Qu’il est tendre, le vent de nostalgie qui souffle à brises légères sur Licorice Pizza En 2021, et à peine deux ans après Once Upon A Time… In Hollywood, c’était au tour du 9e long-métrage de Paul Thomas Anderson de nous immerger dans le glamour du Los Angeles des seventies. L’ambition ? Tisser la toile de fond pop, vintage, d’un amour adolescent ancré dans un passé aux teintes sépias. Cet irrésistible rembobinage, “PTA” l’exécute avec une gourmandise de gosse – et pas besoin d’aller chercher bien loin pourquoi.
Piqûre de rappel : Paul Thomas Anderson est né en 1970, à LA. Autrement dit, avec ce bond dans le passé (déjà esquissé du côté de Boogie Nights, d’ailleurs), le réal’ plonge à pied joint dans le souvenir de son enfance. Et se plaît à nous éclabousser au passage – le plaisir de môme, à nouveau. Carte postale d’une jeunesse passée sous la caresse du soleil californien, Licorice Pizza est logiquement truffé de clins d’œil historiques – et personnel. On fait le point, en partant à la chasse à l’easter egg.
1. Le titre n’est PAS une référence à une pizza cheloue
Vous tombez de haut, hein ? Licorice Pizza, littéralement traduisible par la formule peu ragoûtante de “pizza à la réglisse”, n’a aucun lien avec une périlleuse expérimentation culinaire à laquelle se serait adonné PTA. “Après plusieurs mois à me taper la tête contre le mur en me demandant comment j’allais appeler le film, j’ai conclus que pizza et réglisse était les mots qui m’évoquaient le plus mon enfance”, a expliqué le cinéaste à Variety. Avant de confier qu’étant petiot, il passait souvent devant la boutique d’une chaîne de disquaire du sud de la Californie baptisée… Licorne Pizza. Tout est dit !
2. Joel Wachs s’est vraiment présenté aux municipales
Souvenez-vous. Alors qu’Alana donne une nouvelle impulsion à sa vie, elle rejoint l’équipe de campagne d’un certain Joel Wachs, incarné par Benny Safdie. Le film retrace ensuite les premiers pas du personnage, dans sa course à la municipalité de LA. Un projet qui n’aboutira pas dans la réalité. Homosexuel (comme le souligne le film), le politicien fera par contre partie du conseil d’administration de la ville durant 30 ans, dans le même district où est né puis à grandi… PTA, bien sûr. Lors de la préparation du script, le cinéaste a donc contacté celui qui est aujourd’hui à la tête de la Fondation Andy Warhol pour les Arts visuels, en expliquant qu’il lui tenait à cœur de filmer la trajectoire l’homme pour qui ses parents avaient voté, étant jeune. Avant d’ajouter qu’il voyait dans l’ancien édile une “partie indispensable de l’histoire de la San Fernando Valley”,dans un échange de mails entre les deux hommes rapporté par le Los Angeles Times.
3. Le producteur campé par Bradley Cooper a effectivement daté Barbra Streisand
C’est une séquence qu’on n’est pas prêt d’oublier. Sous la caméra de PTA, le beau gosse d’Hollywood endosse le rôle truculent – grotesque, diront certains – de Jon Peters, un coiffeur de formation devenu producteur, et notamment célèbre pour avoir cultivé pendant douze ans une romance avec la chanteuse Barbra Streisand. Résultat de l’interprétation ? Un Cooper 100 % lunatique, qui tantôt confie ses soucis d’addiction au sexe auprès de Gary (qui n’en demandait pas tant), tantôt terrorise toute une station service pour dégoter illico son essence. Si ces excès amusent par leur ridicule grâce à l’interprétation déjantée de l’acteur, la réalité du personnage ne prête guère à rire. Il a été poursuivi pour harcèlement sexuel et, dans la foulée du mouvement #MeToo, sa toxicité a été soulignée à plusieurs reprises, à travers plusieurs articles.
4. Le “Tail’O The Cock” existait bel et bien
Et ce n’est pas un hasard si, dans le film, il s’agit du restaurant favori de Garry – où il invite Lana puis, plus tard, d’autres de ses flirts. Après tout, l’établissement uppé de Studio City a, historiquement, servi le couvert à des personnalités de la voilure de Ronald Reagan, Elizabeth Taylor ou encore Robert Kennedy. C’est donc en bonne logique notre adolescent, qui n’a jamais cessé de se rêver en business man triomphant, se plaît à fréquenter, lui aussi, ce lieu cinq étoiles.
5. Une bande-son rétro à souhait
Que seraient ces superbes plans-séquences tournés au bon vieux 35mm (nostalgie oblige) sans un accompagnement sonore tiré au cordeau ? Tout ce que les 70’s comptent de rocks star, de divas et d’expérimentations folks sont réunis. Du Nina Simone par ci, des The Doors par là. Un vrai saut dans le temps, également mis en scène à travers des décors rétro, et des costumes so vintage. Clairement, Paul Thomas Anderson s’est fait plaisir. D’ailleurs il a lui-même qualifié son immersion durant les séquences de tournage de “joyeuse“ auprès de nous. Avant de confier :
“(durant le tournage) tu sens que tu as accès à ce petit monde secret et magique qui n’a rien à voir avec le monde réel. C’est comme avoir de grandes vacances et tu reviens ensuite chez toi après le tournage. Et ensuite, ça te manque.”
A fortiori quand, en quittant les plateaux, on tourne le dos à son enfance. Pas vrai, Paul ?