Bruno Barde, une personnalité peu connue du grand public mais très influente dans le monde du cinéma, est accusé par sept anciennes collaboratrices de harcèlement sexuel ou d’agressions sexuelles, dans une enquête Mediapart.
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Directeur du Festival du cinéma américain de Deauville, qui fête ses cinquante ans en septembre prochain, du Festival international du film fantastique de Gérardmer et de celui du film policier de Reims, il est également membre de l’Académie des César et dirige l’une des plus grandes agences de relations presse cinéma, Le Public Système. Cette année à Cannes, son agence représentait par exemple six films en Compétition officielle.
Ouvertement anti-#MeToo, Bruno Barde avait, à Deauville l’an dernier, accordé une master class au réalisateur Luc Besson pour l’avant-première de son dernier film. Trois ans avant, sur le même festival, il programmait en film d’ouverture le dernier Woody Allen, mettait à l’honneur le réalisateur américain Nate Parker (accusé de viol, relaxé depuis) et invitait également Roman Polanski.
Depuis plusieurs années, plusieurs salarié·e·s du Public Système Cinéma échangeaient sur les agissements et les propos de leur directeur sur un groupe WhatsApp. C’est quand il a reçu la Légion d’honneur, en décembre 2023, que certain·e·s ex-employé·e·s, “dégoûté·e·s”, ont décidé de contacter Mediapart.
Même modus operandi
Bruno Barde est donc accusé de comportements inappropriés, d’humiliations et de violences sexuelles par sept collaboratrices entre 2014 et 2023. Le modus operandi rapporté dans l’enquête est similaire à chaque fois : il s’agit de jeunes femmes, qui débutent à ses côtés et qui rapportent des attouchements et des propos à caractère sexuel, soient des faits qui s’apparentent à des agressions sexuelles et qui se seraient déroulés en majorité lorsqu’elles étaient seules avec lui dans son bureau, dans une salle de cinéma ou encore dans un ascenseur.
Ses anciennes collaboratrices racontent :
“Il m’a coincée contre une rambarde, et il a passé sa main sous [mon] T-shirt pour me tenir le bas du dos” […] “Il en a profité pour se glisser entre mes jambes, de face, et m’agripper les cuisses” […] “Il me faisait souvent des allusions sur mon physique et ma sensualité” […] “Il me posait des questions intimes sur ma sexualité” […] “Il exigeait que je sois tout le temps collée à lui, j’avais même du mal à faire mon travail correctement” […] “Il m’a proposé de me faire couler un bain dans sa chambre d’hôtel et de me masser”.
Elles rapportent également des changements d’humeurs et des humiliations suite au refus. De manière générale, plusieurs personnes interrogées témoignent d’une ambiance de travail “toxique”, des “humiliations”, un manque de considération ainsi que des propos sexistes tenus par Bruno Barde au sujet des femmes avec qui il travaillait hors de son équipe. “Il traite les meufs de pouffiasses et de salopes quand il regarde le tapis rouge à Cannes, il n’a que des expressions sexistes et déplacées”, relate ainsi une ancienne de ses salarié·e·s.
Le directeur de festival a répondu à Mediapart et admet avoir “un tempérament latin” et être “un esthète qui a peut-être le compliment trop facile” mais assure n’avoir fait aucune “remarque à connotation sexuelle, ni eu le moindre geste ou incitation à caractère sexuel ou sexiste envers [ses] collaboratrices.”