Le Magnifique
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On ne présente plus Jean-Paul Belmondo. Une des figures de la Nouvelle Vague, une des figures de la comédie française, une des figures chez Verneuil, Melville ou Lelouch, une des figures dans les films d’action à la française et surtout la figure chez Philippe de Broca, avec qui il a fait les 400 coups. Mais parmi ses tribulations, en Chine comme à Rio, il y en a une particulièrement loufoque, à la limite de l’absurdité, et en plein dans la poésie : Le Magnifique.
En 1973, le cinéaste français lui offre un film qui résume les personnages qui l’ont caractérisé, à travers un scénario qu’il a travaillé avec Francis Veber et Jean-Paul Rappeneau, ou l’histoire de François Merlin, un écrivain français à la petite semaine habitant Paris ayant pour habitude de façonner les aventures d’un héros surdimensionné, Bob-Sinclar, agent secret beau parleur, se situant entre James Bond et OSS 117.
L’idée géniale du Magnifique est d’intégrer le psychisme d’un personnage à travers la fiction qu’il est en train de créer sous nos yeux. On observe alors la superposition de ces deux entités, qui pourraient résumer la carrière d’un acteur ayant eu la capacité de toucher le cœur du public comme celui des critiques. Dans Le Magnifique, les frustrations de l’écrivain ont des conséquences sur le parcours et les comportements de son Bob-Sinclar flamboyant et caricatural, incluant même parfois des éléments et agents de sa vie réelle – les plombiers récalcitrants qui se retrouvent en pleine fusillade ou la femme de ménage qui continue de passer l’aspirateur sur la plage.
Le résultat est un mélange savoureux entre une fiction et une réalité qui s’entrecroisent, à travers un Jean-Paul Belmondo au sommet de sa forme, entre une plage paradisiaque et un panaris de la déprime, et un Philippe de Broca qui relie avec maîtrise ces fils scénaristiques, aidé de son monteur Henri Lanoë. Un long-métrage qui a (sûrement) inspiré autant Last Action Hero de John McTiernan que les OSS 117 de Michel Hazanavicius.
Top secret !
Le trio Zucker-Abrahams-Zucker est l’une des pierres angulaires de la comédie américaine. Ceux qui ont nourri pendant des années diverses générations d’apprentis humoristes, et à qui l’on doit la naissance des Nuls ou de Michel Hazanavicius, ont fait leurs armes à travers des films à l’humour absolument insensé. Si on vous dit Y a-t-il un pilote dans l’avion ?, ça vous parle forcément. Toute la série est culte. L’un de leurs meilleurs films est peut-être moins connu, mais tout aussi dingue.
Top secret ! est un beau pastiche du film d’espion, ou plutôt de ce genre de film où une personne lambda se retrouve à devenir contre son gré un espion – ici, on parlera d’un résistant face à une Allemagne de l’Est tyrannique. Le chanteur Nick Rivers (incarné par un jeune Val Kilmer dans son tout premier rôle), sorte de copie d’un Elvis, se retrouve un peu contre son gré à lutter contre un régime entier pour sauver un prisonnier.
Si on se moque à tour de bras du genre original, le génie des ZAZ ressort surtout dans la quantité industrielle de gags. Il y a un gag toutes les 5 secondes ! Si l’on regarde le film en se concentrant là-dessus, c’est une véritable leçon. Mais surtout, l’absurdité des vannes, et le fait que les acteurs trouvent ça absolument normal, rendent l’exercice incroyablement réussi. On y voit des humains voler tels des oiseaux en fond pour atterrir sur une statue géante de pigeon, pisser sur la statue avant de redécoller. Ça n’a pas de sens, mais c’est normal. Il y a du pipi/caca un peu, il y a du bien méta, des piques à gauche à droite (dont une sur Reagan pas piquée des hannetons), le tout en parodiant plusieurs genres et films précis.
