Paramount Pictures France)
Booksmart
Le lycée n’a pas été une période agréable pour tout le monde. Si vous ne faites pas partie de ceux qui ont apprécié leur scolarité, Booksmart est l’un des meilleurs remèdes. L’histoire de ces deux intellos peu appréciés, qui prennent leur revanche sur les “cool” du bahut le temps d’une ultime soirée avant l’entrée à la fac, est parfaite.
Plus subtil sur l’aspect “les nerds prennent leur revanche” que SuperGrave (qui demeure excellent, pas de méprise), le long-métrage est malin, extrêmement drôle, absurde. C’est simple : le premier film d’Olivia Wilde est une pépite, qui fait passer par plein d’émotions différentes mais dont on ressort avec un sourire béat. [AC]
Article écrit en collaboration par Lucille Bion, Arthur Cios, Louis Lepron et Manon Marcillat