Au cours du Festival de Cannes, Konbini vous fait part de ses coups de cœur ou revient sur les plus gros événements de la sélection.
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Indiana Jones et le Cadran de la destinée, c’est quoi ?
Cela fait des années que l’on nous tease le grand retour d’Indiana Jones, plus de quinze ans après un quatrième volet assez peu apprécié des fans. Sauf que pour la première fois de la saga, Steven Spielberg passerait la main. Pour se faire, George Lucas et Kathleen Kennedy (présidente de Lucasfilm), avec la validation bien évidemment du cinéaste, sont allés chercher un certain James Mangold.
Un choix assez logique, le bonhomme étant capable de relancer une franchise mourante en mixant bastons et émotion (son Logan est un exemple du genre), de donner de la profondeur à des personnages connus du grand public (Walk the Line), maniant parfaitement sa caméra dans de grandes séquences d’action (que ce soit en voiture dans Le Mans 66 ou dans des fusillades dans 3 h 10 pour Yuma). Et le tout avec une cinéphilie déconcertante.
L’homme de la situation, armé de ses deux coscénaristes notoires Jez et John-Henry Butterworth (qui sont, et il faut le souligner, derrière le script de Edge of Tomorrow), pond alors un film qui nous fait retrouver Indy des années après ses dernières aventures. Il est proche de la retraite, a du mal à accepter la modernité et les avancées technologiques – nous sommes en 1969 et les États-Unis viennent de “gagner” la course à l’espace grâce à un certain Neil Armstrong.
Débarque alors Helena Shaw (Phoebe Waller-Bridge), sa filleule (fille de son feu grand ami Basile, campé par Toby Jones), fascinée par un drôle d’objet créé par Archimède avec lequel on pourrait triturer le temps. Sauf que l’ancien nazi Jürgen Voller (Mads Mikkelsen), qui l’était déjà du temps du Führer pendant la Seconde Guerre mondiale, recherche également l’artefact pour de sombres desseins.
Mais c’est bien ?
Difficile d’évoquer le film sans spoiler, mais nous allons faire de notre mieux pour ne pas trop en révéler.
Il y a un point indéniable : c’est du pur Indiana Jones. James Mangold coche toutes les cases du film d’aventures made in Spielberg. Peut-être même trop, le fan-service allant un peu loin (notamment sur la scène finale, où la présence de Sallah incarné par John Rhys-Davies reste assez anecdotique). Sur le fond, on retrouve une séquence avec des insectes dégueus, une course-poursuite, une exploration de grotte, la fameuse réplique “sa place est dans un musée”, un gosse un peu ingénu, une introduction où le personnage est à face cachée, des nazis…
On retrouve même un Spielberg shot. Sauf que cela souligne une des (petites) faiblesses du film : même si l’on adore James Mangold, il n’est pas Spielberg. Et visuellement, cela se voit. Les plans, jamais laids, ne sont jamais aussi frappants et splendides qu’à l’accoutumée.
Peut-être que cela vient du tout numérique. Bien que tourné dans des décors réels (et ça fait du bien, bon Dieu), la présence d’autant d’effets spéciaux, notamment à cause des longues séquences où Indy est rajeuni en VFX par du de-aging (qui, aussi impressionnant qu’il soit, ne fonctionne pas entièrement) mais pas que, saute aux yeux. D’autant plus que cela ne colle pas du tout au message du film qui, lui, est très intelligent.
En effet, on retrouve un Indy vieillissant, qui refuse la modernité. Il a du mal à comprendre la jeunesse, est déconcerté par le fait d’aller vers l’avenir alors qu’on a encore tant de choses à apprendre du passé. Sur ce point précis, c’est dommage que l’image, trop numérique et trop fausse, n’épouse pas le propos du film.
On est tatillons, car à côté de ça, justement, tout cet aspect est assez malin, et très bien exploité – notamment dans un dernier acte, que l’on ne spoilera pas mais qui est assez incroyable (et qui va diviser parce qu’assez extrême) et totalement fou. Et le personnage de Phoebe Waller-Bridge incarne parfaitement cette modernité, respectueuse de l’héritage mais allant sans cesse de l’avant.
Il faut le dire : cette dernière est remarquable. Son jeu est parfait, elle garde les mêmes mimiques et traits d’humour qu’on lui connaissait dans Fleabag tout en étant parfaitement crédible dans de la pure action – prouvant qu’elle mérite largement sa place dans les blockbusters. Ce n’est pas la seule, puisque tout le casting tient la route, mais c’est vraiment elle qui ressort.
Cela n’empêche pas d’avoir des personnages secondaires, très secondaires, voire facultatifs (Antonio Banderas, notamment). Mais c’est peut-être plus lié au principal problème du film : il y a trop d’arcs, trop d’actes. Le film est trop long. Jusque-là, aucun Indiana Jones n’avait franchement dépassé les 2 heures. Lui dure 2 heures et 30 minutes. Et l’on gagnerait largement à supprimer, disons, un certain passage sous l’eau, par exemple.
Est-ce qu’on ne chipote pas, au fond ? Si, sans doute. Car le fait est que le contrat est rempli, on retrouve vraiment Indy, l’aventure est grande, le script est solide, les séquences d’action fonctionnent, et l’émotion est là (oui, on a lâché quelques larmes). N’est-ce pas ce qu’on attend d’un Indiana Jones ? Si. Et puis, c’est toujours mieux que Le Royaume du crâne de cristal, malgré toutes ses incohérences et ses plans numériques laids. Ce qui est déjà une grande victoire.
On retient quoi ?
L’actrice qui tire son épingle du jeu : Phoebe Waller-Bridge
La principale qualité : une réflexion sur le vieillissement de son personnage vraiment intelligente
Le principal défaut : trop d’effets spéciaux, qui vont vite périmer en plus
Un film que vous aimerez si vous avez aimé : les quatre précédents, et Logan de James Mangold
Ça aurait pu s’appeler : Indiana Jones et la Retraite à 70 ans (mais pas sûr que la CGT apprécie)
La quote pour résumer le film : “S’il peut décevoir un peu techniquement, il reste un très bon volet qui tient ses promesses, généreux (trop ?), et intelligent.”