La Loi de la jungle
Tout commence avec une statue de Marianne transportée depuis un hélicoptère, symbole de la France qui se barre en cacahuète. L’inénarrable Vincent Macaigne et l’ouragan Vilama Pons aka Tarzan se rencontrent en Guyane où le premier est envoyé par le ministère de la Norme pour diriger un chantier destiné à relancer le tourisme sur le territoire ; à savoir la première piste de ski d’Amazonie. La seconde, qui n’est pas là pour rigoler, fera office de coéquipière. Le duo croisera également sur son chemin Duplex (Pascal Légitimus) et Galgaric (Mathieu Amalric).
Entre deux huissiers bodybuildés, des mygales redoutables, un piano littéralement scié en deux et autres gags complètement barrés, Antonin Peretjatko (derrière La Fille du 14 juillet) fait appel à une mise en scène hilarante dont résulte une excellente comédie française qui sort de l’ordinaire. Un remède anti-déprime absolu.
Las Vegas Parano
Ce film culte de Terry Gilliam suit Johnny Depp, clope au bec et poudre dans le nez, dans ses délires hallucinatoires. Ce combat entre la réalité et l’imagination du héros reconnaissable à son bob et ses lunettes fumées marque les années 1990 en rendant hommage à l’écrivain Hunter S. Thompson, à qui l’on doit le récit de Las Vegas Parano et l’invention du gonzo-journalisme.
Qu’il soit transpirant, qu’il chasse les chauves-souris ou qu’il baragouine, Johnny Depp recrée toutes les mimiques de ce personnage haut en couleur. Impossible de ne pas tapoter du pied en écoutant la BO et d’esquisser au moins un sourire devant cette folle prestation, filmée dans un décor électrisant, convoquant la magie et la folie démesurée de Las Vegas. À l’image de ce film immanquable.
H2G2 : Le Guide du voyageur galactique
H2G2, et on ne le dit pas assez souvent, est un petit bijou de science-fiction à travers le prisme de la comédie et de gags complètement absurdes. Adaptation du livre culte de Douglas Adams sorti en 2005, son scénario peut se résumer de la manière qui suit.
Sale journée pour le Terrien Arthur Dent. Sa maison est sur le point d’être rasée par un bulldozer, il découvre que son meilleur ami, Ford Prefect, est un extraterrestre et, pour couronner le tout, la Terre va être pulvérisée dans quelques minutes pour faire de la place à une voie express hyperspatiale.
Si Arthur survit et quitte une Terre qui vient de disparaître sous ses yeux, il va découvrir la nature de l’univers à travers un périple fou pour répondre à l’unique, la seule et l’immense question : “la grande question sur la vie, l’univers et le reste”. Si cette description ne vous donne pas assez envie, jetez plutôt un coup d’œil au casting : Martin Freeman, Mos Def, Zooey Deschanel, Sam Rockwell, Alan Rickman ou encore John Malkovich et Stephen Fry pour la voix du narrateur. Allez, on se retrouve sur le pont du Cœur en or (c’est un vaisseau).
Sorry to Bother You
Ce top de comédies WTF n’aurait pas pu être complet sans la présence de Sorry to Bother You. Un ovni cinéma sorti avec beaucoup de peine en France en 2018, après être passé par Sundance, festival de référence du cinéma américain indépendant.
Dans cette histoire improbable, mais ô combien engagée, Lakeith Stanfield travaille comme un bon petit soldat pour une entreprise de télémarketing. Rapidement, il grimpe les échelons et devient le poulain de son patron (Armie Hammer), cocaïnomane.
S’il baigne dans l’argent et le luxe, il a dû faire un sacrifice : changer sa voix de Noir pour celle d’un Blanc. Si l’on peut y voir une relecture perchée et capitaliste de La Petite Sirène, ce n’est pas sur deux jambes que vous allez marcher, mais bien sûr la tête, en assistant à un final complètement allumé. Improbable et inattendu, Sorry to Bother You tire à balles réelles sur les puristes du septième art.
La Classe américaine : Le Grand Détournement
Avant de se plonger du côté des OSS 117, et alors qu’il faisait ses armes du côté des Nuls, un certain Michel Hazanavicius s’est vu proposer un drôle de projet : faire des détournements de films pour Canal. Ni une ni deux, ce dernier accepta. Avec son complice Dominique Mézerette, ils feront d’abord un court-métrage, Derrick contre Superman, puis un deuxième, Ça détourne.
Avant de vouloir lâcher l’affaire, la chaîne leur propose de recommencer une dernière fois en faisant un vrai long-métrage, avec la possibilité de piocher dans tout le catalogue de la Warner et une sortie en salles assurée. Bingo. Sauf que rien ne se passe comme prévu, la Warner fait la gueule et le film ne sera diffusé qu’une seule (!) fois sur Canal. Mais le bouche-à-oreille et les copies pirates feront de ce long-métrage une œuvre ultra-culte.
Il faut dire que voir Dustin Hoffman et Robert Redford enquêter sur la mort de John Wayne aux côtés de Paul Newman dans un film construit façon Citizen Kane, à travers des séquences montées de près de 80 films cultes, avec un casting incroyable, des doubleurs des acteurs qui font des blagues pipi/caca dans une entreprise vraiment absurde, ça n’a pas de prix. Vraiment pas !
Les Clefs de bagnole
Dans Les Clefs de bagnole, tout semble avoir été laissé au hasard : on a droit à un scénario qui a dû mal à dérouler, des mises en abîme perpétuelles, des acteurs qui se plaignent de leur personnage, des inserts d’animations, des références ciné placardées dans chaque plan (des Quatre Cents Coups à Un singe en hiver), des micros-trottoirs qui viennent répondre à l’histoire ou même un producteur du film qui débarque en pleine scène de bagnole.
“Plus c’est gros, mieux ça passe”, aurait pu être le sous-titre de ce premier et dernier film de Laurent Baffie, introduit par une flopée de producteurs puis d’acteurs qui refusent de produire le film comme de jouer dedans – la tagline du film a finalement été “N’y allez pas, c’est une merde !”.
Si c’est finalement Daniel Russo et Laurent Baffie qui s’y collent, c’est pour nous proposer l’un des ovnis les plus coûteux (plus de 3 millions d’euros, ce qui a mis son réalisateur dans de beaux draps garnis de dettes) et absurdes de l’histoire du cinéma français, constitué de vraies idées de mises en scène, d’un casting dingue (Gérard Depardieu incarne même un fromager) et, surtout, d’un amour pour le cinéma, des dialogues d’Annie Hall à la rencontre entre le cinéma et la réalité dans Last Action Hero. Si le film n’a pas eu le succès escompté (180 000 entrées), on peut affirmer avec aplomb qu’il a marqué chaque spectateur qui l’a croisé.
Disjoncté
1996 : dans le dos de Jim Carrey, trois comédies sorties la même année qui ont été un immense tremplin pour sa carrière, soit Ace Ventura, détective chiens et chats (1994), The Mask (1994) et Dumb and Dumber (1994). Si Batman Forever n’est pas forcément apprécié à sa sortie en 1995, le voilà sur un nouveau projet en 1996.
Face à lui, Ben Stiller, pour son deuxième projet de long-métrage après Génération 90, Disjoncté. Soit l’histoire de Steven Kovacs (Matthew Broderick), qui vient tout juste d’emménager dans un nouvel appartement et entend profiter de toutes les chaînes de sa nouvelle télévision. Pour ce faire, il fait venir un réparateur. Il s’appelle Chip (Jim Carrey) et ne veut pas être payé pour ses services. Il veut, avant tout, se faire un ami.
Dans Disjoncté, la limite entre la comédie et le drame, l’absurde et l’intelligible, est souvent franchie, Ben Stiller profitant de l’aura humoristique de Jim Carrey pour en faire un grand clown triste pour la première fois de la carrière de l’acteur canadien. Car Disjoncté insuffle le tournant “dramatique” et sérieux de Jim Carrey, que ce soit avec The Truman Show (1998), l’incarnation d’Andy Kaufman dans Man on the Moon (1999) ou encore Eternal Sunshine of the Spotless Mind (2004).
1941
1941, c’est le cinquième film d’un réalisateur âgé d’à peine 30 ans, Steven Spielberg, auréolé par ses deux précédents longs-métrages au succès monstre, Les Dents de la mer (1975) et Rencontres du troisième type (1977). 1941, c’est John Belushi, Dan Aykroyd, Robert Stack, Toshirô Mifune, Mickey Rourke, Treat Williams et John Candy au casting. 1941, c’est un scénario fou… tiré de faits réels, ou l’histoire d’un sous-marin japonais qui s’est approché un peu trop près dans la baie de Santa Barbara pour attaquer… des champs pétrolifères.
1941, c’est un projet maudit, un cauchemar : 247 jours de tournage, une équipe qui met des T-shirts sur lesquels est inscrit “1941 forever, and ever, and ever…” et un acteur principal qui se réveille à la cocaïne pour mieux déserter son travail pendant des jours. 1941, enfin, c’est un film de guerre, une comédie, une parodie, une autocitation (la scène d’introduction fait écho aux Dents de la mer) pour un long-métrage au budget (explosé) de 35 millions de dollars et une sortie en salles catastrophique. Enfin, 1941, pour toutes ces raisons-là, se doit d’être absolument vu tant il symbolise la seule fois de la carrière ou le cinéaste Steven Spielberg a perdu les pédales. Et à l’écran, ça se voit.
Swiss Army Man
Après avoir incarné pendant dix ans le prodige de la magie, Daniel Radcliffe a tiré un trait sur les gros blockbusters et a volontairement fui les projecteurs et les paillettes hollywoodiennes pour des films indépendants ou, du moins, avec des budgets plus modestes. Parmi les projets les plus farfelus dans lesquels il s’est retrouvé, on compte Swiss Army Man, dans lequel il joue… un cadavre péteur.
Aux antipodes du glamour, cette comédie dont il partage l’affiche avec Paul Dano est à l’origine une blague des deux réalisateurs Dan Kwan et Daniel Scheinert, rapidement validée par Quentin Tarantino.
Prix de la Mise en scène au festival du film de Sundance, ce buddy movie aussi fascinant que malaisant ne mettra certainement pas tout le monde d’accord, mais vous permettra d’avoir une looooongue discussion sur la qualité de ce film étrange avec vos amis. Car si l’histoire n’est autre que celle d’un homme coincé sur une île du Pacifique, pris d’affection pour un cadavre, il y a beaucoup à dire.
Sausage Party
Des saucisses de Francfort, des pains à hot dog, des pots de confiture, du beurre de cacahuètes… Une flopée d’aliments ne vit que pour être recueillie dans le Caddie des humains qui viennent faire leurs courses au supermarché. Mais lorsqu’ils s’apprêtent à toucher ce but, les aliments s’aperçoivent que les humains sont d’affreux tortionnaires qui les enfournent, les charcutent et les découpent en petits morceaux.
Face à ces situations aussi alléchantes que déconcertantes, le film a divisé le public en deux : ceux qui se fendaient la poire et ceux qui étaient outrés. Ces derniers, regroupés notamment sous l’association Promouvoir, ont traîné en justice le film pour son caractère “libertaire, pornographique et anti-religieux”. S’en est suivi un procès WTF, à l’image du film d’animation interdit aux moins de 12 ans.
Rien que pour vos cheveux
Sur le papier, ce film a tout pour être pourri : le combo Adam Sandler + comédie lourdingue + coiffeur (vous avez bien lu) + faux accent + blague sur les Israéliens et les Palestiniens. Non, vu comme ça, rien ne va. Et pourtant. Rien que pour vos cheveux est un mélange absurde de plein de choses, misant au départ sur la parodie du film d’espion. Sauf qu’ici, on retourne les choses et plutôt que d’avoir une personne lambda qui devient espion à l’insu de son plein gré, c’est tout l’inverse.
Adam Sandler incarne Zohan, espèce d’espion increvable pour le Mossad, qui décide de tout plaquer pour devenir coiffeur à New York. Le principe est déjà chelou, mais ça, ce n’est rien comparé aux “qualités” de coiffeur de Zohan et des improbables péripéties absolument WTF que tout cela entraîne, à base de relations sexuelles avec des septuagénaires, de coups de pied imparables et beaucoup (beaucoup) de houmous.
Le film le plus con de cette sélection avec des blagues datées et douteuses, vous êtes prévenus – mais ça peut quand même faire parfois du bien, non ?
Monty Python : Sacré Graal !
Cette sélection n’existerait sans doute pas sans les Monty Python. La troupe britannique est sans nul doute l’inventrice de l’humour surréaliste tel que nous le connaissons. Sans eux, pas de ZAZ, pas de Nuls, rien ! Toute leur filmographie est une leçon d’absurdité. Et si certains sont plus fous que d’autres, leur plus grand œuvre demeure Sacré Graal.
Cette parodie du film moyenâgeux qui reprend le mythe d’Arthur et de la Table Ronde est parfaite. Et il faut imaginer qu’à l’époque, en 1975, retrouver des gags aussi absurdes qu’une attaque mortelle par un petit lapin, une promenade à cheval sans cheval, une grenade sacrée ou des segments animés dingues était assez unique.
Car si l’on était habitués à leur sketch, c’est leur vrai premier film écrit pour le grand écran. Et tout est brillant, culte, et n’ayant pas pris une ride. Le plus important de toute cette sélection, sans nul doute !
RRRrrrr
Dès lors qu’on parle d’humour absurde, le nom d’Alain Chabat est de mise. Et avec RRRrrr, il faut être plus qu’enclin à apprécier l’humour de répétition et le dixième degré, concepts auxquels les critiques n’ont pas été du tout réceptives au moment de la sortie de film, lui réservant un accueil glacial.
Ce qu’elles n’avaient certainement pas anticipé, c’est le potentiel du film à perdurer dans le temps. Car aujourd’hui, les répliques de cette comédie préhistorique loufoque, où deux tribus s’affrontent pour une histoire de recette de shampooing, portée par les Robins des Bois, sont devenues un réflexe rhétorique pour toute une génération.
Si ce thriller policier préhistorique (qui peut d’ailleurs se targuer d’être le seul et unique dans son genre) s’apparente davantage à une suite de sketchs, il nous est immédiatement venu à l’esprit lorsqu’on a évoqué l’humour absurde hexagonal pas particulièrement vivace.
Perdrix
Projetée à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes l’an dernier, ce premier film, comédie romantique burlesque, est un foutoir absurde et tendre à la fois.
Son pitch ? Un véritable kamoulox. Au premier plan, un gendarme vosgien plan-plan voit son quotidien chamboulé lorsqu’il sera chargé de l’enquête pour un vol de voiture par une bande de nudistes révolutionnaires et tombera amoureux de la victime. Cette dernière, atteinte de logorrhée et de graphomanie, est en réalité plus contrariée par le vol de ses journaux intimes que par celui de son automobile.
Au second plan, une cellule familiale dysfonctionnelle et cabossée : mère omnipotente qui anime une émission d’antenne libre dans son garage, un frère lombricologue et une jeune nièce pongiste.
Perdrix est tout à la fois : sous ses airs de comédie policière, nouveau terreau de l’humour absurde en France (comme on l’a récemment vu dans En liberté ! et Au poste !), il est aussi une touchante comédie romantique doublée d’un film sur l’émancipation où, au milieu d’un champ de névroses familiales, l’amour parvient à fleurir.
The Big Lebowski
Le septième long-métrage des frangins Coen s’ouvre sur un classique quiproquo : Jeffrey Lebowski, alias le Dude (et surtout pas Le Duc, traduction française bien mal avisée), est confondu avec son homonyme millionnaire et va se faire passer à tabac à domicile. Les malfaiteurs en profiteront pour uriner sur son tapis préféré, le seul outrage qui puisse le faire sortir de sa léthargie, encouragé par un copain abîmé par son expérience de la guerre du Vietnam et très enclin à la bagarre.
S’ensuivent alors les aventures loufoques du plus gros glandeur de tous les temps, qui en profite pour offrir une hype toute nouvelle à ses deux passions ringardes : le bowling et les White Russians.
Si les frères Coen ne considèrent pas The Big Lebowski comme un film fondateur, la fiction a rattrapé la réalité et son apathique anti-héros est devenu culte malgré lui (un peu comme tout ce qui lui arrive).
Et bien que la définition de “culte” soit un peu opaque, il n’y a ici aucun débat possible puisque le Dude a désormais une religion à son nom, le “dudeisme”, fort de ses 220 000 adeptes. Et vingt ans plus tard, on parie que cet anti-héros en peignoir sale n’a pas fini de gagner en popularité tant sa philosophie est une véritable ode au lâcher-prise.
Cette comédie qui pastiche le film noir, où chaque ressort classique du thriller aboutit à un gag, renforcé par une esthétique pop, fait figure de parenthèse enchantée et absurde dans la filmographie des frères Coen.
Vampires en toute intimité
Si la vie des vampires a déjà été adaptée de toutes les manières possibles à l’écran, à l’écrit ou en chanson, personne n’avait jusqu’alors pensé à les filmer à la sauce faux mockumentary décalé et absurde.
C’est donc la première idée géniale de Jemaine Clement et du désormais bien connu Taika Waititi (Jojo Rabbit), qui optent pour une fausse mise en scène, au naturel digne des plus mauvais épisodes de Confessions intimes, avec une caméra si intrusive qu’elle s’embarque même dans les courses-poursuites entre humains et vampires.
Leur deuxième géniale idée est de transformer ces vampires en une bande d’ado attardés. On suit donc Viago, Deacon et Vladislav, trois vampires néo-zélandais, dans leur banale vie de colocation, entre corvées de vaisselle, virées de loubards dans les sombres boîtes de nuit de Wellington et embrouilles avec un gang de loups-garous.
Vampires en toute intimité, qui associe humour noir et second degré, est parsemé de clins d’œil à toutes les générations de vampires, de Nosferatu à Edward Cullen, et est une pépite d’humour absurde injustement sous-cotée.
Réalité
Dans le cinéma français, l’absurde a un nom : Quentin Dupieux. Si on aurait aussi pu vous parler de Steak ou Au poste !, nous avons choisi Réalité, son film le plus ambitieux et le plus abouti, mais également le plus personnel, qu’on imagine reflet de ses propres angoisses créatrices (Dupieux a mis huit ans à concrétiser ce projet un peu fou).
Ce petit bijou de bizarrerie onirique, en comparaison duquel nos rêves les plus tordus paraissent bien conventionnels, parodie habillement l’industrie du cinéma au travers d’absurdes échanges entre un réalisateur et son producteur qui accepte de produire un scénario rocambolesque à base de téléviseurs tueurs, à une seule condition : qu’il parvienne à trouver le meilleur cri de l’histoire du cinéma.
Au fur et à mesure que le casse-tête avance, une fillette obsédée par une VHS bleue qu’elle croit sortie des entrailles d’un sanglier, un présentateur d’une émission de cuisine douteuse persuadé d’être atteint d’une violente crise d’eczéma et un directeur d’école qui se travestit rejoignent cette rocambolesque aventure. Les temporalités, les fameuses réalités, vont alors s’entremêler et Jason, l’aspirant réalisateur, va devenir l’acteur de son propre film.
Alain Chabat, entouré de noms de l’humour absurde outre-Atlantique, comme le génial et décalé Eric Wareheim ou encore Jon Heder, partenaire de Will Ferrell dans Les Rois du patin, nous sème dans les méandres scénaristiques de cet ovni qui pulvérise les codes de la narration.
Mandy
Pas vraiment ce qu’on appellerait une comédie. En vrai, on tend plutôt vers de l’horreur gore, à la photographie et la scénographie assez incroyables (beaucoup de fumée et de lumière colorée). Sauf que le rêve éveillé, enfin le cauchemar, de ce cher Nicolas Cage se transforme à un moment, et le film devient alors tout autre chose.
Le délire fou et absurde d’un Cage qui devient taré, armé d’une tronçonneuse, fait plonger le long-métrage dans un WTF bien assumé. Sans être un nanar pour autant, au contraire, cette aventure foutraque devient soudainement presque comique. En tout cas, nous, en plus d’être un défouloir, ce film nous a fait bien rire – et dans le bon sens du terme. Ou alors, on est un peu bizarres. C’est possible aussi…
Article écrit en collaboration avec Louis Lepron, Lucille Bion et Manon Marcillat